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feurs, ou les envoia en exil : & pendant le che min à la perfuafion des Evêques Ariens, on lâcha après eux des gens impitoiables, pour leur ôter ce que les fideles leur avoient donné par compaffion pour leur fubfiftance. Deux Vandales, qui avoient fouvent confeffé fous Genferic, accompagnez de leur mere, abandonnerent tous leurs biens & fuivirent les Clercs de Carthage dans leur exil. Un apostat nommé Theucarius qui avoit été lecteur, & avoit eu fous fa conduite de jeunes enfans, qui apprenoient le chant, confeilla d'en r'appeller douze, qu'il connoiffoit pour avoir les plus belles voix. On envoia en diligence pour les ramener : ils ne vouloient point quitter les faints Confeffeurs, & s'attachoient à leurs genoux en pleurant; mais les Heretiques les en feparerent l'épée à la main & les rainenerent à Carthage. On effaia d'abord de les gagner par careffes, enfuite on les tourmenta à plusieurs reprifes, & on les chargea de coups de bâton; mais ils demeurerent inébranlables. La perfecution étant paffée, la ville de Carthage les refpectoit comme douze Apôtres : ils demeuroient enfemble mangeoient ensemble & chantoient #. 13. \ ensemble les louanges de Dieu. Les Evêques & les Clercs Ariens perfecutoient plus cruellement les Catholiques, que le Roi ni les autres Vandales. Ces Evêques marchoient par tout l'épée au côté avec leurs Clercs, & le plus cruel de tous étoit Antoine, voifin du defert de Tripoli il détermina le Roi Huneric qui le connoissoit, à envoier dans ce defert Eugene Evêque de Carthage; & Antoine aiant ordre de le garder, le mit dans une fi étroite prison qu'il ne le laiffoit voir à perfonne il chercha même plufieurs inventions pour le faire perir. Saint Eugene touché des afflictions de fon Eglife, portoit un cilice & couchoit fur la terre couverte feulement

d'un

d'un fac. Cette aufterité jointe à fa vieilleffe lui attira une paralyfie qui lui embarraffoit même la langue. Antoine fit chercher du vinaigre trèsfort, & lui en fit boire malgré lui, croiant qu'il en perdroit la vie fon mal en augmenta à la verité, mais il ne laiffa pas de guerir.

Catholi

Un autre faint Evêque nommé Habetdeum XIII. étoit auffi relegué à Thamallume où Antoine étoit ne pouvant l'obliger à fe faire Arien, ques rebail ptifez par le fit lier pieds & mains, & lui fit fermer la bou- force. che, de peur qu'il ne criât; puis il lui verfa de n. 12, l'eau fur le corps pour le rebaptifer; enfuite il le fit délier, & lui dit avec joie: Mon frere, vous voila maintenant Chrétien comme nous que pourrez-vous faire deformais, finon d'obeïr à la volonté du Roi? Le faint Evêque répondit: J'ai toûjours confervé la même foi, & tandis que vous me teniez la bouche fermée, je faifois dans mon cœur une proteftation, que les Anges écrivoient pour la prefenter à Dieu. Cette vio- n. 13. lence étoit generale, on avoit envoié par tout des Vandales, pour prendre ceux qui paffoient fur les chemins & les amener aux Evêques Ariens, qui les rebaptifoient, & leur en donnoient des certificats par écrit de peur qu'on ne leur fit ailleurs la même violence. On ne laiffoit paffer ni les marchands ni les autres particuliers fans ces certificats. Les Evêques & les Prêtres Ariens alloient même la nuit avec des troupes de gens armez par les villes & les bourgades enfonçoient les portes & entroient dans les maifons, portant de l'eau, dont ils arrofoient jufques à ceux qu'ils trouvoient dormans dans leurs lits puis crioient qu'ils les avoient faits Chrétiens. Les mieux inftruits ne s'en mettoient pas en peine; les plus fimples fe croiant fouillez, jettoient auffi-tôt de la cendre fur leur tête, se couvroient de cilices, ou fe frottoient de bouë, Tome VII. B

#.14.

8.15.

déchiroient les linges dont on les avoit couverts, & les jettoient dans des cloaques.

:

A Carthage on enleva ainfi par ordre de Cyrila, le fils d'un homme noble, âgé feulement de fept ans, qui crioit: Je fuis Chrétien, & fa mere les cheveux épars le fuivoit en courant toute la ville ils fermerent la bouche à cet enfant & le plongerent dans leurs fonts. Ils traiterent de même les enfans du medecin Liberat, qui avoit été condamné au banniffement avec fa famille. Les Ariens s'aviferent de feparer les enfans, & comme Liberat les regretoit, fa femme arrêta fes larmes, en difant: Quoi perdrezvous vôtre ame pour vos enfans? Comptez qu'ils ne font pas nez: JESUS-CHRIST les reclamera, ne les entendez-vous pas crier : Nous fommes Chrétiens. Comme on avoit mis Liberat & fa femme dans des prifons feparées, on dit à la femme que fon mari avoit obéi au Roi. Que je le voie, dit-elle, & je ferai ce qu'il plaira à Dieu. On la tira de prifon, elle vit fon mari devant le tribunal enchaîné avec une grande multitude, & le prenant à la gorge, elle lui dit Miferable, indigne de la grace de Dieu, pourquoi veux-tu perir éternellement pour une gloire paffagere? A quoi te ferviront l'or & l'argent ? te délivreront-ils du feu d'enfer? Son mari lui répondit: Qu'avez-vous, ma femme, que vous a-t-on dit de moi? je fuis toûjours Catholique par la grace de JESUS-CHRIST, & ne perdrai jamais la foi.

Plufieurs, tant hommes que femmes, craignant la violence de cette perfecution, fe retirerent dans des deferts, & y moururent de faim ou de froid. Ainfi Crefconius Prêtre de la ville de Myzente fut trouvé mort dans une caverne du mont de B. 17. Zique. Il y eut en ce tems-là une fechereffe extrême par toute l'Afrique, qui caufa une grande

faminé, & enfuite une pefte : & ces fleaux fu-
rent regardez comme une punition divine de la
perfecution. On regarda de même la mort d'Hu- .21,
neric; car après avoir regne fept ans & dix mois,
il mourut en 485. d'une maladie de corruption,
fourmillant de vers & tombant par pieces: il
eut pour fucceffeur Gontamond fils de fon frere
Genton.

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XIV.

tion des le

Prevarica

gats du Pape à C. P. vag. III.

Hift. 20.

Sup. n.10.

Sup. liv.

XXIX.n.

Le Pape Felix écrivit à l'Empereur Zenon touchant cette perfecution d'Afrique; & ce fut apparemment ce qui excita l'Empereur à envoier à Carthage fon Embaffadeur Uranius avec le peu de fuccès qui a été marqué. Mais Zenon luimême ne traitoit guere mieux les Catholiques, qui rejettoient fon pretendu édit d'union. "Depuis que le Pape eut envoié à C. P. les Evêques Vital & Mifene, & pendant qu'ils étoient encore en chemin, il reçut une lettre de Cyrille Abbé des Acemétes de C. P. qui fe plaignoit à luimême de ce qu'il agiffoit fi lentement avec Acace, après tant d'attentats contre la Foi Catholique. Le Pape Felix aiant reçu cette lettre, écri- Theophan. vit à ces legats, de ne rien faire qu'ils n'euffent an. 12. 13. vù l'Abbé Cyrille, & appris de lui comment ils Zen.p.113.

56.

14.

nom. Aiac.

Felix ep.

6. ad Ac.

devoient fe conduire : mais ils n'en eurent pas c. D. la liberté. Car étant arrivez à Abyde, ils y fu- Lib.brevs rent arrêtez par ordre de l'Empereur Zenon & . 18. Gefta de du Patriarche Acace, & on les mit en prifon après leur avoit ôté leurs papiers, de peur qu'ils in fi. ne rendiffent aux Catholiques de C. P. les lettres qu'ils avoient pour eux. Pendant cette prifon l'Empereur les menaça de mort, s'ils ne communiquoient avec Acace & avec Pierre Monge; enfuite il emploia les careffes, les presens & leş fermens. Les legats cederent enfin, & contre leur ordre promirent de communiquer avec Acace. Alors on les tira de prifon, ils vinrent à C.P. ils parurent en public avec Acace, rèconnurent

B 2

Pierre

Gelaf. ad epifc. Dard.

Ep. 13. p.

1201. 3.

; car le

Pierre Monge pour Evêque legitime d'Alexandrie, & communiquerent avec fes apocrifiaires. Après quoi on les renvoia en liberté. Il n'y avoit que les deux Evêques Vital & Misene troifiéme legat Felix défenfeur de l'Eglife Romaine, étoit demeuré malade en chemin ; & n'arriva à C. P. qu'après que Vital & Mifene furent fortis de prifon. On lui ôta auffi fes papiers, on le mit en une prifon très-rude; & comme il demeura ferme, Acace ne le voulut pas voir. Mais avant que les deux Evêques legats partif fent de C. P. les Catholiques de la ville firent trois Theoph. proteftations contre leur prevarication. Ils en atp. 114. B. tacherent une publiquement à l'habit des legats, Evag III. ils jetterent la feconde comme un livre; & mi

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20.21.

Lib, brev.

c. 18.

rent la troifiéme dans un panier d'herbes. Cyrille Abbé des Acemétes & d'autres Abbez de C. P. avec les Evêques Catholiques d'Egypte qui y étoient écrivirent au Pape Felix; & Cyrille envoia Simeon un de fes Moines porter les lettres à Rome. Il y arriva avant les legats, & inftruifit le Pape de leur prevarication ajoûtant qu'avant leur arrivée à C. P. on n'y recitoit qu'en cachette le nom de Pierre Monge dans les dyptiques, mais depuis on le recitoit publiquement. Ce qui fervoit aux Heretiques pour feduire plufieurs fimples, comme fi le fiege de Rome avoit reçu Pierre Monge.

Vital & Mifene arriverent enfuite à Rome chargez des lettres de l'Empereur & du Patriarche. Celles de l'Empereur accufoient Jean Talaïa de parjure; & difoient que Pierre Monge n'avoit pas été ordonné fans exámen, mais après avoir fouferit de fa main, qu'il recevoit le concile de Nicée, fuivi par celui de Calcedoine. Vous devez tenir pour certain, ajoûtoit-il, que nous recevors & honorons avec le faint Evêque Pierre & toutes les Eglifes, le faint Concile qui s'ac

corde

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