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Gouvernement, attiroit de tous côtés de nouveaux Citoyens dans Rome; Romulus en faifoit autant de foldats, & déja cet Etat commençoit à fe rendre redoutable à fes voifins. Il ne manquoit aux Romains que des femmes pour en affurer la durée ; Romulus envoya des Députés pour en demander aux Sabins & aux Nations voifines, & pour leur propofer de faire une étroite alliance avec Rome. Les Sabins occupoient cette contrée de l'Italie qui eft fituée entre le Tibre, le Teveron & les Appennins. Ils habitoient de petites Villes & différentes Bourgades, dont les unes étoient gouvernées par des Princes, & d'autres par de fimples Magiftrats, & en forme de République. Mais quoique leur Gouvernement particulier fût différent, ils s'étoient unis par une espece de ligue & de communauté qui ne formoit qu'un feul Etat de tous les Peuples de cette Nation. Ces Peuples étoient les plus belliqueux de l'Italie, & les plus voifins de Rome. Comme le nouvel établiffement de Romulus leur étoit devenu fufpect, ils rejetterent la propofition des Romains: quelques-uns Tome I,

Tit. Liv. 1. 1

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ajouterent la raillerie au refus, & ils demanderent à ces Envoyés, pourquoi leur Prince n'ouvroit pas un afyle en faveur des femmes fugitives, & des efclaves de ce fexe, comme il avoiɛ fait pour les hommes ; que ce feroit le moyen de former des mariages, où de part & d'autre on n'auroit rien à fe reprocher.

Romulus n'apprit qu'avec un vif reffentiment une réponse fi piquante; il réfolut de s'en venger, & d'enlever les filles de fes voifins. Il communiqua fon deffein aux Principaux du Sénat ; & comme la plupart avoient été élevés dans le brigandage, & dans la maxime d'emporter tout par la force, ils ne donnerent que des louanges à un projet proportionné à leur audace. Il ne D. H. I. 2. fut queftion que de choisir les moyens les plus propres pour le faire réuffir; Romulus n'en trouva point de meilleur que de célébrer à Rome des jeux folemnels en l'honneur de Neptune Chevalier. La Religion entroit toujours dans ces Fêtes, qui étoient précédées par des facrifices, & qui fe terminoient par des combats de Lutseurs, & par différentes fortes de

courfes à pied & à cheval.

Les Sabins les plus voifins de Rome ne manquerent pas d'y accourir au jour deftiné à cette folemnité comme Romulus l'avoit bien prévû. On y vit auffi un grand nombre de Ceniniens, de Cruftuminiens & d'Anteminates avec leurs femmes & leurs enfans. Les uns & les autres furent reçus par les Romains avec de grandes démonstrations de joie; chaque Citoyen fe chargea de fon hôte; & après les avoir bien régalés, on les conduifit, & on les plaça commodément dans l'endroit où fe faifoient les jeux. Mais pendant que ces étrangers étoient attachés à voir le fpectacle, les Romains par ordre de Romulus fe jetterent l'épée à la main dans cette affemblée; ils enleverent toutes les filles, & mirent hors de Rome les peres & meres qui réclamoient en vain l'hofpitalité violée. Leurs filles répandirent d'abord beaucoup de larmes, elles fouffrirent enfuite qu'on les confolât; le tems à la fin adoucit l'averfion qu'elles 'avoient pour leurs raviffeurs, dont elles firent depuis des époux légitimes. Cependant, l'enlevement de

ces filles causa une guerre qui dura plufieurs années. Les Céniniens furent les premiers qui firent éclater leur reffentiment. Ils entrerent en armes fur les terres des Romains. Romulus marcha auffi-tôt contre eux, les défit, tua leur Roi, ou leur Chef appellé Acron, prit leur Ville, & en emmena tous les habitans qu'il obligea de le fuivre à Rome, où il leur donna les mêmes droits & les mêmes priviléges qu'aux autres Citoyens. Ce Prince rentra dans Rome chargé des armes & des dépouilles de fon ennemi dont il s'étoit fait un efpece de trophée, & il les confacra à Jupiter Feretrien comme un monument de fa victoire origine de la cérémonie du triomphe

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chez les Romains. Les Antemnates & les Cruftuminiens n'eurent pas un fort plus favorable que les Céniniens. Ils furent vaincus; Antemnes & Cruftumenie furent prifes. Romulus ne les voulut point détruire; mais comme le Païs étoit gras & abonL'an 4. de dant, il y établit deux colonies qui lui fervoient de ce côté-là comme de gardes avancées contre les incurfions de fes autres ennemis. Tatius

Rome,

Roi des Cures dans le Païs de Sabins, prit à la vérité les armes le dernier; mais il n'en fut pas moins redoutable: il furprit par trahifon la Ville de Rome, & pénétra jufques dans la place. Il y eut un combat fanglant & très opiniâtre, fans qu'on en pût prévoir le fuccès, lorfque ces Sabines qui étoient devenues femmes des Romains, & dont la plûpart en avoient déja eu des enfans, fe jetterent au milieu des combattans, & par leurs prieres & leurs larmes fufpendirent l'animofité réciproque. On en vint à un accommodement; les deux Peuples firent la paix, & pour s'unir encore plus étroitement, la plûpart de ces Sabins qui ne vivoient qu'à la campagne, ou dans des Bourgades & de petites Villes, vinrent s'établir à Rome. Ainfi ceux

An. 7.de

qui le matin avoient conjuré la per te de cette Ville, en devinrent avant la fin du jour les Citoyens & les défenfeurs. Il est vrai qu'il en coûta d'abord à Romulus une partie de fa Rome, 747fouveraineté il fut obligé d'y affo- avant Jefuecier Tatius le Roi des Sabins, & cent des plus nobles de cette Nation, furent admis en même-tems dans le Sé

:

Christ,

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