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auroient pû nous tranfmettre cette connoiffance. L'hiftoire furtout est le dernier genre d'écrire qu'on fe foit avifé de cultiver. Les Grecs ont toujours difputé de leur antiquité avec les Barbares. Les uns & les autres foutiennent qu'ils font originaires du Pays qu'ils habitent, qu'ils ont appris les arts & les fciences aux autres hommes & qu'ils ont fait les premiers des actions dignes d'être écrites. Nous ne prendrons aucune part dans cette difpute, & nous ne voulons point décider quelles font les nations les plus anciennes, & encore moins de combien les unes font plus anciennes que les autres. Mais nous raporterons de fuite & en particulier ce qu'elles difent toutes de leur antiquité & de leur origine. Nous commencerons par les Barbares, non que nous les effimions plus anciens que. les Grecs, comme Ephore (1) l'a avancé ; mais afin qu'ayant fatisfait à cette partie de notre deffein nous n'interrompions pas l'hiftoire des Grecs quand nous y ferons une fois

(1) Ephore de Cumes difciple d'Ifocrate: c'est de lui qu'Ifocrate difoit qu'il avoit, befoin d'épe

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rons pendant qu'il fal loit une bride à Theopompe. Voyez Voffius de Hiftoris, Grac, 1. 1. 6. 7.

entrez : & comme on croit communément que les Dieux font nez en Egypte, que c'eft-là qu'on a d'abord obfervé le cours des aftres, & que cet heureux pays a produit le premier des héros & de grands hommes nous placerons ici les Egyptiens avant les autres peuples.

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V.

LES Egyptiens prétendent que le gen- Les EgyPre humain a commencé dans l'Egypte, tiens croyene & ils alléguent pour raison la fertili- avoir été les premiers té de leur terroir & les avantages que hommes. leur aporte le Nil. Ils difent que ce fleuve produit lui-même un grand nombre d'Animaux & toutes les ef péces de nourriture qui leur conviennent; la Racine de Rofeau, le Lotos, la Fêve d'Egypte, le fruit appellé Corfeon & plufieurs autres plantes ou fruits qui font propres aux hommes mêmes. Ils citent en particulier l'exemple des Rats que nous avons déja raporté & dont ils difent que tous ceux qui le voyent font étonnez: car on apperçoit quelquefois ces animaux préfentant hors de terre une moitié de leur corps déja formée & (1) vivan

(1) J'exprime ainfi le verbe exaene fauter, remuer, que Henry Etienne fubftitue dans les notes

à xaeigir qui eft dans le
texte, & qui ne fignife
rien.

te, pendant que l'aut. e retient encore la nature du limon où elle eft engagée. Il est démontré par-là, continuent-ils, que dès que les Elémens ont été développez, l'Egypte a produit les premiers hommes; puifqu'enfin dans la difpofition même où eft maintenant l'Univers, la terre d'Egypte eft la feule qui produife encore quelques animaux. De plus s'il eft échapé quelque être vivant du Déluge de Deucalion, c'est l'Egypte qui les a fauvez, puifqu'étant en partie fous l'afpect immédiat du Soleil, elle eft plus exempte des grandes pluyes que tout autre pays: fi au contraire ce déluge les a tous fait périr fans exception; on ne peut placer avec quelque vraifemblance les premiers effais du renouvellement de la nature que dans l'Egypte; car la chaleur de fon climat tempérée par les vapeurs froides & humides qui lui étoient apportées de tous les endroits de la Terre, devoit former un air très-propre à la génération des animaux, Nous voyons en effet, ajoûtent-ils, que dans les lieux les plus chauds de l'Egypte, ce font les dernieres eaux du Nil qui s'écou le qui contribuent le plus à cette pro

duction merveilleufe, dont nous avons parlé plus (1) haut, & qui ne se fait que quand la chaleur du Soleil s'infinue peu-à-peu dans une terre chargée d'humidité.

VI.

Opinions

fur la Lune;

noms des

leur a don

nez.

OR CES nouveaux hommes, contemplant la forme de l'univers & ad- Egyptiennes mirant son ordre & fa beauté, furent fur le Soleil, particuliérement faifis de vénération & fur les Elé à l'aspect du Soleil & de la Lune. Ils mens, & des regardérent ces deux Aftres comme Dieux qu'on deux divinitez principales & éternelles; & ils nommérent l'un Ofiris & l'au tre Isis, deux noms tirez de l'idée qu'ils en avoient prise. Ofiris fignifie qui a plufieurs yeux ; en effet l'on peut dire que les rayons du Soleil font autant 'yeux dont il regarde la Terre & la Mer. Le Poëte (2) femble avoir emprunté de-là cette expreffion:

L'Astre du jour qui voit & qui fçait toutes choses.

,

(1) Ici & en queiques lébre des poëtes & le autres endroits de la tra- plus ancien Auteur Grec duction,cette demi-phra- dont les ouvrages nous fe tient lieu d'une répéti- foient reftez. Le vers cité zion de l'Auteur où de ici eft de l'Odyffée. l. 12. fes copistes. Car Rhodo- v. 32. Voyez fur Homé man foupçonne de l'in-re, Fabricius, Bib. Greg. calation dans cette page du texte. (2) Homére le plus cé

1. 2. c. 1. & fuiv. Ce Poë-
te vivoit 900 ans avant
Jesus-Christ.

Quelques-uns des plus anciens Mythologiftes Grecs ont donné à Ofiris les furnoms de Dionyfius & de Sirius, d'où vient qu'Eumolpe (1) dans fes Bacchiques à dit

De l'ardent Sirius l'étoile étincelante.

& Orphée (2),

Bacchus nommé Phanès (3) de fa vive lumiére.

Quelques-uns donnent à Ofiris un habillement de peau de fan tacheté pour marquer la multitude des étoiles. Le mot Ifs fignifie ancienne & marque l'opinion que les Egyptiens avoient de l'éternité de cette Déeffe. Ils la representent avec des cornes par allufion à la figure que prend la Lune dans fa croiffance & dans fon décours; & parcequ'ils lui confacrent une geniffe. Ce font-là les Dieux qui felon eux gouvernent le monde, &

(1) Eumolpe fils de Mu- | par conféquent à Homéfée. Voyez fur Eumolpe re. Fabricius, Bib. Greg. l. 1. (2) Voyez, fur Orphée, 6.6.& fur Mulée, le mê-la bibliotheque Grecque me l. 1. c. 16. Ces Poëtes de Fabricius, chap. 18. & en y comprenant Orphée, fuiv. paffent pour antérieurs à la guerre de Troye &

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(;) Phanès fignifie qui

paroît.

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