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avancent le tombeau fuperbe qui eft dreffé à Ofiris dans cette Ifle, tombeau refpecté des Prêtres de toute l'Egypte, & remarquable par les trois cens foixante urnes qui l'environnent. Les Prêtres du lieu rempliffent chaque jour ces urnes de lait ; & fe rangeant à l'entour, ils font des lamentations & prononcent le nom de ces Dieux. Il n'eft permis qu'aux Prêtres d'entrer dans cette Ifle; & tous les peuples de la Thebaïde, qui font les plus anciens de l'Egypte, regardent comme inviolable le ferment qui fe fait en atteftant le tombeau d'Oliris aux rochers de Phyles. A l'égard de cette partie du corps d'Ofiris qu'Ifis ne put retrou ver; on dit que Typhon l'avoit jettée dans la mer, parce qu'aucun de fes complices n'avoit voulu s'en charger: qu'Ifis néanmoins en ayant fait faire une representation la fit honorer comme les autres ; & lui attribua même un culte & des facrifices particuliers de la part des Initiez. Delà vient que les Grecs qui ont emprunté des Egyptiens les myftéres & les orgies de Bacchus ont une Idole femblable qu'ils nomment Phallus, au fujet de laquelle leurs Initiez font de grandes

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XIII. Erreur des

cérémonies dans les fêtes de ce Dieu. ON prétend qu'il s'eft écoulé plus Grecs fur di- de dix mille ans depuis Ofiris & Ifis vers Heros jufques au regne d'Alexandre qui a qu'ils s'attri- bâti en Egypte la ville qui porte fon buent. nom: D'autres écrivent qu'il y en a

Egyptiens

près de vingt-trois mille. Au refte ceux qui croyent qu'Ofiris eft né à Thébes en Béotie, de Jupiter & de Semelé, font dans une erreur dont voici l'origine. Orphée étant allé en Egypte fut initié aux myftéres d'Ofris; & comme il étoit fort uni avec les defcendans de Cadmus fondateur de Thébes en Boeotie, il réfolut pour leur faire plaifir de tranfporter en cette ville de la Gréce, tout l'honneur de la naiffance de ce Dieu. Le peuple qui n'approfondit rien & qui d'ailleurs étoit ravi de cette acquifition, prêta volontiers l'oreille au difcours d'Orphée, & reçut avec plaifir toutes les cérémonies inftituées au nom d'O

firis. Cependant Orphée fonda fa fuppofition fur l'événement que je vais dire. Cadmus qui étoit véritablement originaire de Thebes en Egypte, eut entr'autres enfans une fille nommée Semelé: celle-ci ayant été abusée depuis l'établiffement de Cadmus er

Gréce, conçut un fils dont elle accoucha au bout de fept mois, & qui avoit une parfaite reffemblance avec Ofiris, de la manière dont on le repréfentoit alors dans fes images. Cet enfant mourut bien-tôt foit en punition de fa naissance illégitime, foit par le défaut naturel de fa naiffance prématurée. Cadmus fur la réponse d'un Oracle fit dorer fon corps embaumé, lui fit offrir des facrifices, & publia qu'Ofiris avoit voulu encore une fois apparoître aux hommes fous cette forme. Il attribua cette renaiffance à Jupiter pour rendre fon idole plus augufte & pour fauver en même tems Phonneur de fa fille. (1) Orphée trèsconfidéré dans la Thebes grecque dont il étoit devenu Citoyen, adopta cette fable & lui donna un très-grand crédit par la beauté de fes vers, & par la réputation qu'il avoit d'être profond dans toutes les matiéres de Religion. Les fecrets de la Théologie Egyptienne qu'il avoit pénétrez lui four

(1) Je fupprime ici une demi phrafe qui n'eft qu'une répétition inutile, comme un grand nombre d'autres, plures fexcentes que Rhodoman croit

avoir été inférées dans le texte, & dont il feroit affez inutile

d'avertir toujours dans une tra duάion françoise.

nirent toutes les couleurs dont il eut befoin pour faire passer cette nouveauté qui d'ailleurs fattoit les Grecs : & dans les Mystéres qu'il inftitua on ne manquoit point de dire à tous ceux qui s'y faifoient initier, que Bacchus étoit fils de Jupiter & de Sé'melé fans parler même de la renais fance, & malgré la différence prodigieufe des temps. Cette opinion s'est gliffée enfuite dans les livres des Mythologiftes; & les Poctes qui l'ont fuivie dans leurs piéces de Théatre en ont rempli l'efprit des peuples. Au fond, on a toujours accufé les Grecs de s'attribuer l'origine d'un affez grand nombre de Dieux, de Héros, & de Colonies qui ne viennent point de chez eux. Hercule, par exemple, qui a laiffé par toute la terre des traces de fon courage & qui a planté dans l'Afrique ces fameufes colonnes, par où eft-ce que les Grecs peuvent fe l'appropier? Tout le monde dit qu'Hercule défendit les Dieux dans la Guerre des Géans ; or le tems des Géans ne convient point à l'époque de l'Hercule Grec qui vivoit peu avant la guerre de Troye, il n'y a pas douze cens ans ; au lieu que les Géans

n'ont

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n'ont paru que dans les commencemens du monde tems éloigné de nous, felon les Egyptiens de plus de dix mille ans. La Maffue & la peau de Lion, qu'on a toujours données à Hercule font une preuve de fon antiquité, & font voir qu'il combattoit dans un tems où les armes offenfives & défensives n'étant pas encore inventées; les hommes n'alloient à la guerre qu'avec des bâtons & n'étoient couverts que de peaux de bêtes. Les Egyptiens croient Hercule fils de Jupiter, mais ils ne connoiffent point fa Mere; ce n'eft que dix mille ans après lui qu'un fils d'Alcmene, nommé Alcée à fa naissance, prit dans la fuite le nom d'Hercule. Ce nom ne fut point donné à Alcée pour marquer felon la force du mot Hercule qu'il avoit tiré beaucoup de gloire de la haine de Junon; ainsi que l'interpréte (1) Matris: mais comme étant devenu grand, il choifit un genre de vie affez femblable à celui de l'ancien Hercule, les Grecs ont transferé à celui-ci le nom & la gloire du

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(1) Matris n'eft allégué | viens pas qu'aucun Au

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dans Suidas que comme teur ait parlé de celui-ci un nom d'homme en en particulier.

général ; & je ne me fou

Tome I,

C

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