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avoit faite contre luy, les Auditeurs charmez applaudiffoient. Que feroit-ce donc (s'écria-t-il ) fi vous euffiez entendu cette bête féroce ellemême ? Cependant Efchine, felon Demofthene, avoit la déclamation très-véhémente; & ce même Efchine avoüoit que Demofthene avoit infiniment mieux prononcé que luy. Où tendent tous ces raifonnements? A vous obliger d'entendre Iféus, quand ce ne feroit que pour dire que vous l'avez entendu. Adieu.

LETTRE IV.

A Calvine.

I votre pere avoit laiffé plu

S'1

fieurs créanciers, ou même un feul à qui il dût plus qu'à moy, vous auriez raifon de délibérer fi vous accepteriez une fucceffion onéreuse, je ne dis pas à une femme feulement, je dis même à un homme. Mais vous avez fatisfait tous les autres créanciers plus fâcheux, ou plus vigilants que moy. Les égards que demandoit notre alliance m'ont retenu. Je fuis refté feul & le dernier. J'ay contribué cent mille fefterces * pour votre dot, outre la fomme què votre pere promit en quelque façon fur mon bien (car c'étoit moy proprement qui la devois payer). Ainsi

* Environ dix mille livres de notre monnoye,

ma conduite paffée vous répond de moy. Vous pouvez hardiment épargner à votre pere, la honte de n'avoir point d'héritier. Mais pour donner à mes avis toute la vertu que les effets donnent aux paroles, je vous envoye une quittance générale de tout ce que me doit la fucceffion. N'appréhendez point qu'une telle donation me foir à charge; qu'elle ne vous faffe point de peine. Il eft vray, j'ay un bien médiocre ; mon rang exide la dépenfe; & mon revenu, par la nature de mes terres, eft auffi cafuel que modique. Ce qui me manque de ce côté-là, je le retrouve dans la frugalité, la fource la plus affûrée de mes libéralitez. Je fçay bien pourtant, qu'il ne faut pas y puifer jufqu'à la tarir; mais je garde cette précaution pour d'autres que vous. Je fuis fûr qu'avec une amie de votre carac

ge

tere, à quelque excès que je porte mes bienfaits, la raifon les juftifie ra toûjours. Adieu.

JE

LETTRE V.

A Lupercus.

E vous envoye une pièce que vous m'avez demandée plus d'une fois, & que je vous ay fouvent promise. Vous n'en recevrez pourtant aujourd'huy qu'une partie : l'autre eft encore fous la lime. Cependant j'ay crû que je ne ferois pas mal de mettre fous la vôtre ce qui me paroiffoit déja de plus achevé. Lifez, je vous prie, avec la même application que j'ay compofé. Il n'eft encore forti de mes mains rien qui ait dû m'intéreffer davantage. On n'avoit à juger dans mes autres difcours, que de

mon zéle & de ma fidélité à remplir mon miniftere: icy l'on jugera de l'amour que j'ay pour la Patrie. Je ne pouvois manquer d'être long, emporté par le plaisir d'en relever jufqu'aux moindres avantages, de la juftifier des plus petits reproches, & de mettre fa gloire dans tout fon jour. Coupez pourtant; taillez à votre gré. Car toutes les fois que je fais réflexion fur le dégoût, & fur la délicateffe de nos Lecteurs, je conçois qu'il est trèsprudent de donner à un livre jufqu'au mérite du petit volume. Cependant je ne m'abandonne pas fi fort à votre févérité, que je ne luy demande quartier pour les jeux d'efprit qui ont pû m'échapper. Il faut bien donner quelque chofe au goût des jeunes gens, fur tout lorfque le fujet n'y répugne pas. Dans ces fortes d'ouvrages, il eft permis de prêter aux defcriptions

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