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tournée en habitude; fi tant eft que telle pareffe puiffe être réveillée.Je ne me fuis pas cependant fi fort entêté de l'austérité de mes modéles, que je ne me fois quelquefois amufé à cueillir des fleurs à la façon de Ciceron, quand j'en ay vû qui ne m'éloignoient pas trop de mon chemin. Je fouhaitois d'avoir de la force; mais je ne voulois pas manquer de grace. Vous croyez que par-là je demande quartier à votre critique: au contraire, pour vous faire voir que je ne cherche qu'à l'irriter davantage, fçachez que nos amis & moy, nous nous fommes à tel point infatuez de cet Ouvrage, que nous ferons la folie de le publier, pour peu que vous l'approuviez. Il faut bien mettre au jour quelque chofe; & fi cela eft, donnons la préférence à ce qui eft tout fait. Vous reconnoiffez-là votre pareffeux. Mais pourquoy fe

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faire Auteur, dites-vous ? Par plus d'une raifon. La plus importante, c'eft que nos Libraires nous jurent, que ceux de mes Ouvrages qui ont paru, font encore recherchez, quoyqu'ils ayent perdu la grace de la nouveauté. Peut-être les Libraires nous en font-ils accroire; mais puiffent-ils toûjours nous tromper, fileurs flatteries nous donnent plus de goût pour nos

études. Adieu.

Q

LETTRE III.
A Caninius.

UE fait-on à Côme, cette ville délicieuse, que nous aimons tant l'un & l'autre ? Cette belle maison que vous avez dans le faux-bourg eft-elle toûjours auffi riante? Čette galerie où l'on trouve toûjours le printems, n'at-elle rien perdu de ses charmes ?

Vos planes confervent-ils la fraicheur de leur ombrage? Le canal qui fe plie & replie en tant de façons différentes a-t-il toûjours fa bordure auffi verte, & fes eaux auffi pures ? Ne m'apprendrezvous rien de ce vafte baffin, qui femble fait exprès pour les recevoir? Quelles nouvelles de cette longue allée, dont le terrain est ferme fans être rude? de ce bain délicieux où le grand foleil donne à toutes les heures du jour? En quel état font ces falles où vous tenez table ouverte, & celles qui ne font destinées qu'à vos amis particuliers? Nos apartements de jour & de nuit; ces lieux charmants, vous poffedent-ils tour à tour? Ou le foin de faire valoir vos revenus, vous met-il à l'ordinaire dans un mouvement continuel? Vous êtes le plus heureux des hommes, fi vous joüiffez de tant

de biens; mais vous n'êtes qu'un homme vulgaire, fi vous n'en joüiffez pas. Que ne renvoyezvous ces baffes occupations à des gens qui en foient plus dignes que vous ? & qu'attendez-vous pour vous donner tout entier à l'étude des belles Lettres dans ce paisible féjour? C'est la feule occupation, c'eft la feule oifiveté honnête pour vous. Rapportez là votre travail, votre repos, vos veilles, votre fommeil même. Travaillez à vous affurer une forte de bien, que le temps ne puiffe vous ôter. Tous les autres dans la fuite des fieclès changeront mille & mille fois de maître; mais les ouvrages de votre efprit ne cefferont jamais d'être à vous. Je fçay à qui je parle. Je connois la grandeur de votre courage, l'étendue de votre genie. Tâchez feulement d'avoir meilleure opinion de vous;

faites-vous juftice, & les autres vous la feront. Adieu.

JE

LETTRE IV.

A Pompeïa.

E n'ay plus befoin de vos Lettres pour connoître les commoditez & l'agréable abondance qu'offrent vos maisons d'Otricoli, d'Arfuli, de Peroufe, & de Narni où l'on trouve un bain fi commode. La feule Lettre que je vous écrivis il y a déja quelque temps, quoique fort courte, fuffit pour faire voir que j'en fuis parfaitement inftruit. Mais ce qui m'en plaît davantage, c'eft d'y éprouver que mon bien n'eft pas plus à moy que le vôtre. J'y vois pourtant une différence; vos gens me fervent mieux chez vous, que les miens ne me fervent chez moy:

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