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N°. III.

LA tête de femme que préfente ce monument eft également inconnue ; mais gravée fur la plus parfaite fardoine, la plus haute en couleur, & en même temps la plus transparente. Il étoit jufte qu'un auffi fçavant Artiste employât une des belles matiéres de la nature. C'eft auffi ce que les Anciens, & fur-tout les Grecs, ont cherché autant qu'il leur a été poffible. Le travail de cette belle tête est flou & précis. C'étoit un fragment quand je l'ai trouvée, & j'ai été affez heureux pour conferver dans une forme auffi complette cette preuve fi claire du grand talent des Grecs.

N.. IV.

CE camée eft encore du plus beau travail Grec; & jamais on n'a représenté dans un fi petit espace rien d'auffi grand & d'auffi recommandable par la difpofition des maffes, & la précision du trait. Il y a trois lits différens, & c'eft une agathe-onyx de trois couleurs. Le premier lit fait le fond: le fecond qui eft blanc, exprime les chairs: le troifiéme qui eft couleur de fardoine, fert à colorer le voile ou coëffure, & la drapperie qui paffe fur l'épaule de la figure. Ce qui produit un effet charmant. L'art, felon moi, ne peut aller plus loin; mais malheureusement ce petit chef-d'œuvre, qu'il faut mettre au rang des têtes inconnues, eft caffé. Cependant il l'eft de façon que la caffure fe trouve entre le vifage & la coëffure, & qu'il eft affez difficile de s'en appercevoir.

PLANCHE LIII.

CETTE Planche destinée à renfermer des fragmens eft un hommage que je rends non-feulement à l'Antiquité, mais principalement au mérite des Artiftes Grecs qui ont produit des ouvrages dont les plus petites parties doivent

être confervées. Ils peuvent feuls nourrir le goût, entretenir l'émulation & échauffer le génie; car il n'est pas douteux que l'imitation des Artistes Grecs ne foit auffi utile aux Artistes modernes, que celle des Auteurs de la même nation l'eft aux Ecrivains de toutes les autres, en leur fourniffant des modéles accomplis en chaque genre de littérature. Je voudrois que mon exemple pût engager à conferver tous les fragmens que l'on pourra recueillir, & que l'on achève fouvent de détruire, parce qu'on ne les

croit bons à rien.

N. I.

On voit ici une tête de marbre blanc, dont la hauteur eft de neuf pouces. Elle eft affez mal confervée; car il n'en refte précisément que le masque, encore eft-il mutilé en beaucoup d'endroits: mais on y remarque une grande maniére, & le travail en est si large, que je n'ai pû me refuser le plaifir de le rapporter. Il représente un jeune homme, & peut-être un de ces enfans vainqueurs dans les jeux de la Gréce. Paufanias fait mention de plufieurs monumens élevés en leur honneur.

N°. II.

CETTE partie de pied droit, grande comme nature, eft de marbre blanc, & conftamment d'un travail Grec. Je crois même que ce morceau n'a jamais été plus étendu que le deffein le fait voir; & je fuis très-perfuadé qu'il a été employé dans ces ftatues qui n'avoient que la tête, les mains, & l'extrémité des pieds de marbre, le refte étant de bois, de bronze, ou de marbre de différentes couleurs. Paufanias en rapporte plufieurs exemples. Il dit même dans le voyage de l'Elide, que les Graces font représentées L. 6. ch. 24. en bois avec des habits dorés, le vifage, les pieds, & les mains de marbre blanc. Il dit encore dans celui de Corinthe que la ftatue de Minerve eft de bois, à la réserve du Ch. Iv.

vifage, des mains & du bout des pieds, qui font de marbre blanc. Je comprends que l'on peut m'objecter que ce pied peut avoir été fcié & mis après coup dans l'état où nous le voyons; & l'on ajoûtera que s'il avoit été employé à cet ufage, on y verroit des trous pour placer des tenons. Je répondrai que ce pied devant pofer à plat, comme son trait le démontre, n'avoit aucun besoin de ces fecours; & que le maftic dont on diftingue encore des traces, pouvoit être fuffifant pour le retenir. Je ne crois pas qu'il y ait de réplique; & j'ai faifi avec plaifir l'occafion qui s'eft préfentée de parler de ces ftatues Grecques faites de différentes matiéres. J'ajoûterai même à ce sujet que les Anciens avoient encore dans leurs statues des bigarrures plus étranges, & auxquelles nous aurions de la peine à nous accoûLiv. 1. lett. 6. tumer. Cicéron dans une lettre à fon ami Atticus, le prie de lui envoyer des Mercures de marbre Pentélicien, dont la tête fût de bronze. Ce marbre tiré du mont Pentélicus dans l'Attique, étoit de cinq couleurs. Je doute qu'un pareil affortiment pût produire un bon effet à nos yeux. Mais je ne fuis pas furpris que les Romains s'en foient contentés. Ils avoient encore bien peu de connoiffances L. 1. lett. 8. dans les Arts. Le même Auteur prie Atticus de lui envoyer de Gréce des figures moulées qu'il pût faire appliquer dans le plafond de fon vestibule ; & dans une autre lettre il lui demande des ftatues de Mégare. Il eft vraisemblable qu'il y avoit dans cette ville de Gréce une espéce de manufacture compofée d'ouvriers communs, comparables, en quelque façon, à ceux qui font établis aujourd'hui à Gènes, & dont les ouvrages n'ont prefque d'autre mérite que celui de la matiére. Auffi tout le monde convient que les Arts ne commencérent à paroître dans Rome avec une forte d'éclat, que plufieurs années après le temps dont je parle, c'est-à-dire, fous le regne d'Augufte, où l'on trouva plus court & plus commode d'attirer les Artistes, que de faire venir les ouvrages. Mais afin d'entendre ce

Meffen.c.XXX.

que veut dire Cicéron quand il demande à fon ami, nonfeulement des Mercures en général, mais encore des Mercures - Hercules, il faut fçavoir que les Athéniens Pauf. Voyage de furent les premiers qui donnérent aux gaînes des ftatues une forme quarrée; & comme ils commencérent par celles de Mercure, on continua de donner le nom d'Hermes aux statues terminées en gaînes. Ainfi le Mercure-Hercule dont parle Cicéron n'étoit qu'un Hercule en gaîne. Je n'ai rapporté ce paffage de Paufanias que pour expliquer le fens de celui de Cicéron; car je fuis bien éloigné de croire, comme on a pû le voir jufqu'ici, que les Athéniens aient été les inventeurs de ces gaînes, qu'ils avoient certainement empruntées des Egyptiens. On remarquera encore que Paufanias nous apprend que les Grecs faifoient fouvent des figures de bronze ou de marbre dont la tête fe détachoit du corps, quoique l'une & l'autre fuffent de même matiére : & nous voyons qu'à Rome au lieu de brifer les statues des Empereurs qui méritoient cette efpéce de punition, on fe contentoit d'ôter leurs têtes, & de mettre fur les anciens corps celles des nouveaux Empereurs. Cette conduite nous donne une raison de la quantité de bustes qui nous font parvenus.

No. III.

CET autre fragment eft celui d'un camée, exécuté fur une agathe dont le fond eft clair, transparent, & prenant bien la feuille. L'ouvrage eft affez confervé pour faire regretter ce qui y manque, & en même temps affez détruit pour difpenfer d'en donner l'explication. Il paroît cependant que la figure eft Vénus Marine ou Vénus fortant de l'eau. Ön voit clairement qu'elle avoit devant elle un autel & une colomne, qui fans doute étoient ornés d'attributs qui, s'ils fubfiftoient, ferviroient à déterminer plus fûrement le fujet dont la figure eft correcte & bien travaillée.

Pline, liv.xxxv. c.xxII. Lamprid. in Commod. p. 52,

C.II. Suet. liv. IV.

N. IV.

CE fragment d'agathe-onyx préfente fur un fond noir un relief dont la couche blanche a jauni, & a été altérée par le feu auquel cette pierre s'eft trouvée fans doute exposée. Le fujet n'a jamais été compofé que d'un gryphon. Ses jambes font enlacées par un ferpent dont il est attaqué. J'ai vû de camées d'un auffi beau travail, ni d'un peu meilleur goût. On lit au bas MIAIOY en caractères trèsfins & gravés en creux. Je craindrois que le nom de ce Graveur ne fût pas entier; cependant la difpofition de l'espace où les lettres fe trouvent placées me perfuade qu'il ne peut manquer au plus que la premiére lettre du nom. De quelque façon qu'on regarde ce nom, il me paroît que le Graveur Grec n'eft pas encore connu. C'est ce qui m'a engagé à l'envoyer à M. Stoch avec le deffein. Je ferai charmé de contribuer à la feconde partie qu'il va nous donner de fon Recueil, & d'augmenter le nombre des pierres où l'on trouve les noms des Artistes; mais je ferai plus fatisfait encore d'avoir le sentiment d'un fi grand connoiffeur. L'allégorie du gryphon & du ferpent que cette pierre nous préfente me paroît fi difficile à expliquer, que je ne puis me réfoudre à l'entreprendre.

PLANCHE LIV.

LES quatre morceaux représentés fur cette Planche ont également rapport à la Comédie Grecque & à la Romaine. C'eft pourquoi je n'ai pas pû les féparer, ni les mettre dans des claffes différentes. On va juger des raifons qui m'ont engagé à prendre ce parti.

N°. I.

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