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Museum Etrufcum. Le travail & la forme en font tout-à-fait Planche 27 femblables. M. Gori lui donne le nom de Junon. Mais celle que le même Auteur appelle Dea Volumna ou Volturna, & qu'il regarde comme une Divinité propre des Etrufques, eft encore plus reffemblante à celle-ci. Rien ne s'oppose au fentiment de M. Gori: mais il n'en apporte aucune preuve. Au refte ce n'est point du tout parce que le petit monument que je préfente a les yeux ouverts, que je vais attaquer ce que dit cet Antiquaire par rapport aux yeux fermés de celui qu'il nous a donné : il prétend qu'il fut impoffible à Dédale de furmonter les différentes difficultés qu'il trouvoit dans le mouvement & l'expreffion des figures; & que l'ouverture des yeux fut une des chofes qu'il évita le plus foigneufement, par l'impoffibilité où il étoit de l'exécuter. Je n'admettrai jamais cette conjecture, parce que chaque pays a fon Dédale, & que celui des Grecs a peu influé fur les Etrufques. Je conviens que les Grecs ont tellement furpaffé les autres peuples, que leurs rares talens ont enlevé tous les fuffrages, & qu'ils ont perfuadé tout ce qu'ils ont voulu dire d'eux-mêmes. Mais cette fupériorité n'éblouit pas les critiques qui ont du difcernement. L'homme étant naturellement porté à l'imitation, & les yeux étant l'objet dont il eft le plus frappé, à caufe de leur expreffion, & qu'ils font les miroirs de l'ame, les Sculpteurs fe font toûjours appliqués à les traiter. Ils les ont fouvent mal rendus : mais ils ont conftamment fait des efforts pour les repréfenter. Sans parler des caiffes de mumies, fur lefquelles il femble qu'ils devoient être fermés, & où néanmoins ils font toûjours ouverts; les plus mauvais deffeins des Sauvages de l'Amérique nous les représentent comme ils les voient le plus ordinairement, c'eft-à-dire, ouverts. Indépendamment de ces exemples tirés de l'expérience, les hommes fe fuivent & fe reffemblent dans les premiers pas de leurs découvertes; & ce que nous connoiffons de l'histoire du

monde nous met à portée de juger des progrès que l'efprit a fait dans les Arts, dont quelques-uns ont été perdus plus d'une fois, & retrouvés de la même façon qu'ils avoient été inventés.

No. II.

CETTE figure de bronze dont la hauteur eft de quatre pouces neuf lignes, n'est pas à beaucoup près d'une antiquité fi reculée que la précédente. Le travail en eft trèsbon, & la fonte admirable. La coëffure, la drapperie, & l'ornement dont elle est bordée méritent une attention particuliére. Plus on en apporte à l'examen des figures Etrufques, & plus on y remarque de différences fenfibles par rapport au temps où elles ont été faites; ce qui prouve l'amour, le génie & l'aptitude de cette Nation pour les Arts. Mais de quelque façon que l'on regarde les progrès des Etrufques dans les Arts, cette figure paroîtra toûjours admirable, foit le détail de fon deffein, foit pour l'exécution de la fonte & du cifelet. Elle eft rapportée fous deux afpects au même numéro.

pour

No. III.

CETTE pierre gravée fur une agathe noire, traverfée dans fon milieu par une raie blanche, qui en terme de l'Art fe nomme une agathe barrée, eft une preuve que les Etrufques n'ignoroient aucune des opérations des Arts. La gravûre en creux entraîne avec elle une infinité de connoiffances & de pratiques difficiles. Cet homme nud qui tient un tronçon de corps auquel les deux bras font encore attachés, eft un de ces fujets que l'on doit fe contenter de décrire. Cette image eft peut-être celle d'un fupplice.

PLANCHE XXIX.

N. I.

Ce petit vafe de terre cuite a cinq pouces de hauteur jufqu'à la partie la plus élevée de fon anfe, & fa largeur eft de deux pouces deux lignes. Les figures dont il eft orné font exactement rapportées & développées fous le même N°. La principale figure eft à genoux, & femble offrir à une Divinité inconnue les prémices des fruits de la terre. Elle a derriére elle un âne qu'elle tient par le licol. Il n'eft pas facile de dire quel eft le peuple à qui nous devons ce vase. Si d'un côté le goût du deffein, la forme bizarre de la Divinité, & la reffemblance parfaite du fujet qui y eft traité avec celui que l'on trouve fur un monument Egyptien, publié par le P. de Montfaucon, concourent à faire mettre ce vafe au nombre des antiquités Egyp- P. 11. Pl. 139. tiennes: d'un autre côté le travail de la terre femble devoir

Antiq. exp. t. 2.

le faire attribuer aux Etrufques. Auffi M. Gori, en rappor- Muf.Eruf pl.161. tant un vase où l'on voit à-peu-près la même composition, 'n'a pas craint de le regarder comme un monument de cette Nation, & d'en conclure qu'elle avoit emprunté des Egyptiens l'art de travailler & d'orner les ouvrages de terre. Quelqu'ingénieufe que foit cette conjecture, je doute que les Egyptiens aient connu la pratique dont le fçavant Italien leur fait honneur. Il eft du moins certain que tous leurs vases font d'une feule couleur. Je croirois donc que le vase gravé dans cette Planche, & celui de M. Gori ont été faits en Etrurie; & qu'étant destinés à être portés en Egypte, on avoit eu foin de les décorer de représentations qui étoient du goût des Egyptiens. J'établirois volontiers fur cette conjecture la réputation des manufactures des Etrufques, & le commerce qu'ils faifoient en Egypte; mais je paffe à un objet plus intéressant: & je vais décrire, autant qu'il me fera poffible, la nature

relevées

par une

du travail que le vafe nous préfente. Pour le concevoir, il faut obferver d'abord que le fond eft noir, que les figures font rouges, & que ces deux couleurs font également couleur blanche. La terre de tous les ouvrages Etrufques paroît avoir été choisie avec foin. C'est une argille pure & fine, dont on a féparé par le lavage le fable & les parties groffiéres. On ne peut douter que ces terres n'aient été formées fur le tour ou fur la roue; & cette opération, ainsi que la préparation des matiéres, a été précisément la même que celle de nos travaux en fayence & en porcelaine. J'ai remarqué deux fortes de terres dans leurs différens ouvrages. L'une blanche, & l'autre noire. Il eft vrai que cette derniére ne fe trouve pas employée auffi fréquemment que la premiére. Plus on examine ces ouvrages, & plus on voit qu'ils ont été réparés avec le plus grand foin avant que d'être mis au feu. Ces morceaux ainfi préparés ont été cuits très-légérement, pour faire ce que nous nommons le biscuit, fur lequel on met enfuite la couverte ou l'émail. Si l'on appliquoit cette couverte fur les morceaux avant que de les cuire, elle pénétreroit la terre, ou plûtôt elle s'incorporeroit dans fes pores, & il feroit très-difficile de la bien enlever, comme la chose étoit nécessaire dans la pratique des plus beaux ouvrages de ce pays. Cette couverte placée en tout autre temps auroit empêché d'exécuter avec une auffi grande délicateffe d'outil, les deffeins dont ces ouvrages font ornés. La terre étant cuite eft moins inégale & plus denfe, & la couverte ne s'attache que médiocrement lorsqu'elle n'a reçû qu'un feu léger; alors il eft aifé de l'enlever, ou plûtôt de la découper, fans qu'elle laisse la trace la plus légère. Cette couverte étoit faite avec une terre bolaire très-martiale, la même que celle que nous employons dans notre fayence, connue fous le nom de manganèze, ou maganefia vitriariorum. Cette terre prend auffi dans la cuite une couleur rouge très-foncée, mais qu'il eft facile

de rendre noire avec la moindre mixtion de couleur ou d'autres terres. Cette matiére a dû être préparée & broyée parfaitement, pour la mettre en état de s'étendre & de couler au pinceau, comme les émaux. Mais avant que de mettre cette couverte noire, les Etrufques avoient foin de tremper leurs ouvrages, ou de leur donner une couleur rougeâtre, mais claire & fort approchante de celle de notre terre cuite. Ils prenoient cette précaution, pour corriger la teinte naturelle & blanchâtre de leur terre, qui ne produifoit pas l'effet qu'ils aimoient à voir dans leurs plus beaux ouvrages. L'examen de plufieurs morceaux Etrufques fuffira pour faire fentir ces différences, & connoître à fond les détails. Les terres fe trouvant ainsi préparées, voici l'opération la plus effentielle pour la façon de les orner. Quand la couverte noire ou rouge étoit féche, le Peintre, ou plûtôt le Deffinateur devoit néceffairement calquer ou poncer fon deffein; &, felon l'ufage de ce temps, il n'a pû fe fervir, pour y parvenir, que de lames de cuivre très-minces, fufceptibles de tous les contours, & découpées comme l'on fait aujourd'hui ces mêmes lames, pour imprimer les lettres & les ornemens. Il prenoit enfuite un outil fort tranchant, avec lequel il étoit maître de faire ce qu'on appelle de réferve les traits les plus déliés; car il emportoit & ôtoit la couverte noire fur tout ce qui devoit être clair : & je ne puis comparer cette manœuvre qu'à celle de notre gravûre en bois. Alors la couleur rouge fe diftinguoit, & faifoit voir fort nettement les figures, les ornemens, & tout ce qu'on avoit entrepris de représenter. La seule inspection de la plus grande partie de ces terres démontre ces fortes d'opérations. Enfin ces ouvrages étant parvenus à ce point, on leur donnoit la feconde cuite un peu plus forte que la premiére.

Je ne crois pas devoir terminer l'examen de ces ouvrages, fans y ajoûter quelques réflexions générales. Ils ne font pas tous fabriqués avec le même foin; on en trouve

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