Imágenes de páginas
PDF
EPUB

graces que Dieu leur avoit faites, & comment AN. 830% il leur avoit ouvert la porte, pour la converfion des payens. L'empereur en fut ravi, & fongea comment il pourroit établir un fiege épifcopal à cette frontiere de fon empire, pour faciliter & affermir ces converfions. Alors quelques-uns de fes fideles ferviteurs lui reprefenterent, que l'empereur Charles fon pere, ayant dompté la fup. XLVI Saxe & y fondant des évêchez, avoit refervé 2.28. l'extremité de la province au Nord de l'Elbe, pour y établir dans la fuite un fiege archiepifcopal, d'où l'on pût étendre la foi chez les payens. Charlemagne y fit confacrer une églife par un évêque de Gaule; & y mit un prêtre nommé Heridac, indépendant des évêques voifins: il vouloit même le faire ordonner évêque, mais la mort le prévint.

L'empereur Louis fon fucceffeur, fans faire affez d'attention à ce deffein, à la follicitation de quelques perfonnes, partagea cette province d'outre l'Elbe entre les deux évêques voifins, Villeric de Brême & Heligaud de Verden. Mais alors connoiffant l'intention de fon pere, & voyant le progrès de la foi chez les Danois & les Suedois du confentement des évêques & d'un concile nombreux, il établit à Hambourg un fiege archiepifcopal, à qui feroit foûmife toute l'églife desNortalbinges: c'eft-à-dire, des peuples qui étoient au Nort de l'Elbe, & tout le refte des pais feptentrionaux, pour y envoyer des évêques & des prêtres. Il fit donc confacrer folemnellement Anfcaire archevêque, par les mains de Drogon évêque de Mets, en prefence de trois archevêques, Ebbon de Reims, Hetti de Treves, Orgar de Mayence, & de plufieurs autres évêques, même de ceux de Verden & de Bremen, qui prirent part à cette confecration, pour preuve de leur confentement.

[ocr errors]

Chint an.

8301

AN. 830. C'étoit l'an 830. & faint Anfcaire étoit âgé de trente ans. Drogon étoit frere de l'empereur Louis, fils de Charlemagne, & d'une de fes dernieres femmes, il étoit évêque de Mets depuis l'an 826. & lorfqu'il facra faint Anfcaire, il étoit archichapellain du palais, & en cette qualité précedoit les archevêques. Comme le nouveau diocefe de Hambourg étoit petit, & expofé aux courfes des barbares, l'empereur y unit un monaftere de Gaule, nommé Tur. holt, à prefent en Flandre; & pour affurer da vantage l'érection du fiege de Hambourg, il envoya S. Anfcaire à Rome avec deux évêques & un comte, demander la confirmation du pape Gregoire.

Sup. XLV.

2 50.

vit. s. Anf.

11.

Ebbon archevêque de Reims n'abandonnoit la miffion de Danemarc, qu'il avoit compas mencée, & il fe fit nommer à Rome légat des païs feptentrionaux avec Anfcaire. Enfuite conferant enfemble de cette legation, ils jugerent neceffaire qu'il y eut un évêque, qui refidât en Suede. Ainfi du confentement de l'empereur, Ebbon choifit un de fes parens nommé Gaufbert, qu'il fit ordonner évêque: lui donnant abondamment, tant du fien, que de la liberalité de l'empereur, tout ce qui étoit neceffaire pour le fervice de l'églife; & l'envoya comme fon vicaire en Suede, pour exercer la legation qu'il avoit reçûe du faint fiege. Ebbon lui fit donner par l'empereur le monaftere que lui-meme avoit fondé à Vedel, comme un lieu de rafraîchiffement. Gausbert fut nommé Simon à fon ordination, à l'exemple de quelques autres évêques, comme S. Villibrod & S. Boniface; & étant arrivé en Suede, il fut reçû avec honneur par le roi & par le peuple, & commença à bâ tir une églife & à prêcher publiquement l'évan

[ocr errors]

gile, enforte que le nombre des fideles croiffoit de jour en jour.

En Orient l'empereur Michel le Begue étoit mort le premier d'Octobre 829. indiction huitiéme, aprés avoir regné huit ans & neuf mois. Son fils Theophile lui fucceda, & regna douze ans. Il témoigna d'abord un grand zele pour la juftice, & même pour la religion: mais il fe déclara bien-tôt plus ouvertement que fon pere contre les faintes images. Car il ne défendit pas feulement de les honorer, mais d'en faire & d'en garder. On effaça donc encore une fois les peintures des églifes, pour y reprefenter des bêtes & des oifeaux, on brûla publiquement quantité d'images: les prifons furent remplies de catholiques, de peintres, de moines, d'évêques. L'empereur en vouloit particulierement aux moines, Il leur défendit d'entrer dans les villes, ni de paroître à la campagne: enforte que ne pouvant avoir les chofes neceffaires à la vie, plufieurs moururent de faim & de mifere : d'autres quitterent leur habit pour fortir, fans toutefois abandonner leur profeffion: d'autres enfin tomberent dans un entier relâchement. Ainfi les monafteres devinrent les cimerieres des moines qui y demeuroient morts, ou des logemens des feculiers. Cependant il y avoit dans tous les villages des receveurs pour charger d'impofitions ceux qui ne renonçoientpas aux faintes images.

Toutefois l'empereur Theophile ne put y faire renoncer Theodora fa femme, ni Theoctifta fa belle mere. Il avoit cinq filles, que leur ayeule appelloit fouvent chez elle : leur faifoit de petits prefens, & les prenant en particulier, les exhortoit à refifter courageufement à l'herefie de leur pere, & honorer toûjours les faintes images. En difant cela elle prenoit les fiennes, qu'elle

[blocks in formation]

,

qu'elle gardoit dans un coffre : les portoit à fon vifage, & les baifoit. L'empereur demanda un jour à fes filles ce que leur grand'mere leur avoit donné, & quelles careffes elle leur avoit faites. La plus jeune nommée Pulcherie raconta tout nomma les fruits dont elle les avoit rega lées, puis ajoûta: Elle a dans fon coffre quantité de poupées, qu'elle met fur fa tête & les baife. L'empereur comprit bien ce que c'étoit, & en fut fort irrité: mais il n'ofa le témoigner, par le refpect qu'il portoit à fa belle-mere, & la crainte de fes reproches. Car elle lui parloit avec liberté, le reprenoit publiquement de la perfecution qu'il faifoit aux catholiques : & étoit prefque la feule qui osât lui dire combien il étoit har de tout le monde. Il fe contenta donc d'empêcher que fes filles n'allaffent fi souvent, chez elle.

les

Il avoit un petit homme ridicule, nommé Denderis, qui le divertiffoit par fes folies. Etant entré dans la chambre de l'imperatrice Theodora, il la trouva qui baifoit les faintes images, & les portoit à les yeux par devotion. Il lui demanda ce que c'étoit, & s'approcha pour voir. Ce font, dit-elle, mes belles poupées Auffi-tôt Denderis alla trouver l'empereur, qui étoit à table, & qui lui demanda d'où il venoit. Il dit qu'il venoit de chez fa maman, car il nommoit ainfi l'imperatrice, & qu'il l'avoit vûë tirer de belles poupées de derriere fon chevet. L'empereur l'entendit; & fi-tôt qu'il fut forti de table, il alla chez l'imperatrice fort en cole te lui dit beaucoup d'injures, l'appella idolatre, & lui rapporta le difcours de fon fou. Seigneur, dit elle, ce n'eft pas ce que vous pensez: c'eft que je me regardois à mon miroir avec mes femmes, & il a vû dedans nos images, Elle appaifa ainfi l'empereur ; & fit enfuite bien

L'

foüet

fouetter Denderis, pour lui apprendre à ne plus parler des belles poupées.

Il fe trouva des catholiques qui refifterent courageufement à l'empereur pour la défense 1bid. n. 11, des faintes images, entre autres les moines du monaftere de S. Abraham. Ils lui montroient par les peres, comme faint Denis, S. Hierothée, S. Irenée, que la vie monaftique n'eft pas une invention nouvelle: & pour prouver que les images étoient reçûës dès le tems des apôtres, ils rapportoient le portrait de la fainte Vierge, fait par faint Luc, & l'image miraculeufe de Jefus-Chrift, qu'il avoit lui-même imprimée fur un linge: car ces faits n'étoient pas conteftez alors. L'empereur irrité de leur liberté, les chaffa de C. P. aprés leur avoir fait fouffrir plufieurs tourmens. Ils fe retirerent près le Pont Euxin, & y moururent deş coups de fouet qu'ils avoient reçûs.Leurs corps demeurerent long-tems fans fepulture: mais ils fe conferverent, & depuis on les honora comme des reliques des martyrs.

L'empereur Theophile perfecutoit fur tout.13. les peintres qui faifoient les images. Il attaqua V.Boll 12, donc un moine nommé Lazare, qui étoit alors Febr. to. Si celebre en cet art; ne l'ayant pû gagner par ca- P. 392. reffe, ni par menaces, il le fit déchirer de coups de foüet enforte que la chair tomboit avec le fang, & que l'on ne croyoit pas qu'il en pût guerir. Toutefois s'étant un peu remis dans la prifon, il recommença à peindre des faints : ce que l'empereur ayant appris, il lui fit brûler le dedans des mains, avec des lames de fer rouges; & on le laiffa demi-mort. Enfin à la priere de l'imperatrice, & d'autres perfonnes de crédit, il fortit de prifon, & fe retira à l'églife de faint Jean Phoberos, où il fe cacha. Là, nonob fant fes playes, il peignit une image de faint

Jean ?

« AnteriorContinuar »