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penfoit & diffimulé le refte: Il y a encore, dit AN. 837% l'empereur, une chofe que vous cachez. Car on dit que ce prodige fignifie un changement de regne & la mort d'un prince. L'aftronome lui cita ce pallage du prophete qui dit: Ne crai- ferem x. 2. gnez point les fignes du ciel, qui épouvantent les gentils. L'empereur répondit: Nous ne devous craindre que nôtre créateur, qui a fait auffi ce: aftre: mais nous ne pouvons affez admirer la bonté, de nous avertir par de tels fignes, pour nous exciter à penitence, malgré nôtre lâcheté. Après avoir fait retirer tout le monde, il paffa la nuit en prieres fans dormir, & le matin il appella fes officiers, & ordonna de diftribuer le plus qu'il fe pourroit d'aumônes aux pauvres, aux moines & aux chanoines: & fit celebrer des meffes, par autant de prêtres qu'il put, craignant moins pour lui que pour Féglife, dont il avoit la protection. Une autre comete parut le premier Janvier de l'année fuivante 838. dans le figne du fcorpion, & l'on crut qu'elle avoit annoncée la mort du roi Pepin qui fuivit de prés.

LVIII.

Mort de

Celle de l'empereur Louis fut encore précedée d'une grande éclypfe de foleil, que le même l'empereur aftronome ne manqua pas d'observer, comme Louis. en étant un prefage. Louis roi de Baviere avoit Aftron pris les armes, indigné d'un nouveau partage, que l'empereur fon pere avoir fait à fon préjudice, en faveur de fes freres Lothaire & Charles. L'empereur l'ayant appris, partit de Poitiers, où il avoit paffé l'hiver, & fe mit en marche pendant le carême de l'année 840. C'étoit contre la coûtume: car il paffoit ordinairement ce faint tems à chanter des pleaumes,prier, affifter à la meffe, diftribuer des aumônes, & l'employoit ordinairement en œuvres de pieté ; enforte qu'à peine prenoit-il un jour ou deux,

Pour

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AN. 840. Pour monter à cheval & faire un peu d'exer cice. Alors, quoique déja vieux, & malade d'une fluxion fur la poitrine, il fe fit un devoir de marcher contre le roi Louis fon fils. I cele bra la fête de pâques à Aix-la-Chapelle avec fa devotion ordinaire puis ayant paflé le Rhin, & appris que fon fils s'étoit retiré, il indiqua un parlement à Vormes, & manda à Lothaire de s'y trouver. Alors arriva cette terrible éclipfe, le troifiéme jour des Rogations, c'eft-àdire le cinquième de Mai, veille de l'afcenfion L'empereur ayant entierement perdu l'appetit & les forces, fut obligé de camper en une ifle prés de Mayence, & fe mettre au lit. Il étois fenfiblement affligé de l'état de l'églife, & des troubles qu'il prevoyoit entre fes enfans: done toutefois la foibleffe pour Judith & pour Charles étoit la principale caufe. Un grand nombre d'évêques & d'autres ecclefiaftiques étoient auprés de lui pour le confoler, entre autres Hetti archevêque de Treves, Otgar de Mayence, Drogon frere de l'empereur, évêque de Mets & archichapelain. Comme c'étoit en lui qu'il fe confioit le plus, il fe confessoit à lui tous les jours, & recevoit tous les jours le corps de nôtre-Seigneur. Ce fut la feule nourriture qu'il prit pendant quarante jours, & il difoit : Vous êtes jufte, Seigneur, de me faire à prefent jeuner malgré moi, puifque j'ai paflé le carême fans jeûner.

Il dit à fon frere Drogon d'appeller les officiers de fa chambre, & fit faire un inventaire de tous les meubles qu'il portoit avec lui: couronnes & autres ornemens royaux, armes & vaiffelle, livres & habits facerdotaux ; puis il en ordonna la distribution aux églises, aux pauvres & à fes deux fils Lothaire & Charles. Il envoya à Lothaire une couronne, une épée & un feep

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tre, qu'il lui donnoit, à la charge d'être toujours AN. 340, uni à Charles & à la mere Judith, & de conferver au jeune frere la portion du royaume qui lui avoit été donnée. Aprés quoi empereur Louis rendit graces à Dieu de ce qu'il ne lui reftoit plus rien dont il put difpofer. Cependant Drogon, de l'avis des autres évêques, lui demanda, s'il ne vouloit pas pardonner à fon fils Louis. L'empereur témoigna d'abord l'amertume de fon cœur, puis il délibera, & ramaffant le peu qu'il lui reftoit de forces, il commença à raconter les mauvais traitemens qu'il prétendoit en avoir reçûs. Enfin il ajoûta: Puifqu'il ne peut venir pour fatisfaire à fon devoir, je fais ce qui dépend de moi; & je prends Dieu à témoin & vous auffi, que je lui pardonne toutes les offenfes qu'il m'a faites. C'eft à vous à l'avertir de ne le pas oublier. fe

Enfuite, comme c'étoit le famedi au foir, il fit chanter devant lui l'office nocturne du dimanche, & mettre fur la poitrine du bois de la vraye croix. Il en fit le figne fur fon front tant qu'il eut affez de force; quand il étoit las; il prioit Drogon par figne de le faire, Il passa ainfi la nuit, & le lendemain il fit préparer un autel, où Drogon celebra la messe & le communia. Puis l'empereur le pria & les autres affiftans de prendre un peu de repos.Quand il fentit approcher la fin, il rappella Drogon qui fut fuivi des autres évêques. L'empereur leur fit entendre comme il put, qu'il fe recommandoit à eux, & demanda les prieres des agonifans. Pendant qu'on les faifoit il tourna les yeux à gauche avec indignation en difant de toute la force: Houts, houts, qui fignifioient en Tudefque: Dehors, dehors. On crut qu'il voyoit le malin efprit; & auffi-tôt il leva les yeux au ciel avec de grands fignes de joye. Il

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AN: 840. mourut ainfi le vingtiéme de Juin 840. la foixante-quatrième année de fon âge, la vingtfeptiéme de fon regne comme empereur. Son corps fut tranfporté à Mets & enterré avec grande folemnité dans l'églife de S. Arnoul près d'Hildegarde fa mere.

LIX.

Portrait de

Louis.

Theg. c.19.

C. 20.

Ce prince étoit de taille mediocre, les yeux grands, le nez long, les épaules larges, les bras forts: enforte que perfonne ne manioit mieux un arc ou une lance. Il avoit la voix masle, parloit le latin comme fa langue natu 1elle, & entendoit le Grec. Il avoit appris en fa jeuneffe des poëfies payennes, mais depuis il ne vouloit niles lire ; ni les entendre. Au contraire il étoit fort inftruit de l'écriture fainte, & favoit le fens fpirituel, le moral & l'anago. gique. Tous les matins il alloit à l'églife, fe mettre à genoux touchant le pavé de fon front, & demeuroit longtems en prieres, quelquefois avec larmes. Tous les jours il donnoit l'aumône avant fon repas, & partout où il étoit, il y avoit des logemens pour les pauvres. Il étoit fobre dans le boire & le manger. Jamais on ne le vit éclater de rire: & dans les fêtes folemnelles, où les muficiens & les bouffons jouoient pour divertir le peuple, il contenoit les autres par fon ferieux. Il s'habilloit modeftement, excepté les grandes fêtes, où à l'exemple de fes peres il étoit tout couvert d'or, portant la couronne en tête & le fceptre à la inain. II étoit très-liberal, & donna en proprieté à des particuliers quantité de terres de fon domaine. Il ne faifoit rien fans confeil: mais il donnoit tant de tems au chant des pleaumes & à la lecture, qu'il abandonnoit trop les affaires à fes confidens. Il entretint la mauvaise coûtume déja établie, de faire évêques des gens de condition fervile: qui ne manquoient pas d'affran

franchir leurs parens, & les élever ou par les AN. 840. lettres ou par les alliances avec les nobles. Tel fut ce prince que l'on compte pour le premier roi de France du nom de Louis, & fa facilité à pardonner lui a fait donner le furnom de Débonnaire.

Il y avoit quelque tems qu'il avoit permis à Agobard de Lyon & à Bernard de Vienne de rentrer dans leurs fieges: & cette année en partant d'Aquitaine il y laiffa Agobard, pour prendre foin des affaires de ce royaume; mais il mourut à Saintes le fixiéme de Juin. Son églife de Lyon l'honore fous le nom de S. Agebaud; & puifqu'il étoit rentré fi avant dans les bonnes graces de l'empereur Louis, on doit croire qu'il avoit expié la faute d'avoir pris part à la revolte: auffi lui étoit-elle commune avec l'abbé Vala & d'autres faints perfonnages, & l'extrême foibleffe de Louis la rendoit plus excufable.

LX.

Mort d'A

gobard.

Outre les écrits dont j'ai parlé, Agobard nous en a laiffé plufieurs, dont ceux qui font contre Amalarius paroiffent les derniers. Amalarius accufoit l'églife de Lyon, d'avoir intro, duit quelque nouveauté dans le chant ecclefiaftique: Agobard entreprit fa défense dans un traité intitulé: De la divine pfalmodie; puis il attaqua l'ouvrage d'Amalarius par un autre écrit intitulé: De la correction de l'antipho nier, prétendant y trouver des erreurs, & même des herefies. Enfin il fit un troifiéme écrit ouvertement contre Amalarius, où il reprend plufieurs endroits de fon traité des offices ccclefiaftiques, Mais cette critique n'a pas em péché la pofterité d'eftimer les ouvrages d'Amalarius; & en effet on voit de la part d'Agobard bien de l'aigreur & de la préoccupation, Son fucceffeur dans l'églife de Lyon, fur Amo

Ado. Chr.

S. Ben.tom. Bibl. Lab.p.293. Boll

om.

P748.6. Fun.

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