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lation. Colombelle pourfuit fa route, arrive à Jérufalem, eft reçue en triomphe par fon bien-aimé. Il l'époufe, lui donne la couronne de gloire & reçoit d'elle un chapelet.

Ce roman est tout myftique; mais les fréquens écarts de Volontairette, & le contraste que produit fon caractère jettent dans cet ouvrage une forte de gaieté & d'intérêt qui ne fe rencontrent pas toujours dans les fictions de pur agrément.

On attribue encore l'origine de nos contes de fées, au roman de Finette ou l'Adroite Princeffe. Nous avons cherché ce roman, dont l'indication n'eft pas équivoque, mais nous n'avons pu le trouver, on n'a certainement point voulu parler de celui de Perrault, que des bibliographes conteftent à cet auteur, par la raifon qu'il n'eft point dans les premières éditions, & qu'il a été inféré dans celle qu'on a donnée à la Haye. Cependant on y lit une efpèce de dédicace de Perrault à la comteffe de Murat.

Nous penfons, en effet, que c'est à Perrault que nous devons la renaiffance des contes des fées; c'eft à la charmante fiction de l'aurore & du petit jour qu'il faut fixer la véritable fortune de ce genre. Quant à

fa moralité, la fin de l'épître de Perrault'à madame de Murat, raffure les lecteurs,

Mais ces fables plaîront jufqu'aux plus grands efprits,
Si vous voulez, belle comteffe,

Par vos heureux talens, orner de tels récits.
L'antique Gaule vous en preffe ;

Daignez donc mettre dans leurs jours

Les contes ingénus, quoique remplis d'adreffe,
Qu'ont inventés les Troubadours:

Le fens mystérieux que leur tour enveloppe,
Égale bien celui d'Éfope.

Et Perrault avoit raison.

IL nous refte à parler de l'occafion qui mit à la mode les contes des fées.

La révocation de l'édit de Nantes avoit glacé toutes les plumes, par la crainte de déplaire au roi, qui avoit nommé des cenfeurs royaux, fubftitués aux docteurs de Sorbonne, lefquels avoient remplacé les inquifiteurs de la foi. On n'ofoit plus rien écrire; & fi Louis XIV n'eût aimé passionnément le théâtre, peut-être Racine fe feroitil borné à embraffer le genre fatyrique, ou à écrire le panégyrique de fon rok. Depuis que madame de Maintenon avoit paffé de la

qualité de gouvernante des enfans de madame de Montefpan, à une condition certai nement bien élevée, la cour avoit pris un ton qui étoit propre à une femme pieuse qui étoit entourée de princes légitimés, encore jeunes, auxquels de bons exemples étoient néceffaires. L'établiffement de faint Cyr fembloit appeler toutes les vertus, & affurer un afyle à la jeune innocence, afyle néceffaire pour arracher aux calviniftes des demoifelles fans fortune. Louis XIV étoit pieux, l'âge, les malheurs publics, le caractère de fa liaison avec madame de Maintenon le ramenoit au pied des autels & à la fociété privée. On fait à quels religieux devoirs il confacroit les vendredis & les famedis, les femaines de paffion & les jours de la semaine fainte. Il s'occupoit alors exclusivement du foin de donner de bons pasteurs aux églises, & la faveur n'y influoit point. Avant de nommer un évêque, il alloit implorer pendant le faint facrifice de la meffe, les lumières du faint efprit qui ne lui manquoient pas fouvent. On fait combien il aimoit fes petits muficiens, & les petits concerts établis dans fes appartemens. Ses enfans légitimés trouvoient des diftractions analogues

à leur âge, fans que madame de Maintenon qui les aimoit tant, eût rien à réprouver. Les fuccès du duc du Maine viennent à l'appui de ce que nous donnons à entendre fur la bonne éducation que madame de Main tenon avoit donnée aux princes. Les inftituteurs des princes du fang, parmi lesquels on nomme Boffuet & Fénelon; le mérite éminent de ces deux hommes justement célèbres avoient répandu la fainte morale, en la couvrant de fleurs, & la revêtiffant de formes aimables, car Fénelon avoit fait des fables. Auffi avec quel empreffement on multiplioit les bons livres à l'usage des princes! Quelle bibliothèque choifie on imprimoit pour eux! Il fembloit que la nation vouloit épurer la galanterie au creufet d'une morale enfantine & fage. Le galimathias de Scarron étoit rejeté, le temple n'étoit point encore élevé, le duc d'Orléans n'exiftoit à peine que pour lui, & pas encore pour la guerre, pour les arts, pour les plaifirs, & pour l'intrigue.

La cour s'agitoit cependant, car elle n'eft jamais plus intrigante que quand on ne va plus, & qu'on fe tient en place; auffi ceux qui connoiffent le règne de Louis XIV,

depuis 1694, font inftruits de toutes les agitations politiques qui fermentoient dans la cour, & que l'exceffive prudence du roi appaifoit, ou déroboit à tous les yeux. Le tableau de ces cabales fut dévoilé, & le libelle intitulé l'Ombre de Scarron en dit affez & même trop, l'exil ne fuffifoit pas pour fermer toutes les bouches.

Dans le même temps vivoit une quantité de femmes qui cultivoient les lettres avec fuccès, d'autres les aimoient, écrivoient & se faifoient une réputation, en prenant un vol moins haut. Parmi cette dernière claffe plufieurs étoient illuftres par la naissance, & jouiffoient d'une grande fortune, étoient aimables & jolies; leur porte étoit ouverte aux Muses.

Les femmes de qualité ne couroient point. On les trouvoit chez elles. Elles caufoient & converfoient effentiellement. Les plus galantes ne fe prenoient qu'à la converfation: elles étoient généralement inftruites; il y avoit un ton de dignité qui n'eft pas fi déplacé qu'on le penfe. Les coteries étoient réellement des coteries. On fe bornoit. Le nombre de fes amis n'augmentoit ni ne décroiffoit. On vieilliffoit ensemble, chaque

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