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un afyle dans les Gaules, où elles furent maintenues par l'établissement du Chriftianifme.

Les Gaulois étoient un peuple né pour les beaux Arts & pour les Sciences. Formés de bonne heure en fociété, ils eurent des Loix, & fe gouvernèrent fuivant les lumières d'une faine raifon. Leur population nombreuse permettoit aux efprits ardens & inquiets de courir les hazards, d'aller fignaler leur valeur & conquérir des États dans les belles contrées de l'Europe & de l'Afie. Mais le Corps de la Nation, fidèle à la Patrie, s'exerçoit à l'Agriculture & au Commerce, fans étouffer fes heureufes difpofitions pour les Lettres & les hautes connoiffances. La Poéfie, cultivée chez toutes les Nations de l'Univers, avant tous les autres Arts fut également chez les Gaulois le premier Art qu'ils cultivèrent. Les Bardes étoient les Sayans de la Nation; ils étoient à la fois Poëtes & Muficiens. Ils mettoient en mufique

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mufique leurs vers, qu'ils chantoient foutenus de l'harmonie d'une espèce de lyre dont ils accompagnoient leurs chants. Ils ne célébroient pas toujours les vertus la vaillance & les hauts faits des grands Perfonnages ou des Particuliers; ils fe fervoient auffi quelquefois de leur art, pour reprendre leurs vices & en faire la fatire. On avoit pour eux le plus grand refpect, & fur-tout en temps de guerre. Leur feule présence, au milieu de deux armées prêtes à combattre, faifoit, comme par enchantement, pofer bas les armes des deux côtés, & terminoit la querelle. On ne livroit point de batailles, qu'ils ne vinffent fe mettre à la tête de l'armée & là, par leurs cris & leurs chanfons pleines d'injures & d'imprécations contre l'ennemi, qui les redoutoit & n'ofoit commencer l'attaque qu'ils ne fuffent retirés, ils excitoient l'ardeur & enflammoient le courage des Soldats. Indépendamment des Bardes, les Gau

lois avoient encore des Devins; mais par un aveuglement funefte, attaché à l'Idolâtrie,& par une effroyable cruauté, c'étoit dans les entrailles palpitantes des victimes humaines qu'ils égorgeoient, que ces Devins interrogeoient l'avenir.

Une autre Secte de Savans, la plus puiffante & la plus révérée parmi les Gaulois étoient les Druïdes. Comme dépofitaires de la Religion, ils jouiffoient du pouvoir fuprême. Leur Do&trine remonte à une haute antiquité, puisqu'ils enfeignoient l'Immortalité de l'Ame; vérité forte, fublime confolante que les anciens Patriarches avoient con facrée ; mais prefque univerfellement oubliée, chez les Peuples enveloppés des ténèbres du Paganifme.

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L'inftruction de la Jeuneffe étoit confiée aux Druïdes ; & c'étoit au fond des bois & dans des antres écartés qu'ils tenoient leurs Écoles, & donnoient, fuivant l'antique ufage, leurs leçons de vive voix & en vers, à leurs Élèves,

qu'ils formoient ainfi aux Sciences, fans jamais rien écrire. Le Sexe avoit auffi fes Ecoles féparées, préfidées & tenues par les femmes des Druïdes, qui fe mêloient de sciences, comme les hommes. Mais elles fe bornoient aux Augures & à la Magie, comme plus analogues à leur foibleffe, & plus propres à entretenir, à fatisfaire & à nourrir leur curiofité naturelle.

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L'arrivée d'une Colonie de Phocéens, fortie de l'Ionie, & qui vint aborder près de l'embouchure du Rhône, changea bientôt toute la face des Gaules. Ces étrangers, charmés de la beauté du lieu, de fon heureufe & agréable fituation des commodités & des avantages qu'elle offroit au Commerce, ne tardèrent pas à s'y fixer. Ils bâtirent la ville de Marseille, & jetèrent les fondemens d'une République gouvernée par les plus fages loix. Ils ouvrirent des Écoles publiques, & établirent une Académie, qui devint, prefque

dès fa naissance, rivale de celle d'Athènes. Quel heureux événement pour les Gaulois, avides de favoir & de s'instruire! Ils courent auffi-tôt en foule à ces nouvelles Écoles: les Druïdes, qui faifoient mystère de leurs connoiffances, font encore plus ardens à acquérir celles qu'ils n'ont pas : ils fortent de leurs antres, abandonnent leurs bois, & vont à Marseille puifer le goût des Lettres, & s'éclairer des lumières réunies de la Grèce & de l'Afie. Leurs progrès les égalent bientôt à leurs Maîtres : ils établiffent des Écoles, qui deviennent, en peu de temps, auffi renommées que

celles de Marseille.

La guerre que les Gaulois eurent à foutenir contre les Romains, ne ralentit point leur paffion & leur ardeur pour l'étude. Subjugués enfin par la force, ils eurent la gloire, à leur tour, de fubjuguer leurs Vainqueurs par de plus douces armes, celles de l'Eloquence & des Lettres. Rome, jaloufe de con

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