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tion du Luxe, en renfermant chaque individu dans fon état, par de fages Loix. Loin de faire retentir fans ceffe, aux oreilles des Peuples, ce cri turbulent & inquiet d'ÉGALITÉ, de LIBERTÉ; elle leur dit: vous êtes nés fous l'empire des Loix, vous avez des Maîtres, la Patrie vous porte dans son fein: foyez foumis aux Loix, obéiffez à vos Maîtres, foyez fujets fidèles, aimez votre Patrie, & fongez que la Religion, l'honneur, votre intérêt perfonnel font des chaînes facrées qui vous lient à l'État, & que les rompre eft un crime. C'est ainfi que dans Télémaque la Sageffe parle, inftruit, éclaire. Cet admirable ouvrage offre par-tout la morale la plus faine & la plus pure: par-tout il inspire l'amour de l'humanité, fans affectation, fans élans concertés; on n'y trouve point cette féchereffe rebutante des productions glaciales de nos prétendus Philofophes; en lifant Télémaque, on lit, on defcend dans le cœur de Fénelon: on y voit

fon ame tout entière à découvert; elle est embrâfée de ce feu divin, que la charité seule allume. Voilà le lien (1)

(1) L'Esprit du Chriftianisme eft auffi éloigné de la Tolérance, que de l'Intolérance; la Religion chrétienne combat l'erreur avec force & fermeté; mais traite celui qui s'eft égaré avec indulgence & douceur, & cherche à le ramener par la Charité. Cette vertu, toute célefte n'eft point connue fans doute des Philofophes, puisqu'il lui ont fubftitué, la Bienfaisance, l'Humanité, la Tolé rance, vertus purement humaines; par conféquent fragiles, fujettes au caprice, dépendantes d'une fenfibilité phyfique, qu'un amour propre, qu'un orgueil fecret, voilés du bien que l'exemple peut opérer, fe plaisent à publier, à afficher, & dont la récompense n'eft que pour ce monde : vertus qui n'étouffent d'ailleurs ni les haines, ni les jaloufies, ni l'envie; qui ne commandent point le pardon des injures, ni d'aimer fes ennemiş. La CHARITÉ, au contraire, née dans le sein de Dieu, n'a pour témoin de fes œuvres que le Ciel; elle porte également tous les hommes dans fon cœur, fans aucune acception; les foulage dans le fecrets cache la main qui répand fes bienfaits; va chercher comme un Ange confolateur, ceux qui souffrent, prie fans ceffe pour eux, n'attend d'autres récompenfes que celles qui lui font promifes par fon divin Auteur. Il étoit réservé à la Philofophie de notre fiécle, d'aller chercher, dans le premier ordre des Miniftres de l'Églife, un Évêque pour Apôtre de la Tolérance; & quel Évêque encore! Fénelon à la vérité le plus doux des hommes ! Ce n'eft

qui l'attachoit à tous les hommes, & non cette Tolérance, dont on veut injustement aujourd'hui qu'il ait été l'Apôtre : Tolérance qui ne peut être pré-conisée, prêchée, foutenue, que par une froide & méprifante indifférence pour toutes les Religions, par les paffions que le frein le plus léger irrite,, & par un efprit d'orgueil qui veut tout foumettre à fes foibles lumières.

A la folidité des principes &.de l'inftruction, cet excellent ouvrage réunit encore tous les agrémens que le goût. peut defirer. L'imagination la plus brillante l'a femé de tableaux rians, agréables, intéreffans; la vérité en a peint les caractères; les fentimens y font l'ex-preffion de la Nature; la grandeur des

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pas fans deffein qu'elle ena ordonné l'éloge: elle avoit: fes raisons c'étoit pour en impofer fur fa douceur, & la convertir en Tolérance. Voyez fi, depuis qu'elle: s'eft avifée de faire louer tous ceux qui pouvoient fa vorifer fon fyftême, elle a ofé jufqu'à présent prendre BOSSUIT pour fujet d'Éloge académique?

événemens excite, augmente la curiofité, foutient l'attention; il enchante par la richeffe des détails; l'harmonie la plus pure y flatte toujours l'oreille; l'Art le plus ingénieux, le plus habile en a compofé l'ordonnance, en a conduit la marche; tout y eft animé, plein de vie en deux mots le Génie l'a dicté, les Grâces l'ont écrit. Quel mérite de plus ce Poëme auroit-il, s'il étoit en vers? Nous dirons même hardiment, malgré les clameurs qui pourront s'élever contre notre fentiment, que la France n'auroit point encore de Poëme épique, fans le Télémaque; & que la profe de Fénelon foutiendra plutôt, fans ennui, une lecture fuivie, que les vers de tel Poëme aujourd'hui fi vanté, comme le feul qui faffe honneur à la Nation. Au refte on n'a jamais douté que le Télémaque n'eût rendu le nom de Fénelon immortel, quand même il n'auroit pas eu d'autres titres pour y prétendre ; tandis qu'il est très - douteux que la

Henriade puiffe faire revivre le nom de fon Auteur dans la poftérité, qui l'a déja jugé, & l'a mis à fa place.

L'Eloquence a, comme la Mufique, fes tons, fes modes, fes caractères différens, qui dépendent abfolument de l'art avec lequel l'Orateur fait les faifir & les employer, pour produire de l'effet. Il est aifé de juger, à la manière dont il traite fon fujet, s'il eft homme de génie, ou fimplement homme d'efprit. L'efprit fuffit pour être éloquent: mais moins naturel, plus apprété, moins nerveux que le génie, l'efprit ne cherche qu'à plaire il n'aime à paroître qu'avec des fleurs : il ne choifit que des couleurs vives & légeres: pourvu que la fenfation qu'il fait foit agréable, il ne se tourmente point pour la rendre profonde il ne s'élève point avec la liberté, la majesté, la fierté du génie ; il étudie long-temps fon vol, & ne prend fon effor, qu'après l'avoir concerté : enfin

› pour accréditer l'idée qu'il veut

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