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fe rencontrer avec le marquis de Monferrat, qui l'avoit AN. 1530. voulu précéder.

L'empereur ayant ainfi reçu la couronne, baifa les pieds du pape, c'eft-à-dire, fa pantoufle, qui étoit rouge avec une croix blanche deffus. Enfuite fa fainteté & fa majesté impériale fe leverent, & fe mirent debout devant l'autel. Le pape embraffa l'empereur & lui donna le baiser de paix. Les deux cardinaux qui avoient fait la fonction de diacre & de foudiacre à la meffe, allerent auffi baiser la main de l'empereur qui les embraffa, & alla enfuite s'affeoir avec le pape fous un même dais, & fur des fiéges inégaux, celui de l'empereur étant plus bas d'un demi pied. A peine furent-ils tous deux affis, que le premier cardinal diacre se tourna vers le peuple, & dit à haute voix : Vive Charles-Quint, l'invincible & très-puissant empereur, & défenfeur de la foi. Le peuple lui répondit, en criant plufieurs fois Vive l'empereur. On fit une décharge générale de la moufqueterie, & l'on tira plus de cent coups de canon. Ce bruit, joint aux trompettes, aux tambours, aux fiffres, & au fon des cloches de toute la ville, dura plus d'une demie heure, & l'on fe difpofa pour la cavalcade, où le pape & l'empereur parurent montez fur deux chevaux d'Efpagne de même couleur, richement enharnachez. Charles V. fit préfent à la fainteté du cheval fur lequel il étoit monté, & le faint pere le donna à Alexandre de Medicis. La cavalcade finit par un fuperbe repas, où l'empereur qui étoit feul à fa table, but debout & découvert, à la fanté du pape. Le cardinal de Medicis, neveu de fa fainteté, remercia l'empereur, puis fe leva, & but debout & découvert à la fanté de l'empereur, le tout aw

:

AN. 1530.

II. Accident où

de fa

Vera hift. de

178.

bruit des tambours, des trompettes & de la musique, Sa majesté impériale avoit alors trente ans.

Deux jours après, un accident pensa changer cette l'empereur fête fi célébre en un deuil des plus lugubres; car l'emcourt vifque pereur paffant par une gallerie de fon palais pour aller D. Anton. de à l'églife, une poutre du plancher de cette gallerie Charles V. p. tomba prefque aux pieds de ce prince, & bleffa pluHeif bift. de fieurs perfonnes de fa fuite. Ceux qui font accoutumez Tempire,t. 1. p. à tirer des prognoftics de tout, prétendirent que cet événement fignifioit, que nul autre empereur ne feroit couronné en Italie, ce qui eft en effet arrivé, mais pour d'autres raisons que celle de la chûte de cette poutre.

410.411.

III.

L'empereur

rétablissement

des Medicis à

Guicciard, lib.

10.

Paul Jov. lib,

27,

Quoique l'empereur fût néceffaire en Allemagne donne ordre au pour la diéte qu'il avoit indiquée à Aufbourg, au huitiéme d'Avril, le pape le follicita fi vivement de Florence. demeurer encore quelque tems à Boulogne, qu'il y féjourna jufqu'au vingt-deuxième de Mars. L'inten tion du pape étoit que l'empereur ne se retirât point que ce prince n'eût tout difpofé pour rétablir abfolument la maifon des Medicis dans Florence. Charles, pour contenter le pape, fut donc obligé d'écrire à Philibert prince d'Orange, qui étoit alors viceroi de Naples, de fe rendre inceffamment en Toscane avec toutes les troupes de cavalerie & d'infanterie qui étoient dans cet état, pour affiéger Florence, & lui envoya en même-tems le brevet de généralissime de l'armée destinée à cette entreprise. Don Antonio de Leve eut ordre auffi de tirer de Lombardie, οι il commandoit, les meilleurs officiers & foldats, pour venir fervir fous le prince d'Orange. Ces ordres fu rent communiquez au pape, qui de son côté ordon

na auffi à tous les officiers de fon armée d'obéir au AN. 1530. même prince, & fit faire promptement toutes les provifions de guerre & de bouche néceffaires pour l'entretien de ces armées. Toutes ces mesures prifes, l'empereur voulut partir; mais le pape le pria encore de différer, jufqu'à ce qu'on eût commencé le fiége de Florence, ou du moins jufqu'à l'arrivée du prince d'Orange, tant fa paffion étoit grande pour le rétablissement de fa maison.

Les Florentins inftruits de tous ces mouvemens du pape & de l'empereur, virent bien que c'étoit contre eux qu'ils fe faifoient, & ne fçachant quel parti prendre, ils affemblerent le confeil un matin douziéme de Mars, pour examiner ce qu'ils devoient faire. Le grand gonfalonier y parla le premier sur les avantages de la liberté, & fur l'état de ceux qui vivoient fous le gouvernement defpotique d'un prince, fur le malheur qu'ils avoient d'être la victime des pernicieux deffeins d'un de leurs citoyens, qui au lieu de défendre la liberté de fa patrie, ne cherchoit qu'à l'opprimer & à la ruiner. Il conclut qu'il falloit donc prendre une bonne réfolution de fe défendre contre un tel ennemi, & de facrifier toutes choses plutôt que de l'avoir pour maître. D'autres opinerent de s'aller jetter aux pieds du pape & implorer fa clémence. Enfin à la pluralité des voix, il fut délibéré qu'il falloit fe

défendre.

IV.

fe défendre

Sur cette délibération, les Florentins leverent des Les Florentins troupes qu'on-joignit à celles qu'ils avoient déja, & font réfolus de qui faifoient ensemble une armée de douze mille hom- contre le pape mes de pied, & de quelque cavalerie, dont les hif. & l'empereurtoriens n'ont pas marqué le nombre. Ils en donne

rent le commandement à Malatesta Baglioné, un de AN. 1530. leurs citoyens, dont Eftienne Colonne fut lieute

nant général; mais ces troupes n'étoient pas assez nombreuses pour réfifter au prince d'Orange, dont l'armée étoit compofée de vingt mille hommes d'infanterie & dix mille chevaux, commandez par les meilleurs officiers du fiécle; outre les troupes de Milan, que lui amena le marquis du Guast, & l'armée du pape, forte de fix mille hommes de pied, & deux mille chevaux, fous la conduite du duc d'Urbin. La guerre commença donc assez vivement : le fiége se continua avec une opiniâtreté réciproque des affiégez & des affiégeans. Le prince d'Orange ayant appris que Malatefta devoit recevoir un fecours de deux mille hommes de pied, & huit cens chevaux, qu'on envoyoit de Pife, alla au-devant pour leur empêcher la jonction; & quoiqu'il n'eût pû arriver affez-tôt pour s'y opposer, il ne laiffa pas d'attaquer Malatesta; mais cette attaque lui coûta la vie, qu'il perdit par un coup de mousquet, dont il fut tué sur la place. Le marquis du Guaft prit auffi-tôt le commandement de l'armée, & Malatesta voyant qu'il ne lui étoit pas poffible de tenir plus long-tems la campagne, rassembla du mieux qu'il lui fut poffible le refte de les troupes, & fe retira dans Florence avec le peu de gens qui lui reftoient, la plûpart bleffez.

Les Florentins fe voyant pressez, & réduits à une famine extrême, firent venir dans leur grand conseil Malatesta, & Philippe Megliori pourvoyeur de l'armée, & après les avoir entendus, ils conclurent à la reddition de la place, & à la foumiffion, convaincus que leur obftination, qui devenoit inutile, ne

ferviroir

ferviroit qu'à expofer au reffentiment des vainqueurs AN. 1530. la vie & l'honneur de leurs femmes & de leurs filles, & leur ville même à être plus cruellement faccagée, que n'avoit été Rome. Ainfi Florence fut renduë composition le neuvième d'Août, après un siége assez long & opiniâtre.

V.

avec Ferdinand

de Gonzague.

après Guicciardin.

Sleidan.com.

VI.

Charles V. ayant reçu la nouvelle de cette reddition, jugea généreusement que les Florentins méris capitulent toient d'être traitez d'une maniere honnête, avoir témoigné tant de zéle pour la liberté de leur lib. 30. patrie. Il manda donc à Gonzague qu'il ne falloit lib. 7. p. 216′′ point exiger de ces peuples d'autres conditions que celle de rétablir la maifon de Medicis, & de reconnoître Alexandre de Medicis pour leur fouverain moyennant quoi, on devoit les laiffer dans la joüiffance de leurs priviléges, & ne rien changer dans la forme du gouvernement, pour ce qui concerne les magiftrats, charges, confeils, élections qui étoient en usage lorsque la république subsistoit. Alexandre fut donc reconnu prince & fouverain dans Flo. Alexandre de rence on lui fit le ferment de fidélité, on lui ac- connu fouvecorda le droit de recevoir & d'envoyer des ambaffa- rence. deurs, de battre monnoye, de conclurre des ligues, de Raynald, ad faire la paix ou la guerre, felon qu'il le jugeroit s convenable aux intérêts de l'état & aux fiens; on convint qu'un de ses fécretaires affifteroit toujours dans les confeils & assemblées des magistrats, mais fans y avoir voix, & que la confirmation de ceux qui feroient élûs pour le gouvernement, dépendroit du fouverain, de fucceffeur en fucceffeur à perpétui té, le droit de fief de l'empire étant toujours réservé à l'empereur. Telle eft l'origine de la grandeur Tome XXVII,

S

Medicis re

rain dans Flo

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