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dogmatifé sur la Trinité. Prenant de chacun ce qui AN. 1531. lui plaifoit, il ne vouloit reconnoître en Dieu qu'une perfonne, & blafphêmoit contre le nombre de trois que la foi reconnoît. Il profefla long-tems la medecine à Paris, & fit enfuite un voyage en Afrique pour avoir une plus parfaite connoillance de l'Alcoran. A fon retour il s'arrêta long-tems en France & en Allemagne, publiant par tout les erreurs, foutenant celles des Anabaptiftes, enseignant comme eux que le baptême des enfans étoit uniquement fondé fur l'autorité particuliere des papes, & rejettant entierement tout magiftrat. Quant à l'euchariftie, il difoit avec les Sacramentaires, qu'elle n'étoit qu'un figne feulement. Son impieté parut encore davantage contre la Trinité: il foutenoit que ce n'étoit qu'une vraie fiction, un monftre, ou un cerbere à tres têtes; que le Pere feul étoit Dieu à l'exclufion du Fils & du Saint-Esprit; que Dieu, dans sa substance contenoit des parties, qui l'accompagnoient par tout où elle eft, enforte que Dieu eft pierre dans une pierre, arbre dans un arbre. Il enfeignoit que le fils de Dieu n'étoit point la feconde perfonne de la Trinité, mais l'homme Chrift, & que cette perfonne avoit été faite avec l'homme; que le faint Efprit n'étoit point fimplement Dieu, mais quelque chofe de l'effence de Dieu, & un petit vent feulement, qui n'avoit commencé qu'à la création du monde; que Dieu n'avoit jamais été adoré durant la loi, mais feulement les Anges, qui le représentoient; qu'ils avoient été dès le commencement, mais qu'ils avoient eu besoin d'être renouvellez, lorfque leur chef fut fait Christ : que l'esprit & l'ame de l'homme étoient

la fubftance de Dieu; que ceux qui étoient regene- AN.
rez recevoient une autre ame, differente de celle
qu'ils avoient auparavant, qui contenoit la divinité;
que perfonne n'étoit damné pour le péché originel,
parce que le ferpent s'étant feulement emparé du
corps, l'ame eft demeurée libre, & ne peut pecher
avant qu'on ait atteint l'âge de vingt ans ; que les
hommes pouvoient être justifiez & sauvez fans la
connoiffance du Chrift; qu'enfin les Turcs pou-
voient obtenir l'effet des promeffes de Jefus-Chrift,
par leurs prieres qui font bonnes.

1531.

roribus libri fep

ab Arragonia Hif

Dialogorm de

de juftitia regni

quatuor, per Mi-`'

ragonia Hifpanum

Pour repandre cette doctrine plus facilement, Ser- De Trinitatis ervet fit imprimer deux ouvrages,dans lefquels il ren- tem, per Michaelesn ferma fes erreurs. Le premier parut en 1531. fous Servet, alias Reves ce titre, des erreurs de la Trinité en fept livres,par Mi- panum. chel Servet,autrefois Reves, Espagnol d' Arragon. Le lieu Trinitate libri duo, de l'édition n'eft point marquée. Il y a de plus dans chrifti capitula ce même volume, qui eft imprimé en caracteres ita- bilim Servet, liques, d'autres traitez ainfi intitulez. Deux livres aliàs Reves ab Arde dialogues touchant la Trinité,quatre chapitres touchant anno 1531. la justice du regne du Chrift,par Michel Servet, autrefois Reves, Espagnol d'Arragon, l'an 1532. Dans l'avertiffement qu'il a mis à la tête de fes dialogues, il retracte ce qu'il a écrit dans fes fept livres de la Trinité, non qu'il eût changé pour cela de fentiment, puifqu'il le confirme de nouveau dans fes dialogues mais parce qu'ils étoient mal écrits & qu'il s'y étoit expliqué d'une maniere barbare. Dans les deux dialogues fur la Trinité, qui font fort courts, il introduit deux pefonnages, dont l'un prend le nom de Michel, & l'autre celui de Petrucius. L'autre ouvrage qui eft intitulé,de la juftice du regne du Chrift,ra

portée à la justice de la loi & de la charité, contient AN. 1531. quatre chapitres, dont le premier eft de la justification; le fecond, du regne du Chrift; le troifiéme, comparaison de la loi & de l'évangile ; le quatriéme de la charité.

CXXVI. Erreurs de Jean Campanus.

Un certain Jean Campanus, Allemand originaire du duché de Juliers, qui avoit été difciple de LuCecbl. ad an. ther durant deux ans à Wittemberg, enfeigna dans Raynald, ad ann. cette année à peu près les mêmes erreurs que Servet. 15 32. n. 86. &8*• Cochlée dit, qu'il condamnoit le mot homooufion,

1532. p. 235.

c'est-à-dire confubftantiel, & que toutes les erreurs avoient été puifées dans la doctrine de Luther. Cependant il s'écarta des opinions de fon maître, principalement fur la Céne, en quoi il differoit même des Sacramentaires. Il difoit encore, que le Fils & le faint Esprit n'étoient pas deux perfonnes differentes du Pere. Celui qui le refuta plus vivement, fut Geor ges Wicelius affez bon théologien de ce tems-là; il étoit né à Fulde en 1501. & avoit fait d'abord profeffion de la vie monaftique; mais il y renonça bien-tôt après, & quitta même la religion catholique pour le faire Luthérien. En 1521. il alla étufe dier en théologie à Wittemberg, & étant devenu enfuite chef des rebelles en Thuringe, il fut pris & condamné à la mort, mais on lui fit grace à la follicitation de Pontanus chancelier de Saxe. Luther qui l'aimoit,l'établit peu de tems après miniftre dans un village nommé Nimoc proche de Wittemberg; mais dans cette année 1531. il paroît qu'il renonça l'églife catholique à la doctrine Luthérienne, & qu'il rentra dans le expetend. tom. 1. fein de l'églife Catholique. Luther l'ayant appris deLondini 1690. vint fon ennemi & le fit mettre en prifon par ordre

CXXVII.

Retour de Wice

lius dans le fein de

In fafciculo rerum

2.

de l'électeur de Saxe Fredéric,& par le confeil de Mélanchton, parce qu'il combattoit, difoient-ils, la di- AN. 1531. vinité de Jefus-Chrift. Wicelius fouffrit patiemment la perfécution que lui faifoit Luther, mais la providence l'ayant délivré de fes mains,peu de tems après, il confentit volontiers à fe voir banni des états de l'électeur, & il se retira à Leipfic, où le duc George le prit fous fa protection.

CXXVIII. Etablifiement de la congrégation des Somafques. Heliot hift. des or

0.33.& 36.

Ce fut dans cette année, que Jerôme Emiliani noble Venitien jetta les fondemens de fa congregation des Somafques, dit clercs reguliers de faint Mayeul. Jerôme étoit né à Venise l'an 1481. d'Ange dres monaft. to. 4. Emiliani fenateur, & d'Eleonore Morofini. Il s'engagea de bonne heure dans le parti des armes, & s'y diftingua par fa valeur. Le gouverneur de Castelnuovo, qui étoit affiegée par les Allemands, s'étant fauvé de la place après une vigoureufe refistance, on fit paffer toute la garnifon au fil de l'épée, & Jerôme fut jetté dans une obfcure prifon chargé de chaînes; mais on lui rendit la liberté peu de tems après. Caftelnuovo ayant enfuite été rendue aux Venitiens, ils reconnurent les fervices d'Emiliani, & lui accorderent la joüiffance de cette place pendant trente ans avec la qualité de Podeftat, ou chef de la justice; mais il abandonna bien-tôt après cet emploi, pour ne s'appliquer qu'à l'éducation de ses neveux, & aux exercices de charité. La famine & une maladie contagieufe, qui firent de grands ravages en Italie en 1528. lui donnerent moyen de faire paroître fon zéle: il vendit jusqu'à fes meubles pour foulager les pauvres ; & enfin touché de la mifere des orphelins, il en rassembla un grand nombre dans une maison, où

il les assista avec une œconomie, une activité & une AN. 1531. prévoyance qui étonna toute la ville de Venise. Son zéle n'étant pas encore fatisfait, il travailla efficacement à procurer en diverfes villes de pareils établissemens, & quelques personnes charitables s'étant jointes à lui, il institua en 1531. pour l'utilité des orphelins, une congrégation de clercs réguliers, qu'on appella Somafques, du nom du lieu fitué entre Bergame & Milan.

CXXIX.

La faculté de

eft confoltée pr

pres.

jud. tom. 1. in ap

P. 78.

Vers le même tems la faculté de théologie de Pathéologie de Paris ris, dont la réputation étoit grande depuis longles magiftrats d'y tems, fut confultée par les magistrats de la ville d'Ypres en Flandres, fur un excellent réglement qu'ils D'Argentré coll. avoient fait en 1525. avec le prévôt de l'église d'Ypend. p. 6. & t. 2. pres, grand vicaire de l'églife de Therouanne, & le clergé de ce diocese, pour la nourriture & l'entretien des pauvres, fans qu'ils fuffent obligez de mendier. Leur lettre, dont Jean Crocius dominicain profeffeur en théologie, & Jacques le Pape furent porteurs, eft dattée du vingt-huitiéme Décembre 1530. Les magiftrats y représentent, que pour fournir plus aifément aux befoins des pauvres de leur ville, & remédier aux abus & fourberies qui fe commettent tous les jours fous prétexte de mendicité, ils ont fait une ordonnance qui défend de mendier publiquement, avec ordre à certains particuliers de recueillir les aumônes, & les diftribuer felon les befoins en la ma❤ niere prefcrite: que depuis cinq à fix mois que cette pratique s'observe, les vrais pauvres sont très-soulagez & le peuple fort en repos. Et parce qu'ils fouhaitent de continuer la même bonne ceuvre, ils prient la faculté de les aider de fes confeils, d'examiner toutes

les

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