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LIVRE CENT TRENTE-QUATRIE ME.

PAR

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AN. 1531.

Inquiétudes & em

ARMI tant d'affaires difficiles qui occu- I. poient l'empereur Charles V. il n'y en avoit barras de l'empepoint qui lui causât plus d'inquiétudes que celle reur Charles V. de la religion, qui fe trouvoit d'un côté menacée par Solyman, qui armoit puiffamment fur mer & fur terre; de l'autre déchirée par les Luthériens, qui à la faveur de leur nouvelle réforme vouloient anéantir la doctrine Catholique. Quelque fage & prudent que fût cet empereur, il ne pouvoit être qu'extrêmement troublé & fort embarraffé fur le choix des moyens qu'il devoit em+ ployer pour mettre ordre à tout, parce qu'il ne pouvoit tourner toutes les forces contre les Turcs, fans affoiblir celles qu'il destinoit à ranger les Luthériens, ni attaquer ceux-ci fans s'exposer à être accablé par ceux-là.

fT. Il pense à faire la

ces

Sleidan. in comm.

Dans ces extrémitez, l'empereur prit le parti de négocier quelque tréve avec les Proteftans jufqu'à paix avec les prinla tenue du concile : ce fut le but principal de la dié Proteftans. te qu'il convoqua à Spire pour le treizième de Sep-1.8.pag. 248, tembre. Comme les princes Luthériens avoient déja donné parole de confentir à la tréve, pourvû qu'on les laissât vivre en paix, l'empereur leur envoya les comtes de Naffau & de Nuenare, tous deux recommandables par leur vertu & leur adreffe à manier les affaires : ces comtes allerent trouver le vingt-deuxiéme d'Août l'électeur de Saxe, auquel ils propofe. rent cinq articles, de la Céne du Seigneur, des céré,

monies de l'églife, des biens eccléfiaftiques, du feAN. 1531 cours contre les Turcs, & de l'élection du roi Ferdinand; & parce que leur difcours faifoit entendre que fa majefté impériale foupçonnoit l'électeur d'approuver la doctrine des Zuingliens & des Anabaptistes, l'électeur leur déclara que la confession d'Ausbourg étoit une preuve du contraire; qu'on fçavoit combien la doctrine de fes miniftres leur étoit oppofée, puifqu'ils n'avoient voulu avoir aucun commerce avec les Sacramentaires à Aufbourg, & n'en avoient point eu depuis, jusqu'à ce qu'ils euffent expliqué leurs fentimens, que pour lui il penfoit de même, & demeureroit toujours attaché jufques à la fin de fa vie à la doctrine dont il avoit fait profeffion à Aufbourg, & qu'il les prioit de le justifier fur cet article auprès de l'empereur, ce que les comtes lui promirent.

III.

de Saxe veut ve

Conditions auf- € A l'égard des autres articles,on jugea à propos d'en quelles l'électeur remettre la difcuffion à la diéte prochaine, à laquelle nir à la diéte. ils prierent l'électeur de se trouver, ou du moins Sleidan ut fuprà d'envoyer Frideric fon fils. L'électeur répondit qu'il

lib. 8. p. 248.

249.

fouhaitoit de tout fon cœur obliger l'empereur en tout ce qu'il pourroit, mais qu'il étoit devenu pefant & dans un âge peu propre à voyager, & à l'égard de fon fils, qu'il avojt des raifons qui l'empêchoient de l'envoyer à la diéte; que cependant fi fa préfence étoit abfolument néceffaire, il ne pourroit fe mettre en chemin que l'empereur n'eût auparavant accordé un fauf-conduit pour lui & pour tous ceux qui l'accompagneroient; qu'il vouloit y mener des théologiens, faire prêcher la parole de Dieu en quelque endroit qu'il fe trouvât, & n'être point obli

gé à l'abftinence dans les jours aufquels l'églife Catholique défend de manger de la chair; que de plus dans le doute fi l'on traitera de religion dans la diéte, il vouloit se faire accompagner de Luther, auquel on accordera de même un fauf-conduit ; que fans ces conditions ni lui ni son fils n'assisteroient point à la diéte.

.

AN. 1531.

IV.

Mayence & da

Sleid. lib. S. pag.

Sur la fin du mois d'Août, les députez de l'ar- Députez de chevêque de Mayence & du prince Palatin se trou- l'archevêque de verent à Smalkalde. Là ils expoferent aux Proteftans Meetin le zéle de leurs maîtres pour les reconcilier avec l'em- Saikalde. pereur qui leur avoit promis de traiter de la paix, & 249. qui même les avoit choifis pour médiateurs, dans l'efperance qu'on termineroit à Spire ce qu'on n'avoit pû faire à Ausbourg : ils ajoûterent que pour y parvenir ils croyoient qu'il étoit à propos de remettre fur le bureau les points conteftez,& de commencer par où l'on avoit fini. Mais ces propofitions étoient trop vagues pour contenter les Luthériens ; ils repliquerent que les princes ignorant ce qu'on propoferoit, n'avoient donné à leurs ambaffadeurs que des inftructions fort limitées, en les chargeant feulement de rapporter par écrit les demandes qu'on leur feroit. C'est pourquoi ils pouvoient propofer ce qu'ils jugeroient à propos pour en faire enfuite le rapport. Que quant à eux il ne leur convenoit pas de faire les premiers des demandes, parce qu'ils étoient parties; -maisque s'il en falloit faire,ils s'en tenoient à leur confeffion d'Aufbourg. Les députez Catholiques vouloient qu'avant la diéte on déterminât un lieu où l'on conviendroit de la maniere dont on devroit fe conduire, & du parti qu'il falloit prendre, afin qu'il

n'y eût plus qu'à ratifier les articles. Mais les ProtefAN. 1531. tans ne repartirent autre chofe, finon que les autres donnaffent leurs demandes par écrit ; qu'ils ne vouloient pas qu'on traitât du dogme, que leurs princes ne fouhaitoient rien tant que la paix, ce qui paroiffoit affez par toute leur conduite. Comme ils infiftoient toujours là-dessus, on convint à la fin qu'on se rendroit à Spire en un certain jour fixé par les médiateurs, auffi-tôt qu'on feroit informé des volontez de l'électeur de Saxe & du lantgrave de Heffe, qui manderoient leurs intentions & celles de leurs affociez au plûtôt. Ce qui fut arrêté le deuxième de Septembre.

V.

Les Proteftans demandent un con

gne,

"

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Au commencement du mois d'Octobre l'archevêque de Mayence & le prince Palatin reçurent les cile en Allema- lettres du prince de Saxe & du lantgrave, qui mandoient qu'on ne pouvoit rien déterminer fans théologiens, & qu'à leur égard ils s'en tenoient à la doctrine dont ils avoient fait profeffion à Aufbourg. » Et comme dans toutes les diétes précédentes, ajoûtoient-ils, foit que l'empereur ait été présent ou absent, on a toûjours promis d'affembler un concile, qui même devroit être commencé, nous esperons que fa majefté impériale le procurera au plûtôt en Allemagne, où nous & nos confederez donnerons une plus ample déclaration de notre doctrine, & ferons tous nos efforts pour en venir à » une parfaite reconciliation. » Cependant ils fupplient l'empereur que tout foit paifible dans l'empire; qu'il n'inquiéte point ceux qui auparavant faifoient profeffion de l'évangile, & la feroient dans la fuitę jusqu'à la décision du concile. Que fi à ces conditions

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on veut traiter de la paix, on n'a qu'à marquer le jour, promettant d'y envoyer leurs ambassadeurs, qui ne manqueront pas de s'y trouver aux conditions déja propofées touchant le fauf-conduit, la prédication libre & publique de la parole de Dieu, l'usage de la Céne, felon le commandement & l'inftitution de Jesus-Christ, la liberté d'ufer de toutes fortes de viandes. Ils ajoûtent que fi leur confeffion ne peut être réfutée par les faintes écritures, ils efperent que l'empereur ne les inquiétera pas davantage là-deffus, puifqu'ils feront prêts de répondre à tous ceux qui la trouveront erronée en quelques points. Et parce qu'ils ont appellé à un concile légitime, & qu'on eft encore à trouver dans leur doctrine quelque article oppofé à la parole de Dieu, que felon le droit & les loix, leur appel fubfiftant, on ne peut agir contre eux; ils fe perfuadent que l'empereur content de leur foumiffion rétablira la paix dans toute l'Allemagne. La diéte convoquée à Spire pour le treiziéme de Septembre, fut remise au mois de Janvier de l'année suivante, & indiquée à Ratisbonne, comme un endroit plus proche de l'Autriche, où la guerre des Turcs pourroit commencer.

AN. 1531.

VI. François I. propo

le mariage de niéce du pape.

fon fils avec la

Mais pendant que l'empereur travailloit à faire la paix avec les princes Proteftans, François I. cher- fe choit à le brouiller avec les autres princes, & à profiter contre lui du mécontentement où étoit le pape, au fujet du jugement que ce prince avoit prononcé fur l'affaire du duc de Ferrare, & qu'on a rapporté plus haut. Dans cette vûë François I. attentif à mettre le pape dans fes intérêts, lui fit propofer le mariage de Catherine de Medicis fille du duc Laurent avec

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