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s'arrêter à certaines formalitez dont le fuccès n'a que AN. 1533. trop fouvent été funeste ; qu'en ne ménageant pas l'électeur, il pourroit porter les chofes aux dernieres extrémitez; qu'il étoit bon de n'avoir aucun commerce avec les hérétiques, mais que puisqu'on ne pouvoit employer contre eux la force des armes fans Le mettre en danger de perdre beaucoup & de tout rifquer; ce feroit prudence, avant que d'en venir à cette extrémité, de tenter la douceur. Que le vicaire de Jesus-Chrift doit avoir à cœur de fuivre l'exemple du Sauveur qui ne fit difficulté de converfer avec les pécheurs & les publicains pour les convertir, & que non-feulement il n'y avoit point de mal d'envoyer un nonce à cet électeur, mais que cela étoit d'une néceffité abfolue.

pas

Quoique ce fentiment fût appuyé du plus grand nombre des cardinaux, le faint pere ne ne laiffa pas de demeurer près d'une semaine dans l'irrésolution, ne fachant quel parti prendre, chagrin d'envoyer un nonce pour les affaires de l'églife, à un électeur qui dès sa premiere jeunesse s'étoit déclaré un des plus zélez défenfeurs d'un héréfiarque qui avoit troublé toute l'Allemagne; mais après y avoir refléchi mûrement,& confidérant que l'empereur alloit abandonne l'Allemagne dans un tems où elle avoit le plus befoin de fa préfence,pour faire un voyage en Espagne, il fe crut obligé de tenter s'il ne pourroit pas apporter quelque remede au mal ; & pour cela il convint avec fa majefté impériale des mesures qu'il falloit prendre pour convoquer au plûtôt un concile : & comme les Luthériens y devoient affifter, & qu'il étoit bon de pressentir de bonne heure quelle étoit leur

pensée & la difpofition de leur esprit fur ce fujet; il nomma dans cette vûë Hugues Rangony évêque de Reggio, pour aller vers les princes Proteftans en qualité de nonce, & leur faire des propositions fur la convocation du concile.

Pendant ce tems-là, les cantons Suiffes Catholiques envoyerent leurs députez à Boulogne au nombre de dix-huit, & le pape & l'empereur les reçurent & leur donnerent audiance affis tous deux ensemble fur un même trône. Ces députez leur apprirent que ceux des cantons de Zurich & de Berne follicitoient fort les Genevois à embraffer la nouvelle réforme & à suivre leur exemple;ce qui fit de la peine à Charles & à Clement, qui prirent fur le champ la résolution d'écrire conjointement une lettre en termes obligeans & pleins de modération au confeil de Geneve, pour l'exhorter à la conftance, & à perfeverer dans la religion Catholique. Ils écrivirent auffi en commun à chacun des cantons Catholiques, & renvoyerent les députez avec ces lettres & des préfens.

AN. 1533.

LXVIIL Députz des canthoiques à Bou

tons Suifles Ca

logne.

LXIX. L'empereur part

vient à Milan,

Le tems auquel l'empereur devoit partir de Boulogne étant arrivé,il prit congé du pape au commen- de Boulogne & cement du mois de Mars & s'en alla à Modene, où il fut magnifiquement reçu par le duc ; il passa enfuite à Plaifance, où le marquis du Guaft qui commandoit l'armée du Milanez, vint le recevoir avec une grande fuite d'officiers.. Le duc François Sforce s'avança jufqu'à Lodi avec toute la noblesse du pays pour le recevoir, & l'ayant conduit à Milan, il lui fit une des plus fuperbes entrées, ayant fait sortir du château toute la garnison; fa majefté impériale y lo

gea,& pendant huit jours elle fut traitée par le duc,qui AN. 1533. la conduifit jusqu'à Pavie, accompagnée du marquis du Guaft. De là l'empereur fe rendit à Genes, & y féjourna huit jours, fans vouloir qu'on lui fît aucune entrée ; il en partit s'étant embarqué fur la capitane de Doria, & prit la route de Barcelone; ce fut le 8. d'Avril, & quelque tems après il arriva à Madrit. Il parut que Charles V. n'avoit pas été toutà-fait content de l'entrevûë qu'il venoit d'avoir avec le pape, qui, à travers beaucoup de déguisemens, n'avoit pû s'empêcher de faire connoître qu'il commençoit à pencher du côté de la France; en effet il étoit déja convenu avec les cardinaux de Tournon & de Grammont d'une entrevûë dans quelque ville de • Provence avec François I. & du mariage de Catherine de Medicis avec le duc d'Orleans. Cependant fa Pallav. hift. conc. fainteté executa ce qu'elle avoit promis à lempereur au fujet de la convocation du concile, & dès le dixiéme de Janvier elle avoit écrit au roi Ferdinand & aux princes d'Allemagne pour en obtenir le confen

Trid. lib. 3.c. 12.

fub finem.

LXX. Conditions du

à l'électeur de Sa

xe.

Pallav. I. 3. c.12. & 13.

tement.

L'autre condition fut auffi fidelement remplie. Peu consile propofés de tems après le départ de l'empereur, le pape envoya Hugues Rangoni évêque de Reggio en Allemagne, Ex cod. Mff. apud & Ubaldin d'Ubaldino en France & en Angleterre, pour faire la propofition du concile. Le pape, qui jufqu'à préfent n'en avoit point voulu, dans l'appréhenfion qu'on n'y portât quelque préjudice à fon autorité & à fes intérêts, y avoit enfin confenti, mais à condition qu'on le tiendroit dans quelque ville d'Italie, Boulogne, Plaisance ou Mantoüe; que les princes y affisteroient en personnes, ou par leurs ambas

fadeurs; que s'ils y manquoient, on ne laifferoit pas de paffer outre; qu'on feroit obligé de fe foumettre à toutes fes décisions, parce qu'autrement il feroit inutile de le convoquer ; que fi l'on refusoit d'y obéir, l'empereur & les autres princes feroient obligez de protéger & de défendre le pape & l'église, & que fa: fainteté, fix mois après avoir reçu une réponse favorable fur tous ces points, & concerté avec les rois & les autres fouverains, convoqueroit le concile, qui feroit célebré un an après fa convocation. Suivant ces conditions, Rangoni se mit en chemin accompagné de Lambert Brieres préfident du confeil de Flandres pour l'empereur & fon ambaffadeur; & tous deux s'adrefferent au nouvel électeur de Saxe, qu'ils regardoient comme chef des Proteftans, & qui

étoit alors à Weimar.

Ils lui représenterent les bonnes intentions du pa

pe & de l'empereur, & le défir ardent qu'ils avoient de voir terminer les differends de religion en Allemagne, par des voies douces & pacifiques ; qu'à cet effet ils y avoient envoyé plufieurs perfonnes d'une profonde érudition pour travailler à cet accord, fans y avoir pû réuffir; en forte que la feule reffource de sa sainteté n'étoit plus que dans le retour de l'empereur d'Italie en Allemagne, efperant qu'après fon couronnement il mettroit fin à toutes ces difputes

par

AN. 1533.

fon crédit & fon autorité; en effet, ajouterentils, il n'a rien oublié pour rétablir l'ancienne religion dans fes états; & tous fes foins ayant été inutiles, après plusieurs diétes tenuës à ce sujet, le parti qu'il crut devoir prendre fut de revenir en Italie, & de représenter au pape qu'il n'y avoit point de re

mede plus propre & plus efficace pour en venir à une A N. 1533. parfaite union, qu'un concile général, que les princes d'Allemagne fouhaitoient ardemment. » Sa fainteté, » dit Rangoni, a fort approuvé cette ouverture; ainfi pour complaire à l'empereur & contribuer au bien public, elle m'envoie en qualité de fon nonce auprès de vous, afin de vous affurer de les difpofitions, & convenir avec vous de la maniere, de la forme, du tems & du lieu du concile, pour la » célébration duquel je fuis chargé de vous proposer » les conditions fuivantes.

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Ce premier entretien avec l'électeur de Saxe dura près de trois heures, & comme le nonce, qui parla prefque toujours feul, rapportoit tout au pape, comme fi toute l'affaire n'eût dépendu que de fon autorité & de fon zéle, l'ambaffadeur de fa majefté impériale lui dit : » Si votre feigneurie révérendiffime croit fa fainteté que tout faire, ma perfonne peut » ne fert de rien ici; à quoi l'électeur répondit, elle y fert affurément beaucoup, car nous ne prétendons avoir affaire qu'avec l'empereur. » Cette réponse déconcerta un peu le nonce, qui convint Conditions auf- cependant de ne parler qu'au nom du pape & de l'emquelles le pape pereur, & propofa enfuite les conditions qui étoient, bler un concile. que le concile fût libre & général, semblable aux anSleid. lib. 8. pag. ciens, qui indubitablement étoient conduits par le Saint-Esprit ; que ceux qui y affisteroient promissent & jurassent d'en recevoir tous les décrets, fans quoi il feroit inutile de le tenir, parce qu'il ne fert de rien d'établir des loix qu'on n'obfervera point, & qu'on peut violer fans crainte d'être repris ; que ceux qui ne pourront s'y trouver y envoieront leurs ambassa

163.

LXXI.

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