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France lui envoya Guillaume du Bellay seigneur de AN. 1533. Langey, à qui il ordonna d'informer Henri VIII. de la négociation en faveur de la ligue d'Italie, du refus que les Vénitiens avoient fait d'y entrer & de celui du pape d'y comprendre les Genois; de la propofition d'un concile, & des réponses que les princes Proteftans y avoient faites, des fecours qu'on préparoit contre les Turcs ; enfin de l'entrevûë prochaine du pape, & de François I. à Marseille & du mariage, qui s'y devoit faire de Henri fon fecond fils, avec la ducheffe d'Urbin petite niéce de fa fainteté. Que dans une telle conjoncture il paroiffoit convenable que Henri fe trouvât lui-même à l'entrevûë pour faire entendre au pape la justice de fa caufe & fon bon droit ; que pour faire ce voyage. il pourroit traverfer la France, où il feroit auffi furement que dans fon royaume. Du Bellay arrivé à Londres s'acquitta fidelement de fa commiffion. Henri lui déclara que fur le refus de Clement VII, de lui donner des juges en Angleterre, il avoit paffé outre, & époufé Anne de Boulen, & qu'il étoit réfolu à faire caffer fon mariage par l'archevêque de Cantorbery; que cependant il tiendroit fon fecond mariage fecret jufqu'à l'entrevue du roi de France avec le pape, qu'il croyoit devoir fe faire dans le mois de May, pour en voir le fuccès par raport à son affaire,

XCVII. L'archevêque de

Mais comme cette entrevûë fut differée jufqu'au Cantorbery fait mois d'Octobre,Henri n'eut pas la patience d'attentherine reine Ca- dre jufqu'alors; fon mariage avec Anne de Boulen

Bom. 14. pag. 461,

At. publ. Angl. fut rendu public, parce qu'elle étoit enceinte de quatre mois, & qu'elle ne pouvoit plus cacher fa

groffeffe

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grossesse; mais avant que d'en venir là, l'archevê-
que de Cantorbery fit citer la reine Catherine, après
avoir fait beaucoup d'instances auprès d'elle, pour
l'engager à se désister de fon appel, tâchant de lui
perfuader, que toute l'église, hormis la cour de Ro-
me, s'étoit déclarée contre elle. On lui promit aufsi
le douaire qui étoit dû à la veuve du prince Ar-
thus, on lui offrit la qualité de princeffe de Galles:
mais toutes ces promeffes furent inutiles, elle dit
qu'il n'y avoit qu'une sentence du pape, qui fût ca-
pable de la faire changer de résolution. Sur ce refus
Cranmer la cita pour comparoître à Dunstale lieu
voifin de fa résidence, le vingtiéme de May. Le roi
fut auffi cité. Cranmer au jour marqué partit pour
cet endroit avec les évêques des Londres, de Win-
chester, de Bath, & de Lincoln, plufieurs théolo-
giens & canoniftes. Le roi comparut par procureur,
mais la reine ne comparut point: une seconde & troi-
fiéme citation n'ayant produit aucun effet, cette
princeffe fut déclarée contumace; enfuite on exami-
na les dépofitions faites devant les légats; on rappor-
ta les décisions des univerfitez, les conclufions de
fçavans canonistes, les déclarations du clergé des
deux provinces, & toutes les autres piéces du pro-
cès. Diverses séances ayant été employées à examiner
cette affaire, Cranmer caffa le mariage de Henri &
de Catherine, de sa propre autorité, & déclara le
vingt-troifiéme de May, ce mariage nul dès le com-
mencement, comme contraire à la loi de Dieu. Le
vingt-huitiéme du même mois, il confirma le ma-
riage de Henri avec Anne de Boulen, & le premier
de Juin elle fut couronnée.
Tome XXVII,

Aaa

AN. 1533

Il une

le d'Hen

XCVIII. fentence qui caffe de Catherine. sander. de fchifm.

&

Angl. l. 3. p. 95.

La cérémonie du couronnement fut des plus au

XCIX.

Couronnement d'Anne de Boulen.

vint

par cau

260. & fuiv.

P. 96.

AN. 1533. guftes & des plus magnifiques. La nouvelle reine Cérémonie du partit de Greenvik le vingt-neuvième de May, & à Londres dans une barque ornée de Le Grand bift, du plufieurs banderolles, & fuivie de plus de cent audivorce to. 1. pag. tres ornées de même & remplies de tout ce qu'il y Sander, ut fuprà avoit de plus diftingué dans le royaume; elle vint avec ce nombreux cortege defcendre à la tour de Londres, où elle fut reçûë au bruit de toute l'artillerie. Le lendemain elle fe repofa, & le jour d'après elle alla au palais de Wittehal vêtuë en reine, & portée dans une litiere de fatin blanc toute ouverte. A la tête paroiffoit une compagnie de Marchands François à cheval, vêtus de velours violet hors la manche qui étoit des couleurs de la reine : leurs chevaux étoient couverts de taffetas violet avec une croix blanche: immédiatement devant la litiere étoient deux écuyers avec des bonnets fourés d'hermine; & près de la reine marchoient le duc de Suffolk, & Mylord Guillaume, le premier faisant l'office de connétable, & le fecond celui de grand maréchal à la place de fon frere. Enfuite venoient douze dames vêtûës de drap d'or fur douze haquenées caparaffonnées de même étoffe, & après elles fuivoit un char couvert pareillement de drap d'or, où étoient la vieille ducheffe de Norfolk, & la comteffe de Wilkire mere de la nouvelle reine.

On voyoit derriere ce char douze demoiselles habillées de velours cramoify, & montées fur des haquenées. Trois chariots dorez fuivoient remplis de demoiselles, & vingt ou trente autres vêtuës de velours noir les accompagnoient à cheval. Les ambaf

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fadeurs de France & de Venife paroiffoient enfuite;
le premier accompagné de l'archevêque de Cantor-
bery, & le fecond du grand chancelier. Toute cette
marche étoit fermée par un corps de plus de trois
cens gentilshommes. On avoit dreffé dans les ruës
par où la reine devoit paffer plufieurs arcs de triom-
phe avec diverses inscriptions, & d'espace en espace
étoient des fontaines de vin. Le jour fuivant premier
de Juin, qui étoit un dimanche, la nouvelle épouse
marcha à pied fur des draps fort riches, dont on avoit
couvert les ruës jufqu'à l'églife, où elle fut couronnée
avec beaucoup plus de magnificence & de pompe
que jamais aucune autre reine d'Angleterre ne l'a-
voit été. Après la cérémonie il y eut un repas fu-
perbe, & Anne y fut servie en reine. Enfin cette
grande fête fe termina le lendemain par un tournois
de feize chevaliers divifez en deux bandes, dont l'une
étoit conduite par le frere du duc de Norfolk, &
l'autre par mylord Carer grand écuyer, qui rom-
pirent leurs lances avec beaucoup d'adresse. Anne de
Boulen quelques mois après, c'est-à-dire le feptiéme
de Septembre, accouchà d'une fille, qui fut nom-
mée Elizabeth.

AN. 1533

C.
Anne de Boulen

accouche d'Eliza-
Sanderus lib. 1.

beth.

p. 102.

2.

CI.
Henri défend à fes

Catherine reine.

Dès que la sentence du divorce eut été publiée Henri prit foin d'en faire informer Catherine par fujets d'a plier le lord Montjoye, qui s'efforça inutilement de lui perfuader de s'y foumettre. Elle demeura toujours inflexible, & foutint qu'elle feroit l'épouse du roi, juf qu'à ce que le pape eût prononcé la nullité de fon mariage. Le roi informé de cette réponse, fit défense de donner à Catherine le nom de reine, & ordonna qu'on l'appelleroit feulement princeffe doüairiere de A aa ij

Le Grand hift. du

divorce tom. 1. p.

263.

Galles ; & fur ce que cette princeffe s'obstina à ne A N. 1533. vouloir fouffrir aucun domestique qui ne la traitât de reine, Henri lui envoya dire qu'elle avoit entre ses mains la fortune de fa fille, & qu'il la desheriteroit, s'il n'étoit satisfait. Cependant rien ne fut capable de la faire changer; elle foutint jufqu'à la mort la validité de fon mariage, & le roi qui ne menaçoit jamais en vain, étouffant tous les fentimens de peSandor. de fchifm. re, maltraita fort la princeffe Marie, lui défendit de voir fa mere, la déclara incapable de fucceder. Peu de tems après, il fit notifier fon divorce & fon nouveau mariage à tous les fouverains, & particu lierement à l'empereur, qui répondit féchement à l'ambaffadeur d'Angleterre, qu'il verroit ce qu'il auroit à faire fur ce fujet, réponse qu'on regarda comme une déclaration de guerre.

Angl. l. 1. p. 101.

CII.
Le pape condam-

Dès qu'on apprit à Rome non-feulement qu'Hen

tence de l'arche

ne & caffe la fen- ri avoit repudié Catherine, & époufé Anne de Bouvêque de Cantor- len, mais que les Anglois publioient par-tout difbery. ferens traitez contre la puiffance des papes, entre au

1 Milord Herbert

VIII.

263.

}

hift. regn. Henrici tres un livre contre l'autorité pontificale, dont on Le Grand ibid. p. croyoit le roi même auteur, le pape en fut vivement irrité, & réfolut dès-lors de proceder contre Henri & contre l'archevêque de Cantorbery. Les cardinaux du parti de l'empereur voulant profiter de ces difpofitions, prefferent fort Clement de donner une sentence définitive en faveur de Catherine, & de ne pas fouffrir l'infulte qu'on venoit de faire à l'autorité du faint fiége. Mais d'autres plus modérez, lui représenterent qu'il ne falloit point pouffer les chofes fi loin, & qu'on ne devoit rien précipiter dans une affaire de cette conféquence, qui expo

Acta publ. Angl.

om. 14. p. 482.

1

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