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seroit un royaume entier à se séparer de l'église. Cet
entraîné
avis étoit sage; mais le pape
les
par pour-
fuites des Impériaux, donna une bulle qui caffoit la
sentence de l'archevêque de Cantorbery, & décla-
roit que
le roi lui-même meritoit d'être excommu-
nié, & le feroit en effet, fi dans tout le mois de Sep-
tembre il ne remettoit les choses dans l'état auquel
elles étoient auparavant, & s'il ne renvoyoit Anne
de Boulen.

Henri informé de cette menace d'excommunication, attaqua la bulle du pape, prétendit en faire voir les nullitez, & pouffant plus loin fon reffentiment, il rappella les agens qu'il avoit à Rome.

Cependant François I. qui n'avoit pas perdu toutà-fait l'efperance de réunir Henri avec le pape, étant revenu de Marseille, envoya promptement Jean du Bellay évêque de Paris en Angleterre pour négocier cet accommodement.

&

Ce prélat trouva le roi fort irrité contre le pape & la cour de Rome, fe plaignant hautement de ce qu'on lui refusoit des commiffaires pour connoître de fon affaire, & de ce qu'on vouloit l'obliger d'abandonner fon royaume pour se rendre à Rome, comparoître en perfonne devant le pape. Du Bellay le laiffa dire ce qu'il voulut, & enfuite lui remontra de quelle importance il étoit de ne point user de précipitation; que le fouverain pontife étoit mieux difpofé qu'il ne penfoit, qu'il étoit même tout prêt à furfeoir l'execution de fa fentence, fi fa majefté vouloit envoyer de nouveaux députez à Rome, & fufpendre la résolution qu'elle avoit prise de fe fouftraire entiérement à l'obéissance qu'il devoit à l'é

AN. 1533.

CIII. François I. envoie

l'évêque de Paris

en Angleterre. Mem. du Bellay

tv. 4. p. 186.

à

CIV.
Cet évêque part

d'Angleterre & va
Rome pour l'af-
Mem. du Bellay

faire d'HenriVIII.

liv. 4. p. 187. Burnet hift. de la

reform liv. 2. p.

199.

glife Romaine. Le roi y confentit, & dans le moment AN. 1533. même du Bellay s'offrit lui-même à faire ce voyage, croyant qu'il feroit mieux entendre au pape les raifons du prince, qui de fon côté promit d'envoyer un pouvoir suffifant, pour confirmer ce que Clement auroit accordé. Ce prélat se mit aussi-tôt en chemin, traverfa la mer, repaffa en France, & en partit en poste pour l'Italie au milieu de l'hyver, fans craindre les incommoditez de la saison, ni les difficultez du voyage.

CV. Conduite d'Henri

le donnée à l'évê

que de Paris.

270 271.

ref. liv, 2. p. 210.

Mais rien ne prouve mieux qu'Henri agiffoit de oppofée à la paro- mauvaife foi, que la conduite qu'il tint dans fon royaume après le départ de du Bellay, puifque vers ce Le Grand hist. du même tems il fut conclu en Angleterre, que la puisdivorce tom. 1. p. fance des papes n'étoit fondée fur aucun droit, ni diBurnet hift. de la vin, ni humain ; qu'elle n'étoit qu'une fuite d'exactions, qui tenoit extrêmement de la tyrannie, que tout le monde, & l'Angleterre plus que le refte, gémiffoit fous ce pefant joug; qu'on avoit inutilement tâché de le fecoüer depuis trois cens ans ; que cette puiffance ne pouvant plus être ramenée à une jufte modération, il la falloit abolir entiérement; qu'ainfi le pape ne feroit plus reconnu que pour évêque de Rome, & fon pouvoir ne s'étendroit plus par rapport à ce royaume, au-delà des bornes de fon diocefe: que le fouverain reprendroit fon ancienne autorité, à laquelle fes prédéceffeurs n'avoient jamais renoncé, quoiqu'ils euffent diffimulé les ufurpations de la cour de Rome.

CVI.

Progrès des Ana

Henri laissant introduire & prêcher une telle baptiftes en Alle- doctrine dans fon royaume, y préparoit un établismague, sement aux Anabaptiftes, qui par les belles apparen

AN. 1533.

Sleidan in comm.

& feq.

ces de fainteté qu'ils affectoient, attiroient un grand nombre de difciples, en enfeignant qu'il n'étoit pas permis à un chrétien de plaider, quelque jufte que fût Meshov. lib. 3. fa caufe ; qu'il lui étoit défendu d'exercer les magi- lib 10. p. 305. ftratures, qu'il ne pouvoit prêter aucun ferment, non Spond. ad ann. pas même en justice, & qu'il ne devoit rien poffe- 1534. 15. 1ối der en propre. Cette morale auffi relâchée dans les conféquences, qu'elle paroiffoit auftere dans fes principes, s'infinua dans la ville de Munster capitale de Weftphalie par la négligence du magiftrat. Les Luthériens s'y étoient introduits à main armée, & avoient contraint l'évêque feigneur fpirituel & temporel, & le chapitre compofé des plus anciennes maifons de Weftphalie, de leur ceder dans la ville fix églifes pour faire. le service divin fuivant leur nouvelle doctrine. Cette ceffion fe fit par un traité qui fut figné le quatorziéme de Février 1533.

CVII. Jean Matthieu &

des Anabaptiftes. Hift des Anabart.

en 1702.

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Mais ce traité n'empêcha pas les Anabaptistes de commettre bien des defordres, fous les aufpices de Jean Jean Becold chefs Matthieu & Jean Becold fon difciple. Jean Matthieu étoit un boulanger d'Harlem, qui après avoir impr. à Amfierd. gouté les opinions de Melchior Hoffman Suedois, Meshov, hiftoria dont on a parlé dans l'année précédente, quitta fa Anabaptist. l. 3. femme, parce qu'elle étoit laide, & époufa la fille d'un braffeur d'Amfterdam, qui dans la fuite devint l'épouse de Becold. Il étoit fort ignorant, mais au défaut de la fcience, il avoit un efprit rufé & entreprenant; il s'accredita fi bien dans le parti des Anabaptiftes, qu'après Hoffman & Tripmaker il fut leur évêque dans Embden. Il en fortit sur la nouvelle qu'il apprit qu'Hoffman avoit été arrêté à Strasbourg, & vint à Amfterdam; il y acquit quel

que reputation par le livre du rétablißement qu'il y AN. 1533. compofa, par toutes les erreurs qu'il y débita, & qui ne tendoient qu'à exterminer les puiffances & les magiftrats, pour y faire regner ceux de fa fecte: & pour faire recevoir ses pernicieuses maximes, tantôt il prenoit le nom de Moyfe,tantôt celui d'Enoch. Quand il fe vit en crédit, il affembla un fynode, fouffla fur ceux qui le compofoient comme pour leur donner fon efprit, & en choisit douze, à qui il donna le nom d'Apôtres, pour aller prêcher fa doctrine en diverses provinces. Ces douze en choifirent douze autres, & parcoururent la Zelande, le Brabant, la Hollande, la Frife, la province d'Utrecht, la Weftphalie, & beaucoup d'autres lieux qu'ils infecterent de leurs erreurs.

CVIII. Arrivée de Mat

à Munfter,

Sleidan, in comm. 1. 10. pag. 308. Raynald, ad hunc ann. n. 90.

Jean Matthieu inftruit de ces progrès, quitta Amthieu & de Becold fterdam, accompagné d'un grand nombre de fes difciples, & vint dans le mois de Décembre à Munster, trouver Jean Becold de Leyde tailleur d'habits, qui étoit arrivé depuis le vingt-quatriéme de Novembre avec Gerard autre Anabaptifte. Ces deux derniers s'y logerent fi fecretement, que le magiftrat n'en eut aucune connoiffance; & à peine y furent-ils arrivez, qu'ils firent des affemblées nocturnes, dans lefquelles ils enfeignoient leur doctrine, & rebaptifoient ceux qui la vouloient embraffer; mais quand Jean Mathieu parut,tous les Anabaptistes, qui étoient dans la ville, le reconnurent pour le grand prophéte, & dans le deffein d'augmenter leurs forces, afin de pouvoir fe rendre maîtres de la ville, ils firent partir les plus confidérables des leurs pour Ofnabrug, Wefel, Coetyel, Warendorp & d'autres endroits

avec des lsetres qui portoient qu'il étoit arrivé à
Munster un grand prophéte, envoyé de Dieu, pour
enseigner aux hommes le veritable chemin du falut
qu'il étoit rempli du Saint-Efprit, & qu'il prédiloit
des chofes merveilleufes. On vit auffi-tôt arriver dans
la ville un grand nombre d'hommes capables des plus
grands crimes, qui fe firent rebaptifer dans la feule
vûë de pouvoir vivre impunément dans le liberti-
nage. Jean Matthieu fe mit à la tête, avec Bernard
Rotman, Knipperdolling, Bécold & d'autres on
les vit tous courir par la ville, comme des furieux
& crier » Faites pénitence, & foyez rebaptisez, si-
» non la colere du Seigneur tombera fur vous, par-
» ce que fon jour approche.

AN. 1533

CIX Conferences

Anabaptistes &

sleidan. in comm. 1. 10. p. 306. &

307.

Les magiftrats qui virent leur ville expofée à la fureur de ces fanatiques, ordonnerent aux chefs Munster entre les de se retirer; mais ces furieux ne fortoient publique- is Luthériens. ment par une porte de la ville, que pour rentrer traveftis par une autre, publiant que Dieu leur avoit ordonné de demeurer & de travailler conftamment à établir leur doctrine.L'univerfité de Marpurg les condamna ; mais ils ne discontinuerent pas pour cela de prêcher toujours d'une maniere féditieuse. Le chef du magiftrat pour remedier à ce défordre, assembla les Anabaptistes dans la maison de ville, pour entrer en conference avec les théologiens Luthériens. La difpute roula fur la validité du baptême des enfans; & ceux-là ne voulant convenir de rien, 'on leur ordonna de fortir de la ville, & de n'y jamais rentrer. Hs se tinrent cachez & leur nombre s'augmentant tous les jours, on fut obligé de faire fermer tous les temples à l'exception d'un feul, de crainte qu'ils ne s'en renTome XXVII.

Bbb

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