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AN. 1528.

XLII.

Campege en

gleterre

vorce.

& tout ce que purent faire Gardiner, Fox & Cafali, fut d'obtenir un commiffaire qui fût agréable au roi. On en propofa plufieurs, tous cardinaux de beaucoup de mérite, & l'on s'arrêta à Laurent Campege qui étoit déja évêque de Salisbury. Le pape le nomma dès le Le cardinal mois d'Avril, & le joignit au cardinal Wolfey pour voyé en Anjuger l'affaire du divorce. Sa commiffion toutefois n'eft l'affaire du didu fixiéme de Juin, dattée d'Orviette. Campege vide Campeque fit tout ce qu'il pût pour se difpenfer de prendre un em-se par Carolus ploi fi délicat, qui le menaçoit ou de la colere de l'em-primée à Boupereur, ou de la haine du roi d'Angleterre. Pour excufer fon refus, il allégua qu'étant incommodé de la goutte, il ne pouvoit entreprendre un filong voyage, mais Wolfey lui fit tant d'inftances en le conjurant de ne point perdre de tems, & de fe prêter au besoin d'un royaume dans lequel il étoit déja évêque, qu'à la fin il accepta la commiffion.

im

logne 1581.

C'étoit un prélat recommandable par fa vertu, & par fa science, également agréable aux parties intéreffées. Il avoit déja été légat en Angleterre en 1519. pour y lever les décimes contre les Turcs; & il paffoit pour le plus fçavant canonifte de fon tems, & le plus habile dans les négociations. La France, qui le croyoit un peu attache à Charles V. ne fut pas bien aife de ce choix, appréhendant qu'il ne moyennât quelque accord entre l'empereur & Henri VIII. Auffi voit-on dans une lettre de Jean du Bellay, évê- cette lettre eff que de Bayonne, à M. le grand maître & maréchal parmi les pres de France dattée de Londres le dix-huitiéme de Juin re du divorce 1528. que cet évêque tâchoit de rendre Campege fuf- Grand, tom. pect au cardinal Wolfey, en lui faifant entendre que pag. 136. le pape en l'envoyant en Angleterre, tâchoit de con

ves de l'histoi

de Monfieur le

3. in douze

AN. 1528.

Belcarius lib.

Praful. Anglic.
Archiepif.Ebo

tenter & les Anglois & les Impériaux, & d'alonger les affaires fous prétexte de la goutte, dont ce cardi19. Geduvi de nal étoit incommodée. Cependant Campege fe difpo Pringle: fa à partir, & le pape lui remit une bulle favorable, Kac. n. 57. à ce qu'on dit fans preuves, à la cause du roi, en prenant toutes ses suretez pour empêcher que cette bulle ne fût jamais vûë, & qu'on ne pût s'en fervir pour la fin du procès. Il recommanda à ce nouveau légat fur tout de ne la faire voir qu'au roi, & à Wolfey, & de la brûler auffi-tôt. Ainfi on n'a jamais fçû précifément ce que contenoit cette bulle : les uns difent que le pape s'engageoit feulement de n'évoquer jamais la caufe à Rome, & de confirmer le jugement des légats les autres difent que cette bulle prononçoit la diffolution du mariage, en cas que les faits énoncez par le roi fuffent véritables au jugement des commiffaires. Ce dernier fentiment eft uniquement fondé fur ce que le roi d'Angleterre témoigna tant de fatisfaction de la bulle, & le pape tant de regret de l'avoir donnée, qu'il y a beaucoup d'apparence qu'elle étoit définitive.

XLIII.

cardinal

de cette

Mais pendant que Henri VIII. faifoit paroître tant Chagrin que de joye, le cardinal Wolfey étoit pénétré de chagrin ; Wolfey con- & plus l'affaire du divorce avançoit à Rome, plus fes affaire. frayeurs augmentoient, tant il étoit perfuadé que de quelque maniere qu'elle tournât, il étoit perdu. Un jour, foit qu'il eût quelques remords plus violens qu'à l'ordinaire, ou qu'il fût honteux de la passion du roi, ou qu'enfin il appréhendât qu'Anne de Boulen, étant fur le trône, ne fongeât qu'à le ruiner pour avancer fa propre famille; il alla trouver Henri, & lui représenta le tort qu'il faifoit à la répuration. Mais

ce

le

ce prince, qui jufqu'alors avoit eu tant de complai-
fance pour lui, le reçut fort mal, & depuis ce tems-là
Wolfey ne douta plus de fa disgrace : il eût bien vou-
lu fe retirer, s'il eût pû le faire avec fureté ; & quoique
pas lui parût glissant, il ne laiffa pas de commen-
cer à prendre ses mefures de loin; il fit bâtir
par tout,
& pour s'attirer l'amitié du peuple, il avança ses fon-
dations autant qu'il put : en même-tems il écrivit au
pape comme un homme qui fe croyoit abfolument
perdu, s'il n'avoit pitié de lui. Il écrivit à Cafali de
prier, de conjurer sa sainteté, de lui accorder une
bulle qu'il puiffe montrer au roi, & jure par tout ce
qu'il y a de plus faint, qu'elle ne fera vûë de perfonne;
qu'il ne prétend point s'en fervir pour le jugement du
procès, qu'il veut feulement par-là faire connoître au
roi, que fa fainteté eft véritablement dans fes intérêts,
qu'elle ne l'a point trompé, lorfqu'elle l'a affuré qu'elle
fera pour lui tout ce qui eft de l'étenduë de fa puissance.
Qu'il n'a que ce moyen pour conferver fon crédit au-
près de fon maître ; & que fi elle lui accorde cette gra-
ce, il employera tout, même fa propre vie pour la dé-
fense & la gloire de fa fainteté, & pour les avantages
du faint fiége,

AN. 1528.

1

Arrivée du

pege en Angle

terre.

Sanderus lib. 1. Guicciard

Comme le pape avoit de grandes obligations à XLIV. Wolfey, il voulut bien le fervir, fans toutefois s'aban-cardinal Camdonner entierement à lui, & c'est ce qui lui fit prendre les furetez dont on a parlé, en accordant cette bulle. Campege en fut donc chargé, & n'arriva en in lib. 19. Angleterre qu'au commencement d'Octobre, fort incommodé de la goutte, ayant avec lui son second fils Rodolphe, parce qu'il avoit été autrefois marié, dans le tems qu'il enfeignoit le droit à Padouë. Dès Tome XXVII.

F

*

AN. 1528. que ce cardinal fut arrivé, Wolfey qui vouloit faire de cette bulle un peu plus d'ufage qu'il ne difoit voulut l'engager à la faire voir à quelques-uns du confeil. Mais quand il fe vit preffé là-deffus, il dit, qu'il avoit des ordres très-exprès de ne la montrer qu'au roi & à Wolfey. Henri surpris & indigné d'un tel procédé en fit porter fes plaintes au pape, qui bien loin de blâmer le légat, répondit nettement, que Campege avoit fort bien fait de fuivre fes ordres; que puifque Wolfey vouloit abufer de fa bonté, il étoit fâché de lui avoir accordé cette grace; qu'il avoit encore fes lettres ; que Cafali & Gardiner fçavoient bien à quelles conditions il avoit donné cette bulle; qu'il feroit au défespoir qu'on la montrât à aucun des confeillers, qui pourroient fe laiffer furprendre & approuver une chofe qu'ils auroient crû mauvaise, que le péché ei retomberoit fur lui: que fa bulle avoit produit fon effet, & qu'elle devoit être brûlée; qu'il tiendroit conftamment ce qu'il avoit promis; que fi l'on pouvoit prouver ce qu'on avoit avancé, on n'avoit qu'à juger, & qu'il confirmeroit auffi-tôt la fentence favo rable au roi.

XLV.

Plusieurs autres révoquent en doute cette bulle On révoqueen du pape Clement VII. Voici comment en parle Mr. le

la bulle

du pape don- Grand, dans fon hiftoire du divorce.

«

Quelque

née à Campe

ge.
Le Grand hift
du divorce to-
me L. in douze

"

pag. 91.

99

idée qu'on fe forme du pape Clement VII. il est difficile de comprendre, comment on a pû croire fi long-tems qu'il ait donné une bulle qui caffat le mariage d'Henri VIII. & de Catherine d'Arragon. Car foit qu'il craignît d'offenser l'empereur, foit qu'il voulût ménager le roi d'Angleterre, il pouvoit pas prendre d'autre parti, que celui qu'il

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} prit, qui étoit de faire durer le procès ; & pour empê-
cher Henri de fe plaindre, de le prévenir, & de l'a-
vertir que s'il fuivoit la procedure ordinaire, il pour-
roit fe rebuter de toutes les longueurs qu'il trou-
veroit. Henri, comme on l'a vû, y étoit tout prépa-
» ré, & avoit déclaré qu'il attendroit bien quatre ou
cinq ans, ainfi il ne demanda pas d'abord qu'on
» caffat fon mariage, quoiqu'il en eût peut-être le def-
sein. Et lorfque Wolfey allarmé, pria le pape de lui
accorder une bulle qu'il pût montrer à ce prince,
il n'ofa pas lui faire une telle proposition. On a
les lettres de ce cardinal, & l'on y voit,
voit, auffi-bien
que dans celles de Cafali, que fi le pape avoit don-
né une bulle qui déclarât nul le mariage d'Henri
» & de Catherine, il auroit accordé plus qu'on ne
» lui auroit demandé. Or il n'avoit garde de le faire,
puifqu'il fe feroit mis en danger de n'être plus maî-
»tre de cette affaire, & qu'il auroit eu à craindre,
que le Roi d'Angleterre n'eût fuivi l'exemple de
Louis XII. qui ayant appris que Cefar Borgia,
» alors légat d'Alexandre VI. avoit une bulle qui
caffoit fon mariage avec Jeanne de France, ne vou-
» lut
pas voir cette bulle, & époufa fur l'heure Anne
de Bretagne, veuve de Charles VIII. Auffi des deux
bulles que l'on produit, l'une porte que le pape con-
firmera la fentence des légats, & qu'il n'évoquera
point la cause, qui étoit ce qu'Henri VIII. appré-
» hendoit, & l'autre permet à ce prince d'époufer tel-

99

99

le perfonne qu'il lui plaira, en cas que fon mariage » avec Catherine foit déclaré nul. Deforte que le pape » n'étoit engagé à rien par ces deux bulles,

dès que

les cardinaux refusoient de prononcer, & lui re

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AN. 1528.

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