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dans la Géométrie & la TrigonoméLettre fur trie. Par-là, il ne fera point facilePAgricul- ment trompé, ni ne fe trompera lui

ture.

même dans la mesure d'une pièce de terre. Il eft fouvent très-néceffaire d'en fçavoir la jufte continence comme lorfqu'on en fait l'acquifition, ou que l'on veut fçavoir le tems qu'elle coûtera à façonner, ou qu'il s'agit de déterminer la quantité de femence que l'on doit y jetter. De même dans la conftruction ou la réparation de fes bâtimens, il ne fera point expofé à faire des entreprises au-deffus de fes forces: entreprises dont les fuites font toujours fâcheufes, ou parce que les ouvrages reftent imparfaits, ou parce qu'ils épuifent fes finances, & le mettent hors d'état de fubvenir à d'autres befoins, & de parer à un accident imprévû: car dans une maison de campagne un peu confidérable, comme on trouve, journellement quelque gain à faire, de même il furvient toujours quelque perte à fupporter.

Le gouvernement des beftiaux n'eft point auffi fimple qu'on fe l'imagine. Chaque efpéce eft d'une nature par

ticuliere: elle a fa délicateffe & fa nourriture favorite; elle aime la pro- Lettre fur preté jufqu'à un certain dégré dans l'Agriculfon étable & dans fon fourage. L'Œ-ture. conome qui ignorera ces chofes, verra malgré fes foins dépérir fes troupeaux. Mais ce n'est pas tout: ils font fujets à des maladies auxquelles il faut remédier au plutôt, de peur qu'ils n'y fuccombent, ou que le mal ne fe communique. Souvent ils fe bleffent, & s'ils ne font point panfés diligemment, ils reftent eftropiés, maigriffent, & ne font plus aucun profit. Lorfque le fleau de la mortalité les attaque, il faut beaucoup de connoiffance pour en modérer le progrès; & ce n'eft l'ouvrage ni des ignorans, ni des gens fipés. Je fçais par moi-même que dans la mortalité qui ravagea la France en 1713, un gros troupeau de bêtes à cornes en fut préfervé, tant qu'il trouva au retour des champ's du creffon à paître dans les fontaines qui formoient les foffés du château, auquel il appartenoit. Cette herbe leur étoit fi falutaire qu'elles en mangerent jufqu'à la racine; de forte

dif

ture.

qu'il n'en revint plus, le mal gagna Lettre fur le troupeau, & l'on en perdit plus de l'Agricul- la moitié. Si l'on eût fait réflexion de bonne heure fur ce préfervatif que les animaux indiquoient eux-mêmes on leur en auroit défendu l'abord & fauchant le creffon par coupes réglées pour le leur diftribuer, on auroit donné au premier coupé le tems de repouffer, en forte qu'il auroit duré jufqu'à ce que la mortalité eût été paffée.

Tout le monde fçait que le cheval, dont le fervice eft fi utile & fi agréable, eft fujet à une infinité de maux. Ce n'eft pas une médiocre fcience que d'en connoître les perfections & les défauts, les maladies & les remédes qui leur conviennent. L'habile œconome ne peut fe difpenfer de fçavoir ces chofes, autant afin que perfonne ne lui en impofe, que parce qu'étant ordinairement éloigné des villes il lui eft impoffible, ou extrêmement couteux d'en tirer les fecours néceffaires, fur-tout lorfque les befoins font preffans. On conçoit aifément que cette derniere raifon l'oblige à avoir chez lui lesprincipaux

Lettre fur

remédes, & à entretenir une petite apoticairerie, non-feulement pour Agricul l'ufage de fon bétail, mais encore TNYE. pour celui de fes domeftiques, lorfqu'ils tombent malades ou qu'ils fe bleffent. Ainfi la Médecine & la Pharmacie lui doivent être connues, & fans approfondir ces Sciences, il convient qu'il en ait quelque chofe de plus qu'une légere teinture. Il doit fçavoir compofer lui-même des baumes, dont les recettes excellentes ne font point rares; il doit connoître les fimples que la terre produit dans fon canton; il doit fçavoir en tirer les vertus par les trois voies ordinaires, la digestion, la fermentation & la putréfaction enfin, il doit toujours avoir une provifion de remédes qu'il eft obligé de tirer des villes. C'eft une précaution qui emporte avec elle de grands avantages. Il ne fait fes achats qu'à fa commodité, & les tire des lieux les plus renommés; en les prenant dans leurs fources, il les a à meilleur compte & plus frais; & certain qu'ils ne font point falfifiés, il les trouve fous fa main dans le befoin. Le reméde bon en lui-même,

:

& appliqué fans délai redouble d'efLettre fur ficacité, & diffipe fans peine un mal PAgricul- naiffant que le tems auroit rendu dangereux, & qui auroit résisté au même reméde, dégradé par fraude ou par vieilleffe.

ture.

Telles font les connoiffances dont on doit être pourvû, pour régir un bien de campagne, auxquels on pourroit joindre encore celle de l'action de l'air & de l'eau fur les corps, & de la qualité des vents, de qui dépend la fertilité ou la ftérilité de la terre. Au refte, comme il n'eft pas néceffaire de les poffeder dans le plus éminent dégré, on les acquiert fans peine par la converfation, la lecture, l'expérience & la réflexion. Les gens habiles & âgés ont vû beaucoup de chofes, & l'on tire de leur entretien de grandes inftructions. Il faut avoir les meilleurs livres fur les matieres dont nous venons de parler; & fi l'étude que l'on en fait ne peut être fuivie, à caufe des distractions continuelles auxquelles on eft expofé, elle a cet avantage ineftimable, que l'expérience à chaque pas lui prête fon flambeau pour réfoudre les doutes,

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