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nos intérêts, voulût, ainfi que je le fouhaite, achever fon ouvrage; vous pourriez tout dans le trouble d'une révolution fubite, pourvu que vous fuffiez à portée de vous en prévaloir. Mais n'ayant rien d'arrêté, ni dans vos préparatifs, ni dans vos projets; quand même d'heureufes conjonctures vous ouvriroient actuellement les portes d'Amphipolis, vous n'y entreriez pas.

Je n'infifte donc pas davantage fur la néceffité où nous fommes tous, & dont je vous crois pleinement convaincus, de nous tenir prêts à bien faire' dans l'occafion.

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Mais, quels doivent être nos préparatifs Que nous faut-il de troupes ? Quels fubfides pour les faire fubfifter ? Quels moyens en un mot, avons-nous à prendre & les plus prompts & les plus sûrs ? J'entrerai dans ce détail, après vous avoir demandé une grâce, qui eft, ATHENIENS, que pour vous déterminer fur ce que j'ai à dire, vous attendiez que j'aye tout dit. Jufques-là fufpendez votre jugement, & fi je vous parois d'abord exiger de nouveaux apprêts, ne croyez point que par-là j'éloigne la décifion des affaires.

Je n'approuve pas, il est vrai, la précipitation de ceux qui veulent que promptement, à l'inftant même, on marche à l'ennemi. Car nos forces, dans l'état où elles font, ne nous le permettent pas. Mais à quoi préfentement un Orateur doit s'attacher, c'eft à vous faire entendre ce qu'il vous faut de troupes, la qualité dont il vous les faut, & les moyens de fournir à leur entretien, jufqu'à ce que nous ayons, ou fait une paix avantageufe, ou remporté une pleine victoire, & mis d'une ou d'autre façon Athènes en sûreté pour jamais. Or voilà ce que porte mon avis. Permis à qui voudra, d'en ouvrir un autre. Pour moi je promets beaucoup le détail va faire voir fi c'eft fans fondement vous en ferez juges.

Premièrement je dis ATHENIENS, qu'il faut armer cinquante galères, & vous réfoudre à les monter en perfonne, quand il fera temps. Que de plus il faut pour la moitié de votre cavalerie, un nombre fuffifant d'autres navires : & que tout cela foit toujours à portée de s'opposer aux irruptions foudaines, que Philippe a coutume de faire aux Thermopyles, dans la Cherfonèfe, à Olynthe, par-tout où il veut. Car mettons - lui bien cette idée

dans l'efprit, que nous fortons de notre affoupiffement; & que, comme autrefois dans l'Eubée, à Haliarte, & depuis peu encore aux Thermopyles, il va, peutêtre, nous voir fondre fur lui.

Quand même vous en feriez moins que je ne dis; votre appareil de guerre ne laiffera pas d'avoir fon utilité, en ce que l'ennemi venant à l'apprendre ( & il l'apprendra exactemenr, car il n'a parmi nous il n'a que trop d'émiffaires) venant, dis-je, à l'apprendre, ou il en aura une peur capable de le tenir dans le devoir; ou s'il n'en fait nul cas, vous irez par mer à la premiere occafion, fans qu'aucun obftacle vous arrête, le furprendre en Macédoine.

Outre les préparatifs, dont je viens de parler, & dont il faut que vous approuviez le plan vous avez besoin de troupes, que vous puiffiez avoir toujours à la main, pour harceler l'ennemi fans relâche. Je ne veux pour cela, ni dix mille, ni vingt mille étrangers. Point de ces grandes (8) armées en papier. Je de

(8) Il y a dans le Grec ἐπιςολιμαίες, δυνά peis, & M. de Toureil dit que dans tout Démofthène il n'y a point d'endroit, qui exerce plus les commentateurs, que celui-ci. On peut

mande des Troupes compofées d'Athéniens qui dépendent abfolument, ou d'un feuf Chef, ou de plufieurs, à votre choix; & que vous ayez foin de fournir à leur fubfiftance.

Mais de quelle efpèce faut-il ces Troupes ? En quel nombre ? Comment les faire fubfifter? Je répondrai à tout, & par ordre.

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voir dans les Remarques de ce favant Traducteur les quatre différentes manieres dont Pollux, Phavorin, Wolfius, & Henri Eftienne ont expliqué cet ἐπιςολιμαίες. Pour moi, fans autre fineffe je m'attache à une expreffion fimple, qui me paroît aller droit à la pensée de Démosthène, & faire fentir le ridicule amèr qu'il a prétendu y jetter. Athènes dans un befoin, écrivoit de tous côtés pour avoir des foldats, on lui répondoit qu'ici on lui en fourniroit tel nombre, là tel nombre mais à la fin il fe trouvoit que ce n'étoient point des hommes effectifs. Il y avoit beaucoup à rabattre du nombre promis, & d'autant plus qu'Athènes comme on le voit par cette harangue, ne payoit point ces étrangers, ou les payoit mal. Ainfi ces grandes armées n'étoient complètes que dans les lettres écrites pour les demander d'une part, & pour les promettre de l'autre. Voilà ou je me trompe fort, ce que Démosthène appelle duvausis, ETISOλpairs, des armées qui n'exiflent qu'en papier.

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Pour ce qui eft donc des (9) étrangers à enrôler, ne retombez pas dans une faute, qui fouvent vous a nui. C'est d'aller toujours au-delà du néceffaire. Une magnificence outrée dans vos décrets mais l'exécution nulle. Il vaut mieux commencer par peu; & quand on voit que ce peu ne fuffit pas, y ajouter.

Or je dis qu'en tout il vous faut deux mille hommes de pied: dont cinq cents feront Athéniens, que vous prendrez d'un âge (1) fortable, & que vous engagerez pour un certain temps, non pas bien long, mais limité comme vous le jugerez convenir; après quoi d'autres les remplaceront.

(9) On appelloit Etranger à Athènes, tout ce qui n'étoit point de l'Attique même : & Barbare, tout ce qui n'étoit point Grec.

(1) Par une loi de Solon, mais qui n'étoit plus en vigueur du temps de Démosthène aucun citoyen n'étoit exempt du fervice. Il étoit d'abord employé fur les côtes de l'Attique, depuis l'âge de dix-huit ans jufques à vingt: & après il alloit fervir au loin. Quant au temps où il avoit droit de quitter, plufieurs auteurs le fixent à quarante ans. Tout citoyen, au refte, lorfqu'il entroit au fervice, devoit prêter ferment de fidélité. On peut en voir la formule dans l'Onomafticon de Pollux, liv. 8, chap. 9.

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