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long-temps auparavant, chacun fait qui eft prépofé dans la Tribu, & fur les Muficiens & fur les Athlètes : quand, par les mains de qui, & combien un Acteur doit toucher, & ce qu'il doit faire. Tout a été prévu, tout a été réglé avec foin. Mais pour vos armements, point (2) de règle, point de loi, point d'ordre. Au premier bruit de quelque mouvement, on établit des (3) Armateurs, on

(2) Voici le Grec, άτακτα, ἀόρισα, ἀδιόρ Φωτά άπαντα, οἱ il eft aifé de remarquer ce fréquent concours de Voyelles ; & qui plus est, de la même Voyelle, la plus fonore de toutes. Je ne pouvois faire que de vains efforts pour l'imiter en notre langue. Mais pour fe mettre plus au fait, on peut confulter Victorius, Var. Lect. XVIII, 12.

(3) Je rends ainfi renpapxes, parce qu'en effer ces Triérarques étoient des particuliers, que la République, dans certains cas, obligeoit d'armer une galère à leurs dépens. On jetoit pour cela les yeux fur les citoyens eftimés les plus riches. Mais ce qu'il y avoit de fingulier, c'est que le citoyen nommé pour être du nombre des Triérarques, pouvoit offrir d'échanger fes biens contre ceux d'un autre citoyen, qu'il prétendoit être plus riche que lui, & plus en état, par conféquent, de foutenir les frais néceffaires. Auquel cas ce dernier étoit obligé ou d'accepter l'échange d'armer à fes dépens. Voilà ce qu'entend Dé

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ou

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leur fouffre de propofer des échanges on rêve aux moyens de trouver des fonds. Enfuite on fait un Décret pour obliger les étrangers & les affranchis à s'embarquer; & s'ils ne fuffifent pas, on y fupplée par des citoyens. Pendant tous ces délais, les places que vous alliez fecourir, font prifes. On a perdu en préparatifs, le temps où il falloit agir. Car l'occafion, & c'est elle qui décide ne confulte point notre lenteur. Vous comptiez fur le fuccès de vos foldats; & les conjonctures qu'ils trouvent en arrivant, leur font fentir qu'ils ne peuvent rien.

Auffi voit-on que Philippe, dans une lettre qu'il écrit aux Eubéens, vous traite avec le dernier mépris.

[ Ici Démosthène fait lire cette lettre; qui n'eft point venue jufqu'à nous & il continue enfuite fon difcours. ]

mofthène par ces mots : On leur fouffre de propofer des échanges, avridboεis. Il eft vrai que dans l'intention de Solon, cette loi étoit fage; car elle mettoit les plus riches dans la néceffité dle porter les charges publiques. Mais dans la pratique, elle tiroit à conféquence, parce que les difputes qui naiffoient au fujet de ces échanges, retardoient à contre-temps le fervice de l'Etat.

Vous ne vous êtes que trop attiré une partie de ces outrages, dont il vous eft dur, ATHÉNIENS, d'entendre le récit. A la vérité, fi de fupprimer des chofes attriftantes, c'étoit faire qu'elles ne fuffent pas, nous ne devrions nous étudier qu'à plaire dans nos difcours. Mais fi c'eft réellement vous perdre, que de vous flatter à contre-temps, il vous eft honteux, ATHENIENS, d'aimer à être féduits, de reculer toute opération néceffaire, fous prétexe qu'elle ne vous eft pas agréable; & de ne vouloir pas comprendre qu'à la guerre il faut, non point fe laiffer commander aux événements mais les prévenir. Que comme un Général marche à la tête de fes troupes, auffi de fages Politiques doivent-ils marcher, fi jofe ainfi dire, à la tête des affaires; en forte qu'ils n'attendent pas l'événement , pour favoir quelles mefures ils ont à prendre; mais que les mefures qu'il ont prifes, amènent l'événe

ment.

Vous êtes, ATHENIENS, les plus forts de tous les Grecs en vaiffeaux, en cavalerie, en infanterie, en revenus; & vous ne favez vous prévaloir de rien à propos.

Vous faites dans vos guerres avec Philippe, comme fait un Barbare, quand il lutte. S'il reçoit un coup, il y porte auffi-tôt la main. Le frappe-t-on ailleurs ? Il y porte la main encore. Mais de parer le coup qu'on lui destine, ou de prévenir fon antagoniste, il n'en a pas l'adreffe, & même il n'y penfe pas. Vous pareillement, fi vous entendez dire que Philippe s'eft jeté fur la Cherfonèle vous y envoyez du fecours : s'il eft aux Thermopyles, vous y courez s'il tourne de quelque autre côté, vous le fuivez, à droite, à gauche, comme fi vous étiez à fes ordres. Jamais de projet arrêté, jamais de précaution. Vous attendez qu'une mauvaise nouvelle vous mette

en mouvement.

Autrefois, peut-être

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vous pouviez fans rifque vous gouverner ainfi, mais le moment décifif eft venu; il faut une autre conduite.

Pour moi, ATHENIENS, je me perfuade que cette humeur inquiète, qui dévore Philippe, lui eft inspirée par quelque Dieu fenfible à notre honte. Car fi, content de ce qu'il a envahi, Philippe devoit s'en tenir là, & renoncer à de nouveaux projets quelques-uns de

vous, ou je me trompe fort, confentiroient à oublier qu'il nous a couverts d'ignominie, & que nous fommes l'opprobre des Grecs. Mais heureusement rien ne l'affouvit, fon ambition croît toujours, & peut-être vous reveillera-t-il enfin, à moins que vous ne vous foyez entiérement livrés au défespoir.

On ne penfe point, & c'eft ce que j'admire, on ne s'indigne point de voir qu'une guerre commencée pour nous venger des outrages que Philippe nous a faits fe termine par fouhaiter qu'il

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il ne

ceffe de nous en faire. Mais non ceffera pas, s'il n'y eft contraint. Et nous attendrons tranquilement? Vous croirez que tout ira bien " pourvu que vous faffiez partir des galères vides, & qu'un téméraire vous réponde du fuccès ? Nous ne nous embarquerons pas ? Il n'y aura pas de nos citoyens qui prennent les armes, & qui par leur préfence animent enfin l'étranger? Notre flotte ne defcendra pas chez l'ennemi ?

Par où l'aborder dira-t-on Hé la guerre, ATHENIENS, la guerre ellemême (4) vous en découvrira les endroits foibles, fi vous les cherchez.

(4) Voyez encore ici Longin, ch. X VI.

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