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le genic embraffoit tout, l'envoyoit chercher fouvent, & il a dit plufieurs fois qu'il ne pouvoit s'empêcher de prendre pour vrai ce qui lui étoit expliqué fi nettement.

Sa réputation alla jufque dans les Païs étrangers lui faire des amis élevés aux plus grandes places. Tel étoit M. le Duc d'Efcalone, Grand d'Efpagne, aujourd'hui Viceroi de Naples. Ce Seigneur, plus curieux & plus touché des Sciences que ne l'eft jufqu'ici le refte de fa Nation, avoit pris pour lui une eftime finguliere fur fon Siftême général qu'il avoit étudié avec beaucoup de foin; & quand à la Journée du Ter (en 1694) où il commandoit l'Armée Efpagnole, fes Equipages furent pris par I'Armée victorieufe de M. le Maréchal de Noailles, il ne lui envoya redemander que les Commentaires de Cefar, & le Livre de M. Regis, qui étoient dans fa caffette. M. le Comte de Sant-Eftevant de Gormás fon fils étant venu en France en 1706, il alla voir le Philofophe par ordre de fon ordre de fon pere, & après la premiere vifite, ce ne fut plus par obéiffance qu'il lui en rendit. M. le Duc d'Albe, Ambaffadeur de S. M, Catho

lique, lui a fait le même honneur à la priere de M. le Vice-Roi de Naples. Les mœurs de M. Regis étoient telles que l'étude de la Philofophie les peut former, quand elle ne trouve pas trop de résistance du côté de la nature. Les occafions qu'il a euës par rapport à la fortune, lui ont été auffi peu utiles qu'elles le devoient être; une grande eftime & une amitié fort vive que le feu P. Ferrier Confeffeur du Roi avoit prife pour lui à Toulouse pendant fes Conferences, ne lui valurent qu'une très-modique penfion fur la Preceptoriale d'Aigues-Mortes. Quoiqu'il fût accoutumé à inftruire, fa converfation n'en étoit pas plus imperieufe, mais elle étoit plus facile & plus fimple, parce qu'il étoit accoûtumé à fe proportionner à tout le monde. Son fçavoir ne l'avoit pas rendu dédaigneux pour les Ignorans; & en effet on l'eft ordinairement d'autant moins à leur égard, que l'on fçait davantage, car on en fçait mieux combien on leur reffemble encore.

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EBASTIEN LE PRESTRE, Chevalier, Seigneur de Vauban, Bafoches, Pierre-Pertuis, Pouilly, Cervon, la Chaume, Epiry, le Creufet, & autres lieux, Maréchal de France, Chevalier des Ordres du Roi, Commiffaire General des Fortifications, Grand-Croix de F'Ordre de S: Louis, & Gouverneur de la Citadelle de Lille, nâquit le premier jour de Mai 1633, d'Urbain le Prêtre, & d'Aimée de Carmagnol. Sa famille eft d'une bonne Nobleffe du Nivernois, & elle poffede la Seigneurie de Vauban depuis plus de 250 ans.

Son Pere qui n'étoit qu'un Cadet, & qui de plus s'étoit ruïné dans le fervice, ne lui laiffa qu'une bonne éducation, & un Moufquet. A l'âge de 17 ans, c'està-dire en 1651, il entra dans le Regiment de Condé, Compagnie d'Arce

nai. Alors feu M. le Prince étoit dans le parti des Efpagnols.

Les premieres Places fortifiées qu'il vit le firent Ingenieur, par l'envie qu'elles lui donnerent de le devenir. Il fe mit à étudier avec ardeur la Geometrie, & principalement la Trigonometrie, & le Toifé, & dès l'an 1632 il fut employé aux Fortifications de Clermont en Lorraine. La même année il fervit au premier Siége de Sainte-Menehout, où il fit quelques logemens, & paffa une riviere à nage fous le feu des Ennemis pendant l'affaut, action qui lui attira de fes Superieurs beaucoup de loüanges & de careffes.

En 1653 il fut pris par un Parti François. M. le Cardinal Mazarin le crut digne dès-lors qu'il tâchât de l'engager au Service du Roi, & il n'eut pas de peine à réüffir avec un Homme, né le plus fidéle Sujet du monde. En cette même année, M. de Vauban fervit d'Ingenieur en fecond fous le Chevalier de Clerville au fecond Siége de SainteMenehout, qui fut reprise par le Roi, & enfuite il fut chargé du foin de faire réparer les Fortifications de la Place. Dans les années fuivantes, il fit les Tome V.

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fonctions d'Ingenieur aux Siéges de Stenai, de Clermont, de Landrecy, de Condé, de Saint-Guilain, de Valenciennes. Il fut dangereusement bleffé à Stenai, & à Valenciennes, & n'en fervit prefque pas moins. Il reçut encore trois bleffures au Siége de Montmedi en 1657; & comme la Gazette en parla, on apprit dans fon Pais ce qu'il étoit devenu, car depuis fix ans qu'il en étoit parti, il n'y étoit point retourné, & n'y avoit écrit à perfonne, & ce fut-là la feule maniere dont il y donna de fes nouvelles.

M. le Maréchal de la Ferté, fous qui il fervoit alors, & qui l'année précedente lui avoit fait prefent d'une Compagnie dans fon Regiment, lui en donna encore une dans un autre Regiment, pour lui tenir lieu de penfion, & lui prédit hautement que fi la Guerre pouvoit l'épargner, il parviendroit aux premieres Dignités.

En 1658 il conduifit en Chef les attaques des Siéges de Gravelines, d'Ypres, & d'Oudenarde. M. le Cardinal Mazarin, qui n'accordoit pas les gratifications fans fujet, lui en donna une affés honnête, & l'accompagna de

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