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Ecclei.2.

21.

X V.

Il est avantageux d'ignorer ce que Dieu ne veut pas que nous connoiffions.

Es perfonnes qui font ainfi trouLblées de agitées, auroient déja

beaucoup avancé vers la paix, fi elles étoient bien perfuadées que cette clarté & cette affurance, dont ils ont un defir fecret, ne leur feroit pas un bien. Il leur eft infiniment plus avantageux de s'abandonner à Dieu, de lui remettre le foin d'eux-mêmes, de lui demander feulement ce qu'il fçait être plus utile à leur falut, & de fe réfoudre en même-tems à marcher courageufement dans ces tenebres jufqu'à la fin de leur vie, fans tourner les yeux vers eux-mêmes, & fans jamais fe défier des mifericordes de Dieu, de quelque trifte imagination & de quelque vain phantôme dont il permet qu'ils foient agitez; c'eft auffi ce que l'Ecriture nous enfeigne par ces paroles; Ceux qui craignent le Seigneur

gardent fes commandemens, & ils confervent la patience jufques à ce qu'il faffe le difcernement de leurs

œuvres.

XVI.

Ne pas chercher à changer fon état, mais travailler à faire la volonté de Dieu dans l'état où nous fommes.

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Ls doivent donc employer tous leurs efforts non pas à changer leur état interieur, mais à connoître & à faire ce que Dieu leur ordonne dans cet état; non pas à n'être plus. fujets aux troubles, mais à fouffrir avec patience tout le bruit que font leurs troubles : & c'est ce qui les oblige de diftinguer l'état des tenebres où Dieu les laiffe, des peines & des inquiétudes qu'ils en reffentent. Car l'état en foi vient de Dieu : c'est un ef fet ou de fa justice ou de fa mifericorde, & peut-être de l'une & de l'autre, fans qu'on le puiffe jamais fçavoir précifément. Mais les inquiétudes & les peines qu'ils fe donnent enfuite

par

&

trop de réflexions fur eux-mêmes, ne viennent point de Dieu; c'eft l'amour propre qui les produit ce que Dieu demande de ceux qui font en cet état, eft qu'ils travaillent de toute leur force à calmer leur inquiétude, & qu'ils embraffent avec fidélité les moyens qu'on leur donne pour s'en délivrer.

XVII.

Cet état peut être accompagné de beaucoup de vertus.

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Left très-important à ces perfonnes de féparer ce qui eft volontai te dans leur état, de ce qui ne l'eft pas. Ils ne peuvent pas empêcher que la connoiffance de leurs tenebres & de leur foibleffe ne remuë leur imagination, & ne leur rempliffe l'efprit de peine, de trifteffe, d'accablement, de défiance & de découragement. Ils ne doivent pas laiffer entrer ces fortes de penfées dans leur cœur, & fi elles y entrent comme malgré eux, ils n'y doivent pas confentir ni en laiffer ébranler leur foi, leur efperance &

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leur confiance en Dieu, pourin'ajouter point de trouble & d'inquiétude volontaires à celles qu'ils fouffrent contre leur defir. Ils doivent au contraire tâcher de les calmer & de les appaifer, en fe réprefentant vivement les graces que Jefus-Chrift leur a déja faites, & celles que la foi leur commande d'efperer.

XVIII.

Les convaincre par quelques exemples.

L ne faut pour les convaincre de ces veritez, & pour les faire entrer dans ces pratiques, que les obliger à faire réflexion fur l'état de plufieurs perfonnes qui éprouvent les mêmes peines, & qui vivent très-faintement. Il ne faut pas qu'ils s'imaginent que cette difpofition où ils fe trouvent foit fort rare & fort extraordinaire. La plûpart des chrétiens, & de ceux mêmes qui font plus à Dieu, ne voyent le plus fouvent que tenebres dans leur intérieur; & lorfqu'ils fondent leur cœur, ils n'y découvrent rien de fain.

Ils ne peuvent diftinguer fi les mou yemens qu'ils fentent viennent de la nature ou de la grace, de leur propre efprit, ou de l'efprit de Dieu. Leurs meilleures réfolutions font traversées par des vûes fecrétes d'amour propre & d'interêt: & il leur femble que le levain de leur orgueil fe mêle dans tout ce qu'ils font de meilleur. Ils ne diftinguent point par quel principe ils agiffent, & n'ont aucune marque fenfible de la rémiffion de leurs pechez. Cependant il y en a un grand nombre qui ne font ni inquiétez, ni peinez, parce qu'ils retiennent leur efprit & l'empêchent de s'abandonner aux réflexions qui s'y préfentent, & qu'ils reglent tellement leur imagination qu'elle n'a pas l'habitude de leur fournir ces triftes objets; enfin ils tâchent de s'occuper d'autres vûes, qui leur ôtent celles qui les pourroient le plus troubler.

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