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tre notre ame dans l'équilibre, qui la tienne entre la préfomption & l'abbatement. Ainfi lorfque la vûë de la justice devient plus forte par la difpofition de notre efprit, & qu'elle emporteroit la balance nous devons tourner nos penfées du côté de la mifericorde & on ne doit pas craindre, de donner lieu à la préfomption par ce regard, puifqu'on ne s'y porte qu'en fuivant les regles de la prudence chrétienne.

Il eft certain que les hommes ne comprennent pas moins imparfaitement la mifericorde de Dieu que fa juftice, & qu'ils ne la deshonorent pas moins par les fauffes idées qu'ils s'en forment. Il leur femble quelquefois que leurs pechez font capables de l'épuifer, qu'ainfi il n'y en a plus pour eux ; que leur corruption eft d'une nature differente de celle des autres, mérite que Dieu les traite avec plus de rigueur. De-là, fans qu'ils y penfent,ils font dépendre la grace de Dieu de la diverfité des pechez, & ils attribuent les effets differens de fa mifericorde aux differentes qualitez des hom mes. Mais comme cette idée eft trèsfaufle & très-injurieuse à Dieu, on la doit

&

doit regarder comme une illufion trèsdangereufe. Ainfi, quelques grands que foient nos pechez, nous ne devons point douter que la mifericorde de Dieu ne foit infiniment plus grande; & quand avec les nôtres nous ferions encore chargez de ceux de tous les hommes, ils feroient moins en comparaifon, qu'une goutte d'eau au regard d'une mer qui n'a point de bornes, telle qu'eft la mifericorde de Dieu. Perfonne ne peut donc s'imaginer avec raifon qu'il en foit exclus puifque ce n'est jamais en nous que Dieu trouve ce qui le porte à nous fecourir; mais en lui-même, c'est-àdire, en fa bonté infinie & dans fa volonté, par laquelle il difpofe de tout comme il lui plaît.

XXVII.

Exemples de la mifericorde de Dieu envers les pecheurs.

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Efus-Chrift pour notre confolation, nous a voulu donner des preuves évidentes de cette verité dans l'Evan

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17.

9. 12.

Marc. 2. gile. Car on y voit que c'eft fur les plus grands pecheurs qu'il a répandu fes graces avec plus d'abondance, & Matth. qu'il eft venu pour guérir les malades les plus défefperez. Il a remis les criJoan. 8. mes d'une femme adultere, d'une Chananée, c'est-à-dire, d'une payenne, Matth. qui a méritée, en s'humiliant, d'obte nir de lui tout ce qu'elle defiroit. Plufieurs pechez ont été remis à une pechereffe, parce qu'elle a beaucoup aimé. Il a promis fon paradis à un voLuc. 23. leur public, & donné fa paix à faint Joan. 14. Pierre, fans lui avoir fait aucun re27.20.21. proche de fon infidelité.

IS. 22.

Luc. 7.

48.

43.

XXVIII.

S'humilier beaucoap dans les troubles; & nous dire à nous-mêmes ce que nous dirions à nos freres, s'ils étoient en cet état.

M

Ettons-nous à la bonne heure en la derniere place, & au-deffous de tous les pecheurs croyonsnous les plus criminels de tous les hommes.Cette pensée ne fçauroit que nous

être utile, pourvû qu'elle ne nous décourage point, & qu'elle ne nous empêche pas de recourir avec confiance à Jefus Chrift. Puifqu'il eft un medecin tout-puiffant, efperons qu'il guérira nos maladies quelques grandes qu'elles foient. Demandons-lui qu'il lave nos pechez dans le fang qu'il a répandu pour nous, & ne doutons point qu'il ne nous accorde notre demande. Car c'eft à tout le monde qu'il dit : Demandez, & il vous fera donné; Matth, cherchez, & vous trouverez; frappez 7·7· à la porte, & on vous ouvrira. Prefentons-nous donc à Dieu avec confiance; & pour nous y encourager, difons-nous à nous-mêmes ce que la charité nous obligeroit de dire à celui de nos freres qui feroit en l'état où nous fommes. Prenons enfuite les con

feils que nous voudrions qu'il prît. II y a un exemple dans la vie des Peres, d'un folitaire qui fut entierement foulagé de fes peines par ce moyen. Quelqu'un fort defolé eut recours à lui, & lui témoigna fon extrême affliction qu'il regardoit comme un terrible jugement de Dieu. Il l'exhorta à ne s'arrêter pas à fes propres fentimens, & à croire que quelques grands que fuf

fent fes pechez, la mifericorde de Dieu
étoit infiniment plus grande mais
cette perfonne réfiftoit à fon avis, en
lui repliquant que fi on pénetroit le
fonds de fon cœur, on verroit que
fes pechez étoient tout autrement hor-

ribles que ceux des autres; qu'il con-
noiffoit trop bien fon indignité, pour
penfer que Dieu le pût fouffrir en fa
préfence. En un mot, il difoit à ce fo-
litaire, toutes les mêmes chofes que
le folitaire s'imaginoit voir lui-mê-
me dans fon propre cœur, & toutes
les mêmes raifons qui l'empêchoient
auffi d'efperer la grace & la paix de
Jefus-Chrift. Or comme le ferviteur
de Dieu étoit convaincu que la per-
fonne qui s'adreffoit à lui n'avoit
pour guérir de fes maux, qu'à les re-
garder comme des tentations, & à ne
s'y point arrêter ; il s'en perfuada tout
le premier, & il fe réfolut de pren-
dre pour lui-même, les avis que
lui avoit infpirez pour le foulagement
de fon prochain.

Dieu

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