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CHAPITRE IV.

L'attention à la loi de Dieu éclai re nos tenebres; & la pratique des vertus les imprime peu à peu dans

notre cœur

ne

So I nous avons toujours, autant que nous le pouvons, la loi éternelle préfente à nos yeux, fi nous la méditons jour & nuit; fi nous fommes attentifs à toutes les veritez qui nous enfeignent nos devoirs, fi nous ceffons point d'écouter la parole de Dieu, & de lui obéir; fi nous tâchons autant qu'il nous eft poffible de regler nos actions fur les lumieres du ciel, nous ferons entrer peu à peu ces lumieres, ces veritez, ces loix éternelles dans le fond de notre cœur. En nous humiliant, nous deviendrons humbles; en mortifiant nos fens, notre efprit deviendra mortifié ; en gardant le filence exterieur, nous reduirons nos paffions à fe taire, & à nous laiffer en repos ; en nous abftenant de toutes les actions qui nous font déTome I. Tt

fendues, nous en ferons mourir en nous les racines.

C'est ainsi que l'homme interieur Le forme & croît, felon les difpofitions que prend l'homme exterieur. Peu à peu nos paffions, quelques violentes qu'elles foient, fe ralentiffent s'appaifent & meurent, lorfqu'on empêche qu'elles n'agiffent. On ceffe d'être colere, avare, ambitieux, quand on veille tellement fur fes actions, qu'on ne s'en permet aucune de celles qui font conformes aux defirs de fon cœur ; & enfin ces defirs aufquels on n'obéit plus, fe diffipent & nous laiffent jouir d'un parfait repos.

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CHAPITRE V.

Combien la crainte chrétienne eft utils pour nous conduire à la penitence, pour arrêter le cours de nos pechez,& pour nous en faire gemir.

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Uand nous agiffons par des vûës toutes humaines nous craignons mille chofes qu'il n'y a point de raifon de craindre. Nous

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craignons les afflictions, les pertes, les humiliations,les mépris, la pauvreté, les maladies, qui ne font pas des maux, ou qui font des maux qui ne durent qu'un moment. Mais fi nous craignons Dieu comme il faut cette crainte nous délivrera de toutes les autres craintes. Nous ne craindrons Lue. Ia. plus que le fouverain juge, qui nonfeulement peut faire mourir notre corps qui eft condamné à la mort dès fa naiffance, mais qui peut jetter notre ame dans l'enfer. Nous devons craindre les crimes qui irritent Dieu contre nous; nous devons craindre de mourir dans l'impenitence: nous devons craindre les moindres pechez, parce qu'ils peuvent être les commencemens des plus grands défordres : nous devons craindre de corps de corruption dont nous fommes revêtus : puifque la feule crainte chrétienne peut empêcher qu'il ne produife continuellement de nouveaux pe

chez.

2. Si la crainte ne peut pas changer ni convertir entierement notre cœur, elle ne laiffe pas de nous être très-utile: elle arrête l'action du ché, elle affoiblit notre convoitife,

pe

& elle l'empêche de produire de mauvais fruits au dehors. C'est ce que nous enfeigne l'Ecriture, quand elle affure que fi nous nous fouvenions toujours de la mort & des fuites de la mort, nous ne pecherions jamais. Si nous voyions à toute heure le dernier jugement auffi proche de nous qu'il l'eft en effet; l'ambition, l'avarice, la vanité, l'efprit du monde ne nous engageroient jamais dans les affaires du fiecle, qui ne fervent qu'à nous rendre plus méchans & plus miferables. David femble nous reprefenter parfaitement les effets de la crainte de Dieu par ces paroles: Confige timore tuo carnes meas: à judiciis enim tuïs timui. Ce prophete demande à Dieu que parce qu'il a eu une jufte crainte de fes jugemens, fa chair & la com voitife de fa chair demeurent liées & attachées ; c'est-à-dire qu'elles foient dans l'impuiffance de produire des fruits de peché. Si une vive crainte nous fait apprehender les tourmens éternels plus que toutes chofes; cette crainte fera comme une croix où nos paffions feront crucifiées; en forte que fi elles ne font pas encore mortes elles feront au moins enchaînées captives.

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3. Un autre effet de la crainte, c'est qu'elle nous fait gemir, de ce qui faifoit autrefois notre plaifir & notre joie. Le demon, pour porter au peché, ý mêle tant qu'il peut d'agrément & de douceur; car il fait que nous nous portons toujours à faire ce qui nous plaît davantage. En effet, les gens de monde ne commettent tant d'injuftices, de crimes, de défordres, que parce qu'ils y trouvent quelque chofe qui contente & qui fatisfait leurs defirs mais la crainte de Dieu, quand elle eft animée de la foi, ruine toutes ces fauffes fatisfactions. Elle nous ouvre des yeux, & elle nous fait voir que les fupplices, le defefpoir, la mort éternelle, font des fuites naturelles du peché; que ces terribles punitions qui font dûes aux pecheurs, commen→ cent dès cette vie ; & que tous ceux qui s'attachent aux creatures par des affections déreglées, deviennent neceffairement miferables, aveugles', fourds, efclaves & infenfez. C'eft ce qui oblige les pecheurs, qui le voyent déja dans ces miferes, & qui en craignent encore de plus grandes, de gemir, de s'affliger, de s'humilier, de fe repentir de leurs defordres, dans

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