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en connoiffons eft fi étrange que nous ne le faurions regarder fans perdre en quelque forte toute efperance, fi la main de Dieu même ne nous foûtient. Que fi l'on ajoûte à cela, qu'outre nos tenebres interieures nous marchons dans un lieu plein de pieges & d'embuches; que nous fommes de toute part environnés de précipices, & dans la neceffité de veiller continuellement fur nous-mêmes, pour combattre des ennemis qui ne fe laffent jamais de nous attaquer, n'avons-nous pas fujet de gémir & de nous écrier avec l'apôtre: Qui me délivrera de tant de périls, de miferes & de morts? Je fai que la feule grace de JefusChrift peut produire ces effets; mais il faut auparavant que nous ouvrions notre cœur à fes miniftres, afin qu'ils y entrent le flambeau à la main, qu'ils en vifitent tous les lieux les plus écartez, qu'ils en chaffent les tenebres & la corruption, & qu'ils fe préparent pour en faire la maifon de Dieu, & le temple du faint-cfprit.

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Ils ne fauroient auffi travailler utilement à un fi important ouvrage, nous avons quelque chofe de fecret & de caché pour eux; & fi après leug

avoir donné une entiere connoiffance de tout ce qui regarde nos paffions, nous ne fouffrons qu'ils portent par tout la lumiere de la verité; qu'ils diffipent tous les nuages dont fe couvrent nos vices; & que par une prudence toute divine ils dévelopent tous les déguisemens & les adresses de notre amour propre.

Il faut enfin que nous leur donnions un pouvoir abfolu de faire en nous tout ce qu'ils jugeront à propos;de détruire & de renverfer, auffi-bien que d'édifier & de bâtir; d'élever l'édifice de Dieu fur les ruines du nôtre; de brifer la dureté de notre cœur & d'en arracher les épines, avec tout ce que Dieu n'y a pas planté ; mais il eft furtout neceffaire qu'ils ne rencontrent plus en nous de propre volonté ; parce que fi nous la confervons, nous réfifterons toujours aux impreffions de la veritable pieté, & nous ne ferons jamais entierement la volonté de Dieu. Quand même nous paroîtrions aux yeux des hommes parfaitement convertis; nous n'aurons dans la verité rien fait, jufqu'à ce que nous ayons chaffé cet ennemi irreconciliable des notre falut. Tant que notre propre vo

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lonté demeurera dans notre cœur ; elle tiendra une porte ouverte au fort armé, au monde, & à toute fa corruption, dont elle ne manquera pas, d'y établir la domination & l'empire. Lorfque nous aurons renoncé à nousmêmes pour nous affujettir entierement à un fage directeur, il travaillera en nous à l'ouvrage de Dieu avec autant de fuccès que de liberté : & fe fervant utilement de notre obéiffance & de notre foumiffion, il détruira dans notre cœur le vieil homme avec toutes nos paffions & tous nos vices; il y formera & y fera croître l'homme nouveau; il y établira la vie de JefusChrist par l'exclusion de celle d'Adam, & il y fera regner Jefus-Chrift par fon efprit, & par fa divine charité, dont toutes les vertus font les fruits & les fuites.

Combien il eft dangereux d'abufer de la confeffion, & de fe la rendre inutile.

I

L paroît affez par ce que nous ve nons de dire, combien il eft utile & neceffaire pour nous dégager de nos pechez de nous en accufer à ceux Tome I.

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qui peuvent y appliquer les remedes d'une legitime penitence, & enfuite rompre les chaînes qui nous rendent captifs du demon. En effet,nous avons fujet d'efperer le pardon de toute forte de crimes, jufqu'aux plus grands & aux plus énormes, quand un veritable regret nous porte à les confeffer, quand nous approchons du tribunal de la penitence avec crainte & avec tremblement: quand nous baiffons la tête fous ce joug avec une profonde humilité; quand nous y portons un cœur co ntrit& anéanti;quand nous recevons avec docilité les confeils qu'on nous y donne ; quand nous nous y foumettons fans referve; quand nous en embraffons les rigueurs avec courage; quand nous y perfeverons fans nous Laffer; & quand après avoir fait tout ce que nous pouvons, nous nous regardons encore comme des ferviteurs inutiles, qui ayant plufieurs fois offenfé leur maître, ont toujours fujet de craindre fes châtimens, quelque fatisfaction qu'ils lui ayent faite.

Il n'y a rien de fi faint, ni fi efficace, qu'une confeffion, accompagnée de toutes ces circonftances, qui nous faifant frapper avec beaucoup d'ardeur;

avec une perfeverance infatigable à la porte de la mifericorde de Dieu ne manque jamais de nous l'ouvrir, ni de nous en procurer les effets.

Mais on a auffi fujet de déplorer avec gémiffement & avec larmes l'aveuglement & la dureté des homines qui abufent d'un moyen fi avantageux & fi capable de leur procurer toute forte de biens, qui profanent une chofe fi fainte, & qui changent en poison un remede fi falutaire. Cependant rien n'eft plus commun ni plus ordinaire que cet abus, & l'experience continuelle en fournit des preuves très-claires & très convaincantes.

Quoi qu'on ne vît jamais tant de confeffeurs, & que les églifes foient pleines de gens qui n'ont point de repos jufqu'à ce qu'ils ayent déchargé leur memoire de leurs crimes, les defordres ne furent jamais plus grands dans toute forte de conditions; & il femble que ces perfonnes qui s'en accufent fi fouvent n'en font que plus hardis pour les commettre tout de nouveau. S'ils font l'hiftoire de leurs pechez aux prêtres, qui veulent les écouter, c'eft fans aucun fentiment de Dieu, fans aucun mouvement de com

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