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la faizon & leurs interêts réels & véritables, les autres mal felon les accéz de leurs paffions & de leur folie, con-, tre leurs interêts réels, mais felon leurs,

interêts aparens tels que les leur répré-. fentent leurs paffions.

Il femble, que dans l'enfance on ne puifle rencontrer que de l'imprudence, à cauze du défaut d'experience des chofes qui produifent le plus de plaizir ou de douleur, & faute de conoî-, tre tant par l'experience que par la réfléxion, quels font les plaifirs, & les. maux les plus durables, cependant ils ne font pas tout à fait incapables de faire des réfléxions & des comparaizons tant fur leurs propres experiences, que fur les experiences de leurs camarades, qui font hureux ou malhureux , joyeux ou foufrans, ils ne font ils ne font pas même incapables de recevoir les craintes qu'on veut leur infpirer, quand les maux leur font peints vivement, & quand ils ont confiance à celui qui leur parle, ainfi ils ne font pas entiérement incapables de tout examen, de toute delibe ration & de fufpendre quelquefois leurs

rézolutions.

Or c'est particuliérement dans l'ha

bitude à la fufpenfion, dans l'habitude & l'éxamen, dans l'habitude à la deliberation,à la confultation, dans l'habitude à comparer les biens & les maux, atachez aux partis opoféz, que confifte l'habitude à la prudence, comme c'eft dans Phabitude à la non fufpenfion, au non examen, à la non comparaizon, que confifte l'habitude à l'imprudence.

Ceux, qui ont plus de fenfibilité, ont moins de facilité, à fufpendre leur réfolution, & à examiner le bon & le mauvais des deux partis opoféz, ils font pour ainfi dire, emportés par la grandeur & par la force de leur fentiment, leur ame en eft route ocupée, il ne leur refte aucune place pour aucun fentiment, ou de crainte, ou de dézir, qui puiffe les forcer à examiner la grandeur ou des maux on des biens, qui fuivront de telle rézolution, ainfi plus l'enfant a de fenfibilité au deffus de fon camarade, plus il a de difpofition à l'imprudence.

Les Fiziciens difent, que cette fenhbilité eft grande, à proportion, que les fibres des membranes font plus ou moins tendues dans les uns que dans les autres, & éfectivément dans les

par

ties du corps, où il y a tumeur & plus de tenfion dans les membranes, il y auffi plus de fenfibilité.

Ce n'eft pas que ces caractères fi fenfibles ne puiffent aquerir quelques dégrèz de prudence, mais toutes chofes égales, ils n'en aquiereront jamais, tant que les caracteres médiocrement fenfibles, car pour les caractéres trop peu fenfibles & prèfque ftupides, il ne faut en atendre ni talens ni vertus.

Les caractéres très fenfibles ont une imagination plus vive, plus abondante, ils content mieux, ils font pour l'ordinaire les plus agréables dans le comerce de la vie quand ils veulent plaire, & les plus dêzagréables, quand ils veulent déplaire, & toûjours les plus imprudens & les moins capables de doner, & fur tout de recevoir de bons confeils.

La paffion eft une éfpèce de fievre de fentiment; or il y a dans les fievres des acçéz plus forts les uns que les autres, & plus dans certains hommes que dans les autres.

La claffe des très-fenfibles n'a que de petits intèrvales de raizon, la claffe des médiocrement fenfibles a de plus.

longs intervales de raizon, où ils peu vent faire uzaje de l'éxamen.

Dans l'âge meur depuis 30. ans juf qu'à so. le même homme a les intervales de fenfibilité plus courts, & les intervales de raizon plus longs, qu'il n'avoit à 15. ans; de là on peut con clure que notre raizon ne croift guè res qu'à proportion que notre fenfibi lité diminuë.

La prudence dans l'Ecolier peut s'éxer cer par les réflexions qu'on lui fait fai re fur des maux, que lui caufent les chofes malfaines, qu'il a manjées avec plaifir, où les chozes faines qu'il a man jées avec excès, les excès dans fes amufemens, les excés dans l'application, les maux, que produizent foit à lui, foit à fes camarades, les impatiences, les réponfes aigres, brufques, inpolies, la pareffe, &c. Or plus le Regent ém ploye de tems par jour à ces exerci ces, plus il augmente dans fes Ecoliers leur habitude à la prudence.

La modération dans les plaifirs, dans les dèzirs, la juftice, la politeffe, la prévenance, la liberalité, la patience dans les injures, l'habitude à raizoner jufte, l'habitude à orner fa memoire

,

des chozes utiles toutes les vertus & tous les talens, peuvent-être regardez comme les enfans, ou comme des effets de la prudence ou de l'amour propre bien entendu, parceque toutes les vertus & tous les talens fervent à diminuer nos maux, & à augmenter_nos biens pour cette vie, & à nous affurer le bonheur de la vie future.

La prudence, c'est-à-dire, la connoiffance de nos interêts rèels, & de nos plus grans interêts nous infpire la crain te falutaire des tourmens éternels, & le dézir vif des délices du Paradis, & comme cette prudence des enfans de Dieu, que nous devons, ou à une raizon trèséclairée, ou à la foi habituelle, nous enfeigne que le meilleur moien pour obtenir le Paradis c'eft d'être camarade jufte & bienfaizant, fils jufte & bienfaizant, peré jufte & bienfaizant, mari jufte & bienfaizant, voisin juste & bienfaizant, citoien jufte & bienfaizant pour plaire à Dieu, il fe trouvera toûjours que les hommes les plus dè zirables dans la focieté feront les plus prudens, & les plus feurs d'obtenir le bonheur éternel, la prudence, qui agit pour éviter les maux, & obtenir les

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