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Le filence règnoit fous la célefte voute:
Il parle. Tout frémit, fe profterne & l'ècoute.
Foibles rivaux, dit-il, frêles Divinitez!

Je lis dans le fecret de vos cœurs agitez ;
Mais, de brifer vos fers perdez l'espoir cou-

pable.

En vain de mon courroux miniftre infatigable, Le Cyclope périt accablé fous vos traits. Lâche Apollon, mon bras fuffit à mes de

crèts.

Crains donc, coupable fils, ma trop jufte vengeance:

Immortel, il eft vrai, par ta divine effence; Mais honteux exilé des climats éternels:

Va traîner de longs jours chez les triftes Mor

tels.

Ainfi parla le Dieu

que portent les nuages, Qu'annoncent les éclairs, qui commande aux

orages.

Aux accens de fa voix l'Olympe s'èbranla ;
Er du fein de la nue Apollon s'envola,

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Attire les regards de la Terre furprise.

L'air y devient plus pur; l'Aurore par

pleurs

Y calme du Soleil les brûlantes ardeurs ;

fés

Zéphire fur ces bords, porte feul son haleine; La Terre offre fes fruits fans travail & fans peine :

Les fons mélodieux des innocens oifeaux,

Des Champs Theffaliens troublent feuls le

repos.

D'un Aftre Bienfaisant tout reffent l'influence Et d'un Hôte immortel annonce la présence.

Cependant Apollon, de fes tendres regrèts, Fait retentir au loin les tranquiles Forêts. Bien-tôt, aux fons vainqueurs de fa touchante Lyre,

La douleur perd fes droits, la Beauté fon Em

pire,

(a) Fleuve de Theffalie.

Irrigat Amphryfus famulantis Pafcua Phabi. Virg. in Georg

Le Tygre la fureur, le Lion fa fierté,

Par l'attrait du plaifir le Berger arrêté,

Fait cèder tous fes foins aux charmes de l'oreille:

Comme d'un long fommeil fon efprit se ré

veille.

Pour la première fois, d'un regard curieux,
Il ofe interroger les merveilles des Cieux.
Un nouvel ordre offert dans toute la Nature,
Fait naître dans fon fein une flamme plus
pure:

Il ceffe de brûler dans fes vœux impuiffans,

Sur les Autels du fort un facrilége encens.
Il brife de l'erreur cette honteufe Idole.
Animé d'un beau feu, prend l'effor & s'envole :
Pénètre jufqu'au Trône où s'affeoit l'Eternel,
Y rend de fon amour l'hommage folemnel;
Parcourt les vaftes champs au deffus du Ton-

nerre;

Et s'inftruit à louer le Dieu qui de la Terre,
En fe joüant, remue & règle les refforts.

C'est ainsi qu'un Mortel dans fes divins tranf

ports,

S'élève jufqu'aux Cieux, méconnoit fa foi

bleffe.;

Diftinguez ce beau feu d'une trop fole yvreffe;
Qui prétend confacrer le plus frivole son.
C'eft-là tout le Myftère, enfeignoit Apollon
Au Peuple raffemblé fur ces lointaines Rives.
Méprifez des grands mots les cadences oifives,
Semblables au vain fon d'un vil airain battu,
Mon Art fert les plaifirs qu'adopte la Vertu.
Sous les traits délicats d'une plume légère,
La Sageffe foûrit, fans être moins auftère.
Elle accroît fon Domaine à l'aide de ma voix,
Et fait goûter au cœur fon Empire & fes Loix;
Mortels, de mes leçons confervez la méj
moire,

Vils efclaves des fens dans le fein de la

gloire

Mon efprit en ce jour vous a fait repofer.
Sur la foi de ce feu vous pouvez tout ofer.

Les

Les rochers attentifs & les pieres dociles (4) Suivront de vos accens les cadences faciles : La Mer fera foûmise à vos tendres accords, (6) Et lé Dieu du Ténare attendri fur fes bords. (c) La Nature ôtera fon voile refpectable; (d) L'avenir ouvrira fon fein impénétrable. (e)

Poëtes, connoiffez vos Deftins glorieux : A l'Etre Souverain, vos chants religieux (ƒ) Porteront des Mortels le légitime home

mage.

Au gré de vos accens, l'homme dur & fauvage
Quittera les Forêts, peuplera les Citez.
Maîtres des paffions, dans les cœurs irritez
Vos voix ramèneront une paix favorable.
Sous les dehors du faux, l'ingénieuse Fable (g)
Des grandes veritez frappera les efprits;
D'une noble fureur les Lyriques èpris (h)
Chanteront les hauts faits, les Guerriers maga
nanimes;

(a) Amphyon. (b) Arion. (c) Orphée. (d) Luercce (e) Les Sybilles. (f) Hymnes à l'honneur des Dieux (g) Poëmes Epiques. (h) Odes.

H

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