Imágenes de páginas
PDF
EPUB

患患患患患患

I. DISCOURS.

[ocr errors]

Connoître l'Homme & fes de

voirs, on doit moins être furpris qu'il faffe des fautes, qu'on ne devroit s'étonner s'il n'en faifoit pas. Comment pourroît - il s'en garantir dans le cours de tant d'actions qui compofent fa vie, & qui peuvent être blâmables à tant d'égards? Sa raison eft-elle un guide infaillible qui éclaire tous fes pas, qui lui dé couvre toutes les routes, qui écarte devant lui tous les nuages: Eft-elle affez fidèle pour ne lui manquer jamais ? Eft - il lui-même affez docile pour lui obéïr toûjours; ou n'eft - ce au contraire qu'une lumière bornée, incertaine, qui trouve encore dans tous les Hommes des obftacles prefque invincibles, un cœur fouvent rebelle, des paffions toûjours aveugles, des exemples, des préjugez, fource d'erreurs & de vices qu'on a tant de fois à fe reprocher? Prévoyance, fageffe humaine, vous n'êtes pas à couvert des fau

tes. Les mesures que vous prenez ne vous écartent que trop fouvent de la fin où vous devez tendre. Trop fouvent la précipitation, la témérité fe mêlent à vos conseils, & vont étouffer dans votre fein le fruit qui en devoit naître. Connoiffons donc notre mifère, & apprenons au moins à profiter de nos fautes, fi nous ne pouvons éviter d'en faire. Il y en a qui regardent la conduite, & qui partent d'un défaut de lumière, ou du peu d'attention que nous avons à nos démarches : il y en a d'autres qui intéreffent la vertu, qui font contraires à fes maximes, & où la paffion & la foibleffe du cœur ont plus de part ; mais il n'en eft point dans ces deux genres qui ne foient utiles au Sage. Il profite des unes par les lumières qu'il en reçoit ; il profite des autres par le repentir qu'elles lui laiffent. L'expérience le rend plus habile, le repentir plus vertueux. Développons ces idées, & inftruifons-nous.

D

PREMIERE PARTIE.

Ans les actions importantes, comme dans les autres, nous manquons Le plus fouvent faute de lumières. Ou no

tre vûë eft trop foible d'elle-même, pour embraffer tous les objets ou elle est obfcurcie par des caufes étrangères. Delà bien des rapports à confiderer qui nous èchappent. Nous ne prévoyons pas tous les inconveniens : les apparences nous trompent; & nous ne fommes avertis de la plupart des fautes qu'il faudroit craindre, qu'à mesure que nous y tombons. Examiner, méditer, c'eft tout ce que peut notre prudence ; mais il eft bien rare, malgré ces précautions, qu'on ne voulûr revenir à de prémiers effais. La Vieilleffe, à la vûë de fes fautes, fouhaiteroit de revivre. Si fes vœux étoient exaucez, elle en feroit bien plus habile & moins fujette à fe tromper.

C'est par - là que le Sage profite de fes

4

fautes il apprend d'elles mêmes à les éviter. A peine void- il luire le flambeau de l'expérience, qu'il fent d'abord fes ténèbres s'éclaircir, fon difcernement s'ètendre plus d'obftacles qui l'empêchent de voir, plus de fauffes clartez qui l'ègarent. Sa raison s'eft accruë d'autant de traits de lumière qu'il a fait de fautes: lumière fenfible, lumière utile, qui pour

[ocr errors]

un manquement dont elle inftruit le Sage; le fauve tout à la fois d'une foule d'autres, par la précaution qu'elle lui infpire. Ainfi le voyons nous après fes chûtes marcher d'un pas plus ferme & plus mefuré; ainfi la perfection dont il brille n'eft elle fouvent que le fruit des imperfections qui l'ont précedée. Refpectez fes fautes, impitoyables Cenfeurs, & loin de le blâmer, préparez lui des éloges. De cette imprudence même que vous lui reprochez, il en va naître une fageffe plus attentive & plus éclairée, que vous ferez forcez d'admirer. Gardez-vous de lui té, moigner un mépris que votre propre estime doit bientôt démentir. Quand le Sage fait des fautes, l'envie elle - même devroit s'en affliger.

[ocr errors]

En effet, quels avantages n'en retiret-il pas ? Une occafion manquée, un projet mal concerté, une entreprife téméraire, tout réveille fon attention, tout ranime fa vigilance. Ne craignous plus pour fa conduite; l'expérience le guide: c'est affez: elle détruit fes préjugez, modère fes tranfports, excite la lenteur: elle fait plus, elle change, elle redreffe en lui un

des plus dangereux mobiles des actions humaines, l'imagination. Cette puiffance de fon ame, défabulée par fes erreurs,

ne lui offre plus ces fauffes images qui l'ont féduit: elle lui fait au contraire une peinture vive & fidèle des moindres circonftances où il a manqué. Là il void d'un coup d'oeil ce qu'il a négligé, ce qu'il a omis, les tems, les lieux où sa fermeté s'est démentie, où fa préfomption l'a fait rougir; le fentier qui l'a égaré, la route qu'il devoit fuivre. Sa prévention peu fatisfaite, fa crédulité trompée, lui représentent tour à tour l'examen, la défiance dont il falloit ufer. Telles font les images dont fon efprit s'occupe, dont fe nourrit fa réflexion.

Mais que void - on dans fa conduite ? Quel changement! Ce n'eft plus cer Homme autrefois fi hardi à tout entreprendre il fe défie de fes forces depuis l'effai qu'il en a fait. Faut-il former ou executer des projets importans? peu raffûré fur la prudence humaine,il confulte les Dieux, il fait égorger des Victimes, il cherche dans leurs entrailles des préfages dont fa crainte a befoin. Il devoit à fa téméri

« AnteriorContinuar »