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puissance ou avarice, les Carthaginois refusèrent de payer la folde dont ils étoient convenus. Ces Troupes commirent des cruautés inouies. Elles mirent dans leur parti la plûpart des Villes d'Afrique qui ne demandoient pas mieux que de fecouer le joug des Carthaginois, & s'avancèrent auprès de Carthage au nombre de foixante & dix mille hommes. Elles avoient à leur tête les deux Auteurs de la révolte, nommés Spendius & Mathos, gens de la lie du Peuple, dont l'un avoit été Esclave à Rome, d'où il s'étoit enfui, & où il craignoit de retourner, de peur de tomber entre les mains de fon ancien Maître.

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Les Carthaginois firent les plus grands efforts pour éteindre un incendie prêt à embrafer leur République. Ils levèrent à la hâte des Troupes nombreuses, & les mirent fous la conduite d'Amilcar & d'Hannon. Cette Guerre dura quatre ans, & on en a peu vu où l'on ait pu remarquer une alternative fi continuelle de profpérité, de malheur, de confiance, d'allarmes, de joie, & où les événements de part & d'autre ayent été fi variés. Enfin cette Guerre finit à l'avantage des Carthaginos. Les Rebelles furent défaits, leurs Chefs punis, & la plupart des Villes révoltées rentrèrent dans l'obéiffance.

perdent la Sar

Ce fut là l'époque où les Carthaginois perdirent Les Carthaginois la Sardaigne. Les Mercénaires qu'ils entretenoient daigne. dans cette Ifle, firent main baffe fur leurs Maîtres, & s'en emparèrent; mais, ne s'accordant pas avec les propres Habitans, ils en furent chaffés à leur tour & cette Ifle échappa à cette République.

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Deuxième Guerre Punique.

La deuxième Guerre Punique eft mémorable par la hardieffe des entreprises, par la fagefle des mesures dans l'exécution, par l'opiniâtreté des efforts des Peuples rivaux. Rome & Carthage étoient alors fans contredit les premières Villes du monde. Quelque grandes que fuffent les forces de ces deux Peuples, on peut dire que leur haine l'étoit encore plus. Les Romains d'un côté voyant avec indignation que des vaincus ofaffent les attaquer, & les Carthaginois irrités à l'excès de la manière dure dont le vainqueur en avoit usé à leur égard.

L'envie que les Carthaginois avoient de fe venger de leur défaite, fut la véritable caufe de cette Guerre, & le fiége de Sagonte, Ville Alliée des Romains, le prétexte. Les Carthaginois avoient conquis une partie de l'Efpagne fous Amilcar ; à la mort d'Amilcar, Annibal fut nommé leur Général; &, fidéle au ferment qu'il avoit fait de venger fa République, il affiégea Sagonte, pour donner occafion à ceux-ci de fe plaindre, & de commettre des hoftilités. Sagonte fut prife & pillée. Les Roprétexte de la fe mains envoyèrent des Députés à Carthage pour s'informer fi cette entreprise avoit été faite par ordre de la République. Le Sénat ne donna pas une réponse positive; un des Députés,montrant un pan de fa robe qui étoit pliée, leur dit : « Je porte ici la Paix » & la Guerre, choififfez. Toute la réponse qu'on lui fit, fut qu'il pouvoit choifir lui-même. Je vous don» ne donc la Guerre, répondit-il en déployant le pli » de fa robe. Nous l'acceptons de bon cœur, & la

Siége de Sagonte,

conde Guerre Pu

nique.

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» ferons de même, répondirent les Carthaginois avec » fierté ».

Cette feconde Guerre Punique commença l'an du monde 3786; les forces Militaires des Carthaginois furent divifées en Afrique pour garder le Pays; en Efpagne, pour conferver les Conquêtes, & les autres fe difposèrent à paffer en Italie fous les ordres d'Annibal. Les Troupes d'Afrique montoient à quarante mille hommes, dont douze cents de Cavalerie, celles d'Espagne à un peu plus de quinze mille, parmi lefquelles il y avoit deux mille cinq-cents Chevaux. Annibal laiffa à son frère Afdrubal le commandement des Troupes d'Efpagne avec une Flotte d'environ foixante Vaiffeaux, pour garder les Côtes, & s'avança lui-même, à la tête de cent mille hommes, dont douze de Cavalerie. Il eut en route à combattre contre les éléments, la difficulté des chemins, la mauvaise volonté de quelques Peuples qui vouloient s'opposer à fon paffage. Il traverfa le Rhône, & fe trouva au-delà de ce Fleuve, lorfque Scipion & Simpronius, Confuls Romains, le croyant encore en Espagne, se difpofoient à partir chacun pour leur département. Ils furent fort étonnés lorfqu'ils fe virent Annibal fur les bras, au moment où ils s'y attendoient le moins. Cette nouvelle dérangea leurs projets, & ils réfolurent de retourner pour s'opposer au Général Carthaginois.

Le commencement de cette Guerre fut, on ne peut pas plus heureux pour cette République. Annibal voloit de victoire en victoire ; &, après avoir

battu Scipion au Teffin, Simpronius à la Trébie, Flaminius près du Lac Trafimène, il penfa lui-même être arrêté dans le cours de fes profpérités par Fabius, qui plus froid, meilleur Général que fes Collégues, étoit pour Annibal un ennemi bien plus redoutable. Annibal, enfermé dans un défilé, & fe voyant au moment de tomber avec toute fon Armée au pouvoir des Romains, fe tira d'affaire par une rufe, en attachant des fagots de farment allumés aux cornes d'une multitude de bœufs qui, chaffés vers l'Ennemi, y causèrent un grand désordre, & à la faveur bataille de Cannes, duquel il fe fauva. Il défit entièrement les Romains à Cannes; &, au lieu de poursuivre fa victoire, & d'aller affiéger Rome, abbatue par une fuite de revers, il passa l'Hiver à Capoue, où fes Troupes. perdirent toute leur difcipline.

Annibal gagne la

Paffe l'hiver à Capouc.

Cependant les fatigues de la route, les combats, les maladies avoient diminué confidérablement fon Armée, qui fe trouva réduite au quart de ce qu'elle étoit à fon départ. Il demanda à Carthage des fecours d'hommes & d'argent; mais la cabale de Hannon qui lui étoit oppofée, lui fit refuser ces secours, & voilà la vraie caufe des mauvais fuccès qu'eût enfuite fon Armée. Les Romains vinrent à Capoue. Annibal, pour faire diverfion, s'approche de Rome; il eft confondu de voir les Romains, pendant qu'il tenoit cette Ville bloquée, faire fortir de leurs. murs une Armée pour l'envoyer en Afrique. Cependant les Carthaginois voyant l'importance qu'il y

Afdrubal tombe dans une embufca

avoit à ne pas laisser Annibal seul & fans secours en Italie, fe déterminèrent à lui envoyer Afdrubal fon frère, avec des forces confidérables; mais celui-ci de, & y eft tué. tombe dans une embufcade que les Romains lui avoient tendue ; fes Traupes font taillées en piéces, & il y eft lui-même tué.

Annibal eft rap pellé en Afrique.

Tandis que les affaires d'Annibal étoient brillantes en Italie, celles des Romains l'étoient auffi en Espagne, & ils chassèrent presque tous les Carthaginois de cette Province; mais ce fuccès effuya quelques alternatives. Les Carthaginois y eurent à leur tour quelques avantages, & les deux Scipions y périrent. Cependant les Romains ayant repris le deffus, rappella Annibal, qui, de retour en Espagne, fit des propofitions de Paix à Scipion, furnommé l'Africain, & qui commandoit alors les Armées Romaines. Le Conful impofa des loix qui parurent trop dures, & qui ne furent pas acceptées. On fe prépara au combat. La bataille de Zama où les Carthaginois furent taillés Les Carthaginois. en piéces, mit fin à cette Guerre. Les Carthaginois obligés de demander humblement la Paix, acceptèrent les conditions qu'on leur fit; elles étoient que les Carthaginois rendroient aux Romains tous les Prifonniers & Transfuges; qu'ils leur livreroient tous leurs Vaiffeaux, hors dix; qu'ils donneroient tous leurs élephants; qu'ils quitteroient la Sicile, l'Espagne, la Sardaigne; que toute Guerre, hors d'Afrique, leur feroit interdite, & que même ils ne pourroient la faire dans cette partie du monde fans la permiffion de la République ; qu'ils rendroient à

font défaits à Za

ma.

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