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Grecs cet efprit belliqueux, & ce courage admirable, qu'on vit briller chez eux avec tant d'éclat. Alors parurent dans la Grece, ces établissements que l'Univers admira, & qui contribuèrent à l'excellence de la difcipline militaire; je veux parler de l'institution des Loix de Lycurgue, & de la célébration des jeux Olympiques, Ifthmiques & Néméens. Le véritable objet des Loix de Lycurgue, fut de rendre les Lacédémoniens intrépides & vaillants. L'éducation des jeunes-gens étoit publique; elle commençoit dès leur plus tendre enfance, & duroit presqu'autant que leur vie. Cette éducation n'avoit pour but que de leur apprendre à obéir, à fupporter les plus grandes fatigues ; & à demeurer vainqueurs en toutes fortes de combats.

Education de la jeuneffe.

Les jeux Olympiques, & les autres établis dans la Jeux Olympiques, Gréce, étoient destinés à faire naître, & à récompenfer le courage & l'adreffe. Tous les jeunes-gens en état de porter les armes s'y difputoient, en présence d'une multitude énorme de peuple accouru pour voir ce beau spectacle, le prix de la course, de la lutte, de l'escrime, de tous les exercices propres à former des Soldats. La gloire de concourir à ces récompenfes honorables avec les Hommes les plus illustres, avec des Rois mêmes, les applaudiffements extraordinaires, & les couronnes que recevoient les vainqueurs, aux yeux de toute la Gréce affemblée, maintenoient ces exercices en honneur, & infpiroient à la jeunessé cette noble paffion de s'y perfectionner, à laquelle les Grecs durent enfuite leurs principaux exploits.

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Sparte & Athénes, étoient les Républiques les plus confidérables de la Gréce; les autres petits Etats voifins furent obligés, par crainte ou par intérêt, de fe laiffer entraîner par l'afcendant de ces deux Villes; & peindre les mœurs des Lacédémoniens & des Athéniens, c'eft décrire celles de toute la Gréce.

Les premiers étoient un Peuple de Soldats; ils ne cultivoient ni les Arts ni les Sciences; ils n'exerçoient pas commerce; ils ne s'appliquoient pas davantage à l'agriculture; abandonnant le soin de leurs terres à des efclaves nommés Hilotes; toutes leurs loix, toutes les conftitutions de leur état tendoient à en faire des hommes de guerre. C'avoit été là l'unique but de leur Legislateur. Il réuffit parfaitement; car jamais on ne vit de meilleurs Soldats, plus faits à la fatigue, à l'obéiffance, à la difcipline, plus courageux & plus dévoués à la gloire, & au bien de la Patrie; on en distinguoit de deux fortes; les uns, que l'on nommoit Spartiates, qui habitoient à Sparte même, les autres nommés Lacédémoniens, & qui demeuroient à la campagne; les premiers étoient la fleur de l'Etat, & en rempliffoient toutes les charges. Ils étoient prefque tous capables de commander. On fçait le merveilleux changement qu'un feul d'entr'eux, (Xantippe) envoyé au fecours des Carthaginois, causa dans leur armée; & comment Gilippe, autre Spartiate fauva Syracufe. Tels étoient les trois cents qui, fous Léonidas, défendirent les Thermopyles, contre l'armée innombrable des Perfes. Enfin la réputation militaire des Spartiates, étoit fi bien établie, que les

différents peuples de la Gréce, étant ménacés de quelques guerres, ne demandoient à Sparte ni argent ni troupes, mais un feul Général; & qu'ils lui obéiffoient avec toute la confiance & la docilité qu'inspire naturellement la fupériorité des lumières. Auffi, lorfqu'Alexandre fe fut fait nommer Capitaine-Général de toute la Gréce, les Lacédémoniens s'y opposèrent, disant qu'ils étoient dans l'habitude de commander & non d'obéir.

Athènes n'avoit pas des réglements auffi fages que ceux de Sparte; mais l'amour de la liberté suppléoit à ce qui manquoit à cet égard, & infpiroit à fes Citoyens dans les grandes occafions, autant de constance & de magnanimité. Elle feule ofa résister aux premiers efforts des Perfes contre la Grèce, tandis qu'une fotte & vaine fuperftition (la peur de fe mettre en marche dans la pleine Lune) empêcha les Lacédémoniens de partager avec eux le péril & la gloire de la fameuse journée de Marathon.

Les Lacédémoniens effacèrent cette tache, dix ans après, aux Thermopyles, aux combats de Salamine & de Platée ; mais, quoiqu'ils euffent alors le commandement général des forces de la Gréce, les facrifices que cette feconde irruption des Perfes coûta aux Athéniens, & la conduite éclairée de Thémiftocle, firent néanmoins attribuer à ces derniers le principal honneur du fuccès de la guerre.

Telle est l'époque de la division qui se mit entre les Athéniens & les Lacédémoniens. Ces deux puiffances rivales ne cefsèrent de se harceler, de fe faire

Epoque & caufe de la divifion qui

fe mit entre les les Athéniens.

Lacédémoniens &

Guerre du Péloponèle.

Macédoniens.

la guerre, foit entr'elles, foit avec leurs alliés. Ces divifions augmentoient même leur expérience dans l'art militaire; parce qu'elles ne manquoient jamais en reprenant les armes, de fe pourvoir avec soin de tout ce qu'elles avoient reconnu leur manquer dans les guerres précédentes.

Enfin la jaloufie du commandement alluma la guerre du Péloponèse, qui arma tous les Grecs les uns contre les autres, & dont l'Hiftoire est moins intéressante par la grandeur des événements, que par la quantité de faits inftructifs qu'elle nous préfente. On voit dans les deux partis, des Chefs habiles, épuifer tour-à-tour, à la tête de leurs petites Armées les refsources de l'art le plus profond, & nous étonner par la hardiesse de leurs manœuvres. Alors la Tactique des Grecs devint plus fçavante de jour en jour. On la vit s'avancer vers la perfection par les lumières d'Epaminondas, y arriver fous Philippe, s'y maintenir fous Alexandre, & décheoir infenfiblement par la négligence & l'avarice de fes fucceffeurs, ainfi que par les divifions inteftines des Grecs, qui, dégénérant de leurs ancêtres, & plus occupés à fe nuire les uns aux autrés, que du foin de leur liberté, femblèrent enfin n'avoir hâté la chûte de Perfée, dernier Roi de Macédoine, que pour fubir plus-tôt le joug des Romains.

Les Macédoniens furent plus illuftres fous Philippe & fous Alexandre, qu'ils ne l'avoient été auparavant, & qu'ils ne le furent depuis. Ils durent leur mérite au premier, & leur gloire au fecond; ce jeune Prince les trouva tout difpofés & tout formés par fon père,

pour

pour les vaftes projets qu'il exécuta par leur valeur & leur courage, autant que par la propre intelligence.

caractère.

Les Athéniens joignirent pendant quelque temps Athéniens, leur la politeffe des manières, la finesse de l'efprit & du goût, la perfection des arts, la politique, la théorie & la pratique de la guerre. On les vit avec étonnement réunir, au fuprême dégré, ce sentiment vif & délicat, qui fait le voluptueux, & cette vigueur du corps & de l'âme, qui forme les Héros; cette Nation étoit au plus haut point de sa gloire dans les 35 & 36o fiécles ; elle l'emportoit de beaucoup en tout fur les autres Grecs, & difputoit même le merite Militaire aux Lacédémoniens, qui n'aspiroient qu'à celui-là. Athènes ceda enfin, comme les autres Villes de la Gréce, à l'ascendant de Philippe & d'Alexandre, & ne secoua le joug de leurs fucceffeurs, que par la protection des Romains, jufqu'à ce que Sylla la prit & la pilla, vers l'an 4000. Pompée la rétablit, & Céfar, en étant devenu maître après la bataille de Pharsale, la ménagea plus, disoit-il, en confidération des morts que des vivants.

Les Lacédémoniens qui devoient la constitution ferme & vigoureufe de leur gouvernement aux Loix de Lycurgue, acquirent, ainfi que les Athéniens, leur grande réputation dans les 35 & 36° fiécles. Mais, bien différents de ceux-ci, ils négligeoient tous les beaux arts, pour fe livrer tout entiers à celui de la guerre. Auffi en devinrent-ils, felon Xénophon, les fouverains maîtres; mais, comme il n'y a pas de gouvernement d'une confistance inaltérable, après s'être E

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