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à peu-près la manière de s'armer des anciens Grecs. Ajax s'approche, couvert de fon immense bouclier, qui paroifsoit comme une tour; il étoit fait de fept doubles peaux de bœuf, qui étoient couvertes d'une forte lame d'airain. (Iliade).

Et, dans un autre endroit : «Ne penfes pas, dit Hector » à Ajax, m'étonner, comme un jeune-enfant ; je fuis » nourri aux allarmes & au carnage; je fçais me fervir à toutes mains de mon bouclier; je sçais manier la ·lance; &, soit à pied soit à cheval, je sçais pousser » mon Ennemi, & donner au Dieu Mars un spectacle agréable ». (Iliade).

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Telles étoient les armes dont les Grecs fe fervoient au fiége de Troie ; il les ont confervées depuis; c'étoient les mêmes qu'ils avoient du temps de Cyrus. Ils y ajoutèrent feulement des piques extrêmement longues, qu'ils appelloient des fariffes.

Les pefamment-armés, avoient pour armes offenfives une des ces piques extrêmement longues, dont je viens de parler, nommées fariffes, & pour défenfives, un cafque, une cuiraffe, des greves & un bouclier long.

Les Frondeurs n'avoient que leur fronde.

Les Archers que leur arc & leur carquois.

Et les armés de Peltes, un petit bouclier, nommé Pelte, parce qu'il étoit couvert de peaux ; il étoit rond & léger; ils avoient en outre une pique bien moins longue que les farisses.

L'ufage des armes défenfives étoit très-ancien chez les Grecs. On remarque même que, dans les premiers

temps, ceux qui n'avoient pû s'en pourvoir, fe couvroient de peaux de chèvres ou de bêtes fauvages. Les premières cuiraffes furent d'abord composées de deux plaques d'airain concaves, qui s'appliquoient, l'une fur la poitrine & le ventre, l'autre fur le dos, & s'attachoient fur le côté par le moyen de boucles & de

courroies.

Les Grecs eurent encore des cuiraffes maillées & à écailles, & de celles qui font faites de lames de fer, appliquées sur du cuir.

Il eft fait mention dans les Auteurs anciens, & même dans Homère, de cuirasses de fil ou plutôt de lin. Et dans la fuite Iphicrate fit prendre de ces dernières aux Athéniens, au lieu de celles de fer qu'ils portoient, Les Macédoniens adoptèrent auffi l'usage de ces cuiraffes de lin; & Alexandre en avoit une de la même matière ; mais elles ne valoient rien pour la guerre; un coup de pique ou d'épée vigoureusement porté les perçoit.

Le mauvais exemple des Athéniens & des Macé-doniens à cet égard, ne gagna pas Philopémen. Ce grand-homme fit reprendre à fes Soldats l'armure complette de fer.

Il y avoit des cuiraffes d'une matière fi dure, qu'elles étoient abfolument à l'épreuve des coups. Zoïle, habile ouvrier dans ce genre, en offrit une à Démétrius. Pour en montrer l'excellence, il fit lancer une fléche par une Catapulte qui n'étoit qu'à cent vingt pas de distance, la fléche ne fit qu'effleurer la cuiraffe, & laiffa à peine quelque trace légère...

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Les cafques étoient des armes défenfives pour fe couvrir la tête ; ils étoient de cuivre où d'airain ; quelques-uns de peau de bêtes. On y mettoit au haut, ou fur le cimier les figures des animaux les plus terribles; on les ornoit d'aigrettes & de queues de chevaux, qui flottoient au gré du vent, & en relevoient la beauté. Le bouclier étoit destiné à couvrir tout le

corps en parant les fléches & dards que les Ennemis lançoient, & les coups de piques qu'ils tâchoient de porter; il y en avoit de deux fortes; celui des pesamment-armés étoit long & couvroit un homme tout entier ; il falloit qu'il fût bien long chez les Lacédémoniens, puifqu'on pouvoit rapporter deffus ceux des leurs qui avoient été tués dans une bataille.

Celui des Armées de Peltes, fe nommoit Pelte ; il étoit rond, très-petit, & fort léger.

Les boucliers étoient de métal, ou de bois garni de peaux.

C'étoit la dernière honte de revenir du combat fans bouclier; apparemment, parce que cela laissoit entrevoir qu'on l'avoit quitté pour s'enfuir plus promptement. Epaminondas, bleffé à mort à la bataille de Mantinée, ayant été raporté dans fa tente, demanda d'abord avec inquiétude fi fon bouclier étoit sauvé.

C'est par le même principe, qu'une mère Lacédémoniene, voyant fon fils partir pour la guerre, lui donna un fuperbe bouclier, en lui difant : « Mon fils, » ou deffus, ou avec, aut cum hoc, aut in hoc.

La longueur des piques étoit à peu-près de dix de nos pieds, & celle des fariffes de 18 à 20; longueur

énorme,

énorme, & qui devoit rendre cette arme très-difficile à manier. Le Soldat empoignoit la fariffe avec les deux mains, à quatre coudées de diftance du talon, afin que la partie de l'arme qui paffoit derrière lui, fervît de contrepoids à l'autre; mais cette longueur de quatre coudées dans la portion poftérieure de la fariffe, devoit être fort incommode, & très-embaraffante. Quand les rangs & les files fe condenfoient, les Soldats des rangs qui fuivoient le fixiéme, tenoient leurs piques hautes & penchées en avant contre l'épaule de ceux qui les précédoient, pour rompre l'impétuofité des traits qui auroient pu fe porter fur les der

niers rangs.

Cléomêne trouva le moyen de rendre inutile cette grande longueur de la fariffe. Le mur d'une Ville qu'il affiégoit étant tombé, & la garnison armée de farisses, fortant en bon ordre par la brêche, aller aux pour affiégeants, il mit fes troupes fur une très-grande profondeur, & ordonna que les Soldats du premier rang n'auroient pas de piques, mais qu'ils s'efforceroient de faifir avec les deux mains, & de tenir ferme les fariffes oppofées, tandis que ceux du second rang, se gliffant à côté des Soldats du premier rang, porterolent à l'Ennemi, hors de défense, des coups certains.

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DE LA PHALANGE.

LA PHALANGE eft un mot Technique, employé par les Grecs, pour exprimer l'ordonnance ferrée & profonde de leurs Troupes pefamment-armées.

Toutes les Troupes pefamment-armées, rangées sur une ligne pleine, formoient la Phalange; & les Troupes de chaque pays allié formoient auffi des Phalanges particulières, qui différoient entr'elles par leur ordre plus étendu ou plus profond, & qu'elles conservoient dans le combat.

Les Lacédémoniens fe mettoient fur huit, au plus, fur douze de hauteur.

Les Athéniens fur huit, feize quelquefois fur trente de profondeur. Philippe & Alexandre préfé

rèrent le nombre de feize.

Philippe n'eft pas, comme quelques-uns le prétendent, l'inventeur de la Phalange; mais il la perfectionna; & forma un Corps d'élite sous le nom de Phalange Macédoniene.

La force de la Phalange confiftoit dans fon union; & cette union étoit fi forte que, même en courant pour fe jetter fur l'Ennemi, aucun Soldat ne quittoit fon rang, & ne fe trouvoit féparé de fon voisin.

La force d'impulfion qu'avoit ce Corps ferré & maffif lui fit donner le nom de Phalange, du mot Grec Phalanx, qui fignifie le levier, le travers d'une balance.

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