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& les excès des paffions humaines. L'amour furtout, confidéré comme affection de l'ame, naiffant en nous d'elle-même, & précédant toute détermination à la volonté, y est développé dans tous fes mouvemens, & réduit à une théorie auffi lumineufe qu'utile. Il eft aifé de voir que l'Auteur a beaucoup réfléchi fur les penchans de la Nature, qu'il a le talent d'en faifir & d'en peindre jufqu'aux moindres agitations & aux moindres fignes. Ce feroit pcu, s'il se bornoit à la fimple spéculation. Il n'anatomise, pour ainsi dire, le cœur de l'homme, qu'afin de nous apprendre à en prévenir ou à en guérir les maladies. La fageffe de la conduite dépend prefqu'entiérement de la connoiffance de foi-même : il indique les moyens de parvenir à cette connoiffance, d'en tirer des fruits, & de fouftraire fon ame à la tyrannie des paffions; il met fous les yeux de la raifon les principes qui les éveillent, les alimens qui les fortifient, & les contrepoids qui peuvent les arrêter. En forte qu'il a l'avantage d'inftruire non-feulement chaque individu, mais ́d'avoir fourni des lumieres à plufieurs Métaphyficiens poftérieurs, qui ne fe. font pas vantés de l'avoir lu.

GARASSE, [François ] Jéfuite, né à Angoulême, mort en4631, âgé de 46. ans.

Tome II.

K

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Le nom de cet Auteur eft devenu une injure, & nous ne le plaçons ici que pour effrayer ceux qui feroient tentés de l'imiter. Il s'eft rendu justement méprifable par l'abus qu'il a fait de fon efprit, de fon imagination & de la vivacité toujours dépourvue de goût & de jugement. Ceux de fes Contemporains qui lui déplurent, furent inondés d'un déluge de groffiéretés les plus indécentes & les plus plates. Son Livre de Recherches des Recherches d'Etienne Pafquier, peut être regardé comme les archives, où l'Auteur de la Défense de mon Oncle, a puisé les injures qu'il a prodiguées à tant d'Ecrivains. Il y a cependant cette différence entre lui & Garaffe, que celui-ci fe bornoit à dire que fes adverfaires étoient des impies, des athées, des ânes, des fots par bemol, des fots par bequarre, des fots à la plus haute gamme, & que le Champion de l'Abbé Bazin a traité les fiens non-feulement d'ânes & de fots, mais de Croquants, de Cuiftres, de Marauts, de Frippons, d'lvrognes, de Sodomiftes, de Scélérats, d'Auteurs mourant de honte & de faim. Chaque Siecle a donc sa nuance. Garasse étoit un déclamateur burlesque.

* Garaffe a cependant fervi d'autorité, & l'on ne fera pas fàché de trouver ici une citation d'un Sermon du P. Guérin, Minime, qui, déclamant en Chaire contre le

Comment nommera-t-on fon imitateur & enchériffeur?

1. GARNIER, [ Robert ] Poëte François, né à la Ferté-Bernard au Maine, en 1534, mort au Mans en 1590.

Il développa, dans l'art de la Tragédie, des refforts que Jodelle, fon Prédéceffeur, n'avoit fait qu'entrevoir; c'eft-à-dire, que fes Tragédies curent une forme plus ajustée aux regles qu'on obferve aujourd'hui. Bradamente eut un fuccès prodigieux, tant on commençoit alors à fe fentir entraîner vers le vrai goût. Il donna cette Piece fous le nom de Tragi-Comédie, genre qu'on ne

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Poëte Théophile, s'exprimoit ainfi : » Maudit fois-tu, » Théophile maudit foit l'efprit qui t'a dicté tes penfées ; maudite foit la main qui les a écrites; malheu>> reux le Libraire qui les a imprimées; malheureux ceux » qui les ont lues; malheureux ceux qui t'ont jamais » connu ; & béni foit M. le Premier Préfident, & béni »foit M. le Procureur Général, qui ont purgé Paris » de cette pefte. C'est toi qui es caufe que la pefte elt » dans Paris. Je dirai, après le Révérend Pere Garafus » que tu es un bélitre, que tu es un veau; que dis-je » un veau? D'un 'veau la chair eft bonne bouillie, la » chair eft bonne rôtie, de fa peau on en couvre des Livres`; » mais la tienne, méchant, n'eft bonne qu'à être grillée; » auffi le feras-tu demain: tu t'es moqué des Moines, »& les Moines fe moqueront de toi «.

connoiffoit pas encore en France, & titre qui ne convenoit point à ce Drame, où il n'y avoit rien de comique.

On remarque dans la verfification de Garnier une grande facilité. Ses Tragédies, au nombre de neuf, offrent des morceaux qu'on peut encore lire. Plufieurs de nos Poëtes tragiques n'en ont pas redouté la lecture, & n'ont pas dédaigné d'y puifer des idées, & quelquefois le font bornés feulement à en rajeunir les expreffions.

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2. GARNIER, [N.] Abbé, Pofeffeur d'Hébreu au Collège Royal, de l'Académie des Infcriptions & Belles-Lettres, né en 17..

Succeffeur de deux habiles Ecrivains dans la compofition de l'Hiftoire de France; il feroit digne de marcher à côté d'eux, s'il fe fut un peu moins écarté de leur plan, & s'il eût mis un peu plus de chaleur dans fon ftyle. On ne peut fe difpenfer de rendre jufticé à fon mérite. Il écrit avec nobleffe, & fouvent avec élégance ; il a l'art de préfenter les faits d'une maniere intéreflante; on voit qu'il eft plein de fagacité dans la Critique, judicieux & quelquefois profond dans fes Réflexions, toujours vrai dans fes Réeits. Mais qu'il nous foit permis d'obferver que les Mours de la Nation, l'état des Arts & des

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Sciences, les ufages des différentes claffes de Citoyens, devenus fi intéreffans fous la plume de MM. Veli & Villaret, fonr trop. négligés par le Continuateur. Ces différens objets avoient répandu un nouveau degré d'intérêt fur les travaux de fes Prédéceffeurs, qui s'étoient écartés, en ce point, du plan suivi par tous ceux qui ont écrit l'Hiftoire de France. M. l'Abbé Veli avoit très-fagement fenti que l'Hiftoire d'un Peuple ne fe borne pas à l'Hiftoire de fes Rois; que le Tableau de ce qu'il a été dans l'ordre moral & civil, eft pour le moins auffi piquant, aux yeux d'un Lecteur avide & éclairé, que celui des révolutions de fon Gouvernement. M. Villaret avoit fuivi la route de fon modele, & l'on a lieu d'être étonné que M. l'Abbé Garnier s'en foit écarté, pour rentrer dans celle de nos autres Hiftoriens.

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Un autre défaut qu'on peut lui reprocher, eft trop de timidité dans le récit > & trop peu de cette abondance hiftorique, fi nous pouvons nous fervir de ce terme, qui facilite la marche de Hiftorien, & lui donne de la rapidité. » Un » homme qui écrit l'Hiftoire, dit M. de Fénélon, » doit en embraffer & en pofféder toutes les parties; il doit la voir toute entiere, comme » d'une feule vue. Il faut en montrer l'unité, & tirer, pour ainfi dire, d'une feule fource tous les

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