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L'Académie des Infcriptions & Belles-Lettres a couronné deux de fes Ouvrages, dont l'un eft. l'Hiftoire philofophique & politique des Loix de Licurgue l'autre roule fur cette question: Quel fut l'état des perfonnes en France fous les deux premieres Races, &c.? L'Académie Françoise n'a pas jugé à propos de couronner de même fon Eloge de Defcartes, mais elle l'a fait imprimer.,

Ces titres ne feroient pas fuffifans pour prétendre à une réputation folide, fi M. l'Abbé de Gourcy n'annonçoit d'ailleurs des talens capables de fe développer dans la fuite d'une maniere plus avantageufe. Dans les trois Ouvrages dont nous venons de parler, il paroît inftruit, judicieux, méthodique, & capable de rendre fes connoiffances utiles; fes idées font nettes, fon style eft fimple. Il n'a donc befoin que d'acquérir un peu plus de vivacité & de précision, quand même il se borneroit à des difcuffions érudites. Il eft d'autant plus naturel d'efpérer qu'il acquerra ces deux qualités effentielles, qu'il paroît avoir du goût pour les bons modeles & du zele pour les défendre. On peut en juger par une petite Brochure de fa compofition, intitulée : Rouffeau vengé, ou Obfervations fur la critique qu'en a faite M. de la Harpe, & en général fur les critiques qu'on fait des grands Ecrivains.

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GOURNAY [Marie JARS DE ] morte à Paris en 1645, âgée de 80 ans, fut en haute confidération parmi nos premiers Académiciens.

Elle étoit très-jaloufe de la fociété des Beauxefprits; & quiconque prétendoit à ce genre de gloire, devoit, avant toutes chofes, un tribut à fa vanité. A ce ridicule près, qui n'en eft plus un aujourd'hui, à force d'être commun, Mademoiselle de Gournay n'étoit pas fans mérite. Son efprit étoit orné; elle avoit l'imagination vive & agréable, une érudition peu commune parmi les perfonnes de fon fexe. Il eft facile de s'en convaincre par fes Ouvrages, dont les derniers mots paroîtront certainement finguliers. » Si ce Livre me » furvit, dit-elle, je défends à toute perfonne, » telle qu'elle foit, d'y ajouter, diminuer ni chan»ger jamais aucune chose, soit aux mots ou en la » fubftance, fous peine à ceux qui l'entrepren

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dront, d'être tenus pour détestables aux yeux » des gens d'honneur, comme violateurs d'un fépulcre innocent. .... Les infolences, voire les » meurtres de réputation que je vois tous les jours » en pareils cas en cet impertinent fiecle, me por» tent à lâcher cette imprécation sc. De fi terribles anathêmes out effayé le Lecteur, & c'est apparemment pour ne pas s'expofer à la tentation qu'elle redoutoit fi fort, qu'on ne lit plus fes ouvrages. On leur rendroit cependant un grand fervice d'en

retrancher une infinité de mots furannés, pour lefquels Mile de Gournay a toujours eu la plus tendre affection, ce qui engagea Ménage à la faire figurer dans fa Requête des Dictionnaires. Le Cardinal de Richelieu ne pouvoit s'empêcher de rire, quand il lui en entendoit prononcer. Tant mieux, lui répondit-elle un jour, je fais un grand bien à la France. La fineffe de ce mot confiftoit à faire entendre au Miniftre qu'elle confervoit les jours de fon Eminence en l'égayant, genre de flatterie plus fait pour plaire à celui qui en étoit l'objet, qu'au Lecteur, qui n'en jugera pas de même.

Il ne faut pas ignorer que Mlle de Gournay, fut fille adoptive de Michel Montagne, choifi par elle-même pour pere, après la mort de fes parens. On lui doit une Edition des Essais, avec une Préface à fa maniere, où l'on trouve des traits de fens, d'efprit & d'érudition, qui ont fourni, par parenthèse, à Pafcal, trois ou quatre de ses plus brillantes pensées.

GRAFFIGNY, [ Françoise D'HAPPONCOURT DE] née à Nancy en 1696, morte à Paris en 1758.

Ses Lettres Péruviennes lui ont fait une grande réputation. Quoiqu'il regne dans ce Roman un ton de métaphyfique contre nature, fur-tout dans

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affe femme, & très-nuifible à l'intérêt ; quoiqu'on y trouve quelques expreffions alambiquées; quoïle dénouement en foit totalement manqué, on ne peut cependant fe refufer, en le lifant, au charme féducteur qui en rend la lecture agréable, & en fait oublier les défauts. Tout ce que la tendresse a de plus vif & de plus touchant, tout ce que la nature, animée par le fentiment, tout ce qu'une élégante naïveté, la richeffe des détails, la variété des images, la chaleur du ftyle, le pathétique des fituations peuvent offrir à l'ame pour l'intéreffer, la captiver & l'attendrir, fe trouve dans cet Ouvrage préférable à mille autres du même genre. On est seulement fâché que l'infidélité de Zilia, contre l'attente du Lecteur, vienne amortir la fenfibilité qu'elle infpire. Son changement, dont les motifs, malgré l'adresse de l'Auteur, trouvent peu de grace dans un cœur délicat, change auffi les fentimens qu'on fe plaifoit à éprouver en fa faveur. Elle a beau faire des tours de force pour justifier sa foibleffe, on n'y découvre plus que les prestiges d'une confcience qui veut s'étourdir fur les fautes, mais qui n'en impofent point au Juge impartial qui doit

les condamner.

Madame de Graffigny eft Auteur du Drame de Célie, en cinq Actes & en profe. Cette Piece eut beaucoup de fuccès dans fa nouveauté, & le Public fe plaît à la voir représenter. Tel sera toujours Tome II.

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le fort de ces Pieces où l'intérêt domine, quand elles feront réduites aux juftes bornes que leur bon goût doit leur prefcrire.

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GRAMMOND, [ Gabriel, Seigneur DE ] Préfident au Parlement de Toulouse, mort en 1654.

On fait peu de cas de fon Hiftoire de Louis XIII, à caufe de l'inexactitude des faits, que l'envie de plaire au Cardinal de Richelieu lui fit dénaturer; mais on eftime fon Hiftoire des Guerres, que ce même Monarque eut à foutenir contre ses Sujets Proteftans, à caufe des recherches & des anecdotes curicules qu'elle renferme. Le style de ces deux Ouvrages eft peu foigné.

1. GRAND, Joachim LE] Abbé, né à St. Lo, en Normandie, en 1653, mort à Paris en 1733. Il fut très-profond dans l'Hiftoire & dans fa Politique, & fe diftingua dans plufieurs ambaffades, où, fous le titre de Secrétaire, il eut la plus grande part aux affaires qui fe négocierent de fon temps. A fon retour, il exerça dans le Miniftere des Affaires étrangeres, la même place que M. l'Abbé de la Ville & M. Gérard ont fucceffivement remplie avec tant de diftinction & de fuccès. Quoiqu'o ne life plus fes différens Mémoires, parce que les objets fur lefquels ils roulent ont ceffé d'être in

on

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