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Il feroit à fouhaiter qu'ils euffent pu en recueillir davantage. Ses vers ont une tournure qui n'eft qu'à lui feul. Sa maniere de peindre, l'agrément de fon coloris, la vivacité de ses expreffions, la chaleur de fa compofition, le diftinguent de tous ceux qui fe font exercés dans le genre de Poéfiés fugitives. Parmi fes Ouvrages perdus, ceux qu'on doit regretter davantage, font une Epitre à Bayle, qui, dit-on, étoit bien faite, & un Poëme de deux mille Vers fur les Campagnes de Charles XII, dont les fragmens qui nous reftent donnent la plus haute idée. Son Madrigal à Madame de Martel fait connoître combien son esprit étoit facile, délicat & orné.

Le tendre Appelle, un jour, dans ces jeux fi vantés
Qu'Athenes autrefois confacroit à Neptune,
Vit, au fortir de l'onde, éclater cent beautés ;
Et, prenant un ttait de chacune,

Il fit de fa Venus un portrait immortel.
Sans cette recherche importune,

Hélas! s'il avoit vu la divine Martel,
Il n'en auroit employé qu'une.

Lafontaine, Boileau & Chapelle faifoient beaucoup de cas de Lainez & de fes Poéfies. Chapelle fur-tout l'eftima d'une façon particuliere. La reflemblance d'efprit, de caractere & de conduite décide fouvent les fuffrages des hommes: ce fut par-là fans doute que Lainez se

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rendit fi aimable aux yeux de fon confrere, qui avoit les mêmes penchans.

LALANDE, [Jofeph - Jérôme LE FRANÇOIS DE] de l'Académie des Sciences de Paris, de celles de Londres, de Pétersbourg, de Stockholm, de Harlem, de Bologne, de Florence & des Arcades de Rome, né en 17.

Il a cultivé tout à la fois les Lettres & les Sciences. A ce dernier égard, on le place parmi les premiers Aftronomes de notre Nation. En qualité de Littérateur, il a fait connoître, par quelques bons Ouvrages, qu'il eût été en état de fe diftinguer dans cette carriere, s'il s'y füt totalement renfermé. Son Voyage d'Italie eft écrit avec autant d'ordre & de méthode, que de jugement & d'érudition. Tout ce qui regarde la Topographie & les Beaux-Arts, y eft traité de maniere à donner de juftes & de faines idées fur les différentes Contrées & fur les Chefd'œuvres de Peinture, de Sculpture & d'Architecture de cette délicieuse partie de l'Europe. Les réflexions critiques de l'Auteur fe trouvent toujours d'accord avec les vrais principes de l'Art, & avec les remarques des habiles Artistes. On trouve encore, dans les Ouvrages de M. Lalande, un Eloge du Maréchal de Saxe, affez bien écrit,

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pour faire penfer que l'Eloquence ne lui eft pas plus étrangere que l'Aftronomie.

LALANE, [Pierre ] Poëte qui vivoit du temps de Ménage. Il ne fit imprimer que trois Pieces, parce que la délicateffe de fon goût ne lui permít pas, dit-on, d'en faire paroître davantage. On eût pu ajouter qu'il en avoit mis au jour deux de trop, car il n'y a que fes Stances à Ménage qui vaillent la peine d'être lues. En paffant légérement fur quelques-unes qui font minces ou qui ne font que des répétitions, nous rapporterons ici les meilleures, afin de convaincre qu'il n'eft point d'Auteur médiocre où l'on ne puiffe trouver des traits estimables. Il s'agit dans ces Stances d'inviter Ménage à venir habiter la Campagne.

Affranchis-toi, romps tes liens,

Quelque légers qu'ils puiffent estre,
Viens, Ménage, en ce lieu champestre,
Où, content de tes propres biens,

Tu n'auras que toi pour ton maistre.
Non que le Maistre que tu fers
Ne foit un homme incomparable,
Qu'il n'ait un mérite adorable,
Et que la douceur de tes fers
Ne foit charmante & defirable.
Lui-mefme viendroit dans ces bois,
Jouir, au murmure de l'onde,

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༠༥ཟླ་

D'une félicité profonde,

Si les oracles de fa voix

N'eftoient pour le falut du monde.

Toi qui peux prendre ce loifir,
Fuis le tumulte de la ville;
Et fi tu veux être tranquille
Ton ame ne fauroit choifir
Un plus délicieux afyle....

Les plaifirs y font purs & doux,
Comme l'air que l'on y refpire;
L'innocence y tient fon empire,
Et chacun, fans être jaloux,
Y poffede ce qu'il defire....

La plus éclatante grandeur,
Pour qui le Courtifan s'immole,
Nous eft moins qu'une vaine Idole,
Et nous méprifons la fplendeur
De tous les tréfors du Pactole.

Nous n'avons fçu que trop fouvent
Tout ce que peut un beau vifage;
Mais par un tel apprentiffage,
Notre cœur, devenu favant,
En eft auffi devenu fage.

Ici, comme dans un miroir,
Noftre ame à foi-mefme connue,
Et de nulle erreur prévenue,
Se confidere & fe fait voir
Libre, fans fard & toute nuc.

Des violentes paffions,

Qui la tenoient enveloppée,

RY

Comme d'un dédale échappée,
A bien régler ses actions

Elle eft feulement occupée. . . .

Viens donc en ces lieux peu battus,
Où la Fortune & fes careffes,

L'Amour & toutes fes tendreffes
Cedent aux folides vertus,

Qui font nos biens & nos Maiftreffes.

Lalane avoit épousé Marie Galtelle des Roches, qui, felon lui, étoit une des plus belles femmes de fon temps. Une mort prématurée la lui enleva. Après l'avoir célébrée pendant fa vie, il la célébra après fa mort, & l'on foupçonneroit fon amour ou fes regrets d'avoir été trèsfoibles, à en juger par les Vers que M. de SaintMarc a eu tort de recueillir contre l'intention de l'Auteur, qui n'avoit fait que leur rendre justice, en les déclarant indignes de voir le grand jour.

LALLOUETTE, [ Ambroife] Chanoine de Sainte Opportune, à Paris, fa patrie, né en 1654, mort en 1724.

Dans fon Hiftoire des Traductions Françoises de l'Ecriture Sainte, & dans fon Hiftoire & Abrégé des Ouvrages Latins, Italiens & François, publiés pour & contre la Comédie & FOpéra, on rencontre des choses instructives &

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