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Familiere, devient quelquefois triviale & rebu. tante; que fa facilité à tourner une même pensée de différentes façons, donne un air languissant à certains endroits de fes Récits, riches d'ailleurs en tournures, en images, & en fentimens. Mais ces défauts font aufli aifés à corriger, que faciles à connoître. En continuant le genre pour lequel il femble né, le Fabulifte en écartera ce qui le dépare ; & fes talens perfectionnés, par ce moyen, n'auront même plus befoin de l'indulgence, qu'ils font en droit d'obtenir aujourd'hui par le mérite qui les annonce. Il n'est pas moins important pour lui de fe guérir d'un amour de la fingularité, qui fe manifefte dans toutes fes Préfaces. Celle qui eft à la tête de fes Fables, par exemple, eft fur-tout marquée au coin de l'indépendance & de l'innovation. Rien de plus déplacé que de confacrer tant de pages à dénaturer les juftes idées que nous avions de l'Apologue, à en préfenter de fauffes, & à profcrire les regles refpectées jufqu'à nous. Cette Préface eft remplie d'ailleurs d'inutilités, de méprifes, de paradoxes, de critiques injuftes, très-faciles à réfuter, fi les bornes d'un Article, tel que celui-ci, nous le permettoient. En Littérature, comme en Morale, vouloir tout réduire à l'arbitraire, c'eft moins la preuve d'un esprit inventif & original, que l'indice de la

dépravation du jugement & de l'inquiétude qui en est le fruit.

LENFANT, [Jacques ] Miniftre Proteftant, né dans la Beauce, en 1661, mort en 1728.

De tous les Miniftres Proteftans, de l'autre Siccle, qui ont écrit chez l'Etranger, il eft celui dont le ftyle eft le plus par & le plus modéré. La plupart des Ouvrages de fes Confreres, font des déclamations pleines d'emportemens & de menfonges; le langage en eft auffi dégoûtant, par fa barbarie, que le fond des fentimens en eft révoltant. Pour lui, fans renoncer à fes préjugés, comme il le paroît par fon Histoire de la Papeffe Jeanne, qui ne peut être que le fruit d'un efprit exceffivement crédule, ou d'une imagination trop facile à fe remplir de tout ce qui favorife les rêveries d'une Secte] il a fu répan→ dre, dans d'autres Ouvrages historiques, du difcernement, de l'ordre, de la netteté, de l'élégance & de l'inftruction. Tel eft le caractere de fes Hiftoires des Conciles de Conftance, de Pife, de Bâle, qui, à proprement parler, ne font qu'une continuation du même fujet. L'extinction du grand Schifme d'Occident, y eft trèsbien développée, à l'efprit de parti près, qui égare quelquefois l'Auteur. Ces Hiftoires font écrites d'ailleurs d'un ftyle, tantôt fimple & tan

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tôt noble, tantôt grave & tantôt rapide, felon la différence des objets qui fe préfentent.

M. l'Abbé Pluquet & M. Alletz ont profité des Ouvrages de M. Lenfant, l'un dans le Dictionnaire des Héréfics, l'autre dans celui des Conciles. Il feroit à fouhaiter qu'ils euffent toujours puifé dans d'auffi bonnes fources, quant ૩ la diction. Le Dictionnaire de M. Alletz, principalement, offre une bigarrure de style qui déplaît , par la différence qui fe trouve entre un article & un autre article, foit pour le ton, foit pour l'expreffion. Ce défaut confidérable est affez. ordinaire aux Compilations, où les Auteurs ne font que copier, fans fe donner la peine, & fans avoir le talent de refondre & de colorier les lambeaux qu'ils tirent de différens Ecrivains.

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LENGLET DUFRESNOY [ Nicolas ] Abbé, né à Beauvais en 1674, mort à Paris en 1755.

La France a produit peu d'Auteurs auffi laborieux & auffi féconds. Le Public lui doit quarante Ouvrages, qui forment plus de trois cents. volumes. Religion, Morale, Politique, Hiftoire, Géographie, Chymie, tout a été de fon reffort', & par-tout on y reconnoît l'Homme érudit, mais fans jugement, fans principes, & fans goût,

Cet Auteur a été en cela un exemple très-capable de prouver combien un efprit cauftique, indépendant, aidé d'une mémoire prodigieufe eft propre à enfanter d'erreurs, & à les débiter avec affùrance. Jamais les fages Réglemens de la Police, pour la Librairie, ne contrarierent perfonne plus que lui: auffi fut-il toujours en guerre avec les Cenfeurs qu'on lui donnoit pour examiner fes Manufcrits. Entêté dans fes idées, il ne pouvoit le réfoudre aux changemens ou aux fuppreffions les plus néceffaires. Sa méthode étoit, de rétablir à l'impreffion ce qu'on avoit rejeté ou changé à l'examen. Souvent il ne s'en tenoit pas là. Le Cenfeur, dont il étoit mécontent, devoit s'attendre à quelque trait fatyrique, dans le premier Ouvrage que l'Auteur faifoit imprimer.

Un pareil travers paroîtra, fans doute, excufable dans le Siecle où nous fommes. Nous ne diffimulerons pas qu'il eft des Cenfeurs, dont la févérité peu éclairée, les difficultés minutieuses, la foiblesse, la pufillanimité, l'esprit de parti, peuvent donner de juftes mécontentemens aux Auteurs les plus irréprochables. Ils oublient trop aifément qu'ils ne font pas Juges des Productions qu'on leur foumet, & que leur unique fonction eft de rejeter ce qui peut bleffer la Religion, les Mœurs & les Loix. Mais nous n'en

fommes pas moins convaincus de la néceffité de donner des entraves aux efprits fougueux qui cherchent à égarer les autres, après s'être égarés eux-mêmes. Un Etat policé doit n'admetre que les lumieres utiles & bienfaifantes, & rejeter celles qui font équivoques ou dangereuses. Moins d'Hommes savans, ou des Savans raisonnables & bons Citoyens, telle fera la devise de tout Gouvernement fage.

Si l'Abbé Dufresnoy eût pu fe perfuader qu'il valoit mieux ne rien écrire, que d'écrire fans regle & fans égard, il fe feroit épargné bien des défagrémens. Pendant le cours de fa vic, il habita moins fa maifon que la Baftille, où il fut enfermé dix à douze fois. Il étoit fi accoutumé à ces fréquens voyages, qu'en voyant paroître l'Exempt Tapin, auffi-tôt, fans lui donner le temps de s'expliquer, allons vite, difoit-il à fa Gouvernante, mon petit paquet; du linge, du tabac.

LÉONARD. [N.]né en Amérique en 17.. Ce jeune Poëte annonce des talens, fur-tout pour l'Idylle, genre de Poéfie, qui, depuis Madame Deshoulieres, a été cultivé affez infructueusement parmi nous. Ses Paftorales font très-variées, & offrent un agréable tiffu de Penfées naturelles, naïves, délicates, embellies par une verfification douce, fimple,

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