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n

1.

Saint Augustin,

Evêque d'Hyppone, et Docteur de l'Eglise.

P. Gifart fr

HISTOIRE

DES

ORDRES RELIGIEUX

SECONDE PARTIE,

CONTENANT

Les Congregations des Chanoines Reguliers & des Chanoineffes Regulieres, avecles Ordres Militaires qui y ont rapport.

CHAPITRE PREMIER.

Vie de faint Auguftin Evefque d'Hippone en Afrique, &
Docteur de l'Eglife.

A reputation que faint Auguftin s'eft acquife VIL DE S dans l'Eglife par la fainteté de fa vie après fa AUGUSTIN. converfion, & par fes écrits admirables, a été fi grande, que plus de cent cinquante Congregations Religieufes fe font fait honneur de combattre fous les enfeignes, & de le prendre pour leur Patriarche & leur Pere. Nous traiterons dans cette feconde Partie des Chanoines Reguliers en particulier, qui

Tome II.

A

AUGUSTIN.

VIS DES. pretendent eftre fes legitimes descendans, & dans la fuivante, nous parlerons des autres Congregations, qui ont crû ne pouvoir pas fuivre un modele plus parfait & plus accompli de la vie Religieufe que ce faint Docteur de l'Eglife; parmi lefquelles Congregations fe trouveront ceux qui fe qualifient Ermites de fon Ordre, qui pretendent estre auffi fes veritables enfans, & même difputer aux Chanoines Reguliers le

droit d'aîneffe.

C'est donc en qualité de Fondateur d'Ordre & de Pere d'une nombreuse pofterité Religieufe, que nous donnons icy un abregé de la vie de ce grand Saint; & fans entrer dans la difpute de fes enfans, pour fçavoir fi fes premiers Difciples eftoient Chanoines Reguliers ou Ermites; nous conformerons entierement cet abregé de fa vie, fur celle que les RR. PP. Benedictins de la Congregation de faint Maur ont donnée au public en 1700. qui eft à la tête de l'Index general de fes ouvrages, que cette fçavante Congregation par une étude & un travail dont on ne fçauroit trop luy avoir d'obligation, a rendus dans leur pureté, en feparant le vrai d'avec le faux: & comme ces fçavans Religieux ont temoigné eftre redevables en partie de ce qu'ils ont écrit dans cette vie, à feu M. de Tillemont, qui avoit bien voulu leur communiquer les collections & les memoires qu'il avoit affemblés pour la vie de ce faint Docteur, qui a auffi paru fous fon nom en 1702. & qui fert de treiziéme Volume à fes Memoires pour l'Hiftoire Ecclefiaftique; nous avons cru ne pouvoir errer en suivant de fi bons guides.

Thagafte Ville de Numidie dans l'Afrique, & voifine de Madaure & d'Hippone, eftoit autrefois fi peu connuë, , que l'on ignoreroit peut-eftre qu'elle eût efté, fi faint Augustin n'y avoit pris naiffance. Ses parens vivoient honorablement, fon pere exerçoit une charge de Magiftrature dans cette ville, & le faifoit diftinguer parmi les citoïens plus par fon integrité que par fes biens qui eftoient mediocres. Il s'appelloit Patrice; & aiant vêcu long-tems fans les lumieres de la foi, Dieu lui fit la grace un peu avant que de mourir, d'en eftre éclairé, & de recevoir le faint Baptême. Il eut de Monique fa femme plufieurs enfans, du nombre defquels eftoit Auguftin. Elle le mit au monde le premier Novembre de l'an 354. & elle ne l'engendra pas moins felon l'efprit que felon la chair; puifque

AUGUSTIN.

c'est aux larmes continuelles qu'elle repandit pendant plu- VIE DE S. fieurs années devant le Seigneur, que l'Eglife eft redevable de la converfion de ce fils, qui ne fçut pas profiter pendant sa jeuneffe des bons exemples & des avis charitables de cette fainte femme.

Quelque bonne education qu'elle lui donnât d'abord : quelque foin qu'elle prît de l'élever dans la pieté : quelqu'autorité qu'elle eût prife fur fon efprit, & à laquelle il s'eftoit foûmis plûtôt qu'à celle de fon pere, qui ne put jamais prevaloir fur Auguft. celle qu'elle s'y étoit acquife, comme il le dit lui-mêmes tout Conf... cela n'empêcha pas qu'il ne s'abandonnât à des excés de débauche, dont il n'a point eu de honte de fe confeffer publiquement coupable devant Dieu.

c. II.

Le plaifir qu'il prit à la lecture des Poëtes remplie de fables & de fictions, fut le commencement de fon déreglement. Etudiant à Madaure, au lieu de s'appliquer aux premiers éle- Ibid. c. 13. mens des Lettres dont il avoit un grand dégoût, il eftoit vivement touché des avantures d'Enée. Il chargeoit fa memoire des infortunes de ce Prince, pendant qu'il oublioit les fiennes; & pleuroit la mort de Didon, qui fe tua par un excés d'amour pour ce Troïen, au lieu de pleurer celle qu'il se donnoit miferablement à lui-même en fe rempliffant de ces folies. C'est ainfi qu'il décrit fes premiers égaremens, qui s'augmenterent à mesure qu'il avança en âge.

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A l'âge de quinze ans il revint de Madaure à Thagaste, où il interrompit les études; parce que fon pere qui n'eftoit pas des plus ailés, travailloit à faire un fonds pour l'envoïer étudier à Carthage. Tout le monde donnoit des loüanges à Patrice, de faire de tels efforts pour donner moïen à Augustin it. 2. vill. d'aller au loin continuer fes études. Il eftoit zelé, dit ce grand 3. Saint, pour tout ce qui pouvoit fervir à m'établir dans le monde ; mais il ne s'informoit pas fi j'eftois chafte, pourvu que je fuffe éloquent. Comme il fallut bien du tems à fon pere, qui n'avoit pas grand bien, pour amaffer le fonds neceffaire pour ce voiage, ce fut dans fa feizième année qu'Auguftin, qui n'entendoit plus parler ni d'études ni de leçons pendant qu'il demeura à Thagaste, s'abandonna à toutes fortes de voluptés; & fes compagnons fe vantant de leurs débauches, il avoit honte de n'en avoir pas fait autant.

Il alla enfin à Carthage, où il fut auffi-tôt affiegé d'ure

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