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fens de rebutant; mais la foi agiffant en eux plus que leurs fens, ils adorerent celui qu'ils trouverent dans un fi pauvre état, & ils lui offrirent leurs préfens. On voit encore, continue S. Jean Chryfoftôme, la fermeté admirable de la foi des Mages par la maniere dont après avoir adoré J. C. & lui avoir fait leurs préfens, ils reçurent en fonge l'ordre qui leur fut donné du Ciel, de n'aller point retrouver Hérode, ce qui les porta à s'en retourner en leur pays par un autre chemin que par celui par lequel ils étoient venus. Ils ne font pas étonnés d'un tel ordre; mais ils lui obéiffent fans inquiétude, fans trouble & fans faire aucun raifonnement. N'étoit-il pas affez naturel que fur un tel ordre ils fe diffent l'un à l'autre : Si cet enfant eft fi grand en lui-même, & s'il a quelque pouvoir, pourquoi eft-il néceffaire que nous nous retirions fecrétement, & que nous prenions en quelque forte la fuite? Pourquoi après être entrés ouvertement & fans crainte dans Jerufalem, & avoir paru en affurance devant fon Roi, que la crainte d'être détrôné par un nouveau Roi rendoit inquiet & foupçonneux; pourquoi

Serm. I. in Epi. n°. 5. P. 798.

après cela l'Ange du Seigneur nous fait-il fortir d'ici comme des fugitifs qui auroient quelque crime à fe reprocher? Les Mages furent bien éloignés de penser & de parler ainfi. C'eft, dit S. Jean Chryfoftôme, que le caractere de la véritable foi eft d'obéir aux com→ mandemens de Dieu fans en demander la raison. Illud enim maximè ad fidem pertinet, ut nulla mandatorum ratio exquiratur, fed juffis tantùm obediatur.

Enfin S. Bernard admirant comme les autres Peres qui l'ont précédé, la grande foi des Mages, leur adreffe ainfi la parole: Que faitesvous, ô Mages, que faites-vous? Vous adorez un enfant qui eft à la mamelle, dans une vile étable, & couvert de pauvres langes! Eft-il donc vrai que cet enfant eft Dieu ? Certes Dieu eft dans fon temple, & le Seigneur a fon trône dans le Ciel: & vous venez le chercher dans une pauvre étable, & dans les bras d'une mere pauvre ? Que faites-vous encore en lui offrant l'or? Eft-il donc Roi? Mais où eft fon palais, où eft fon trône, où est cette foule de courtisans, dont les Rois font environnés? Une étable eft-elle donc le palais d'un Roi, une crêche est

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elle un trône ? Deux pauvres perfonnes telles que Marie & Jofeph, qui font feules dans l'étable avec l'enfant que vous adorez, forment-elles la cour d'un Roi? Comment des hommes qui avoient la réputation de fages, font-ils devenus fi infenfés que d'adorer un petit -enfant, qui paroiffoit auffi méprifable par fon âge que par la pauvreté de fes parens? Ils font devenus infenfés, fe répond à lui-même S. Bernard, pour devenir fages; & le Saint-Efprit leur avoit appris d'avance, ce que l'Apôtre a enfeigné depuis: S'il y a quelqu'un 1. Cor. I.L parmi vous qui paffe pour fage felon le monde, qu'il devienne fou pour devenir Jage; c'eft-à-dire, qu'il reçoive avec fimplicité les vérités Evangéliques que le monde traite de folie, c'est le feul moyen d'être véritablement fage: Dieu dit encore le même Apôtre, voyant que Ibid, I. ari le monde avec la fageffe humaine ne l'avoit point connu dans les ouvrages de fa fageffe divine, il lui a plu de fauver par la folie de la prédication, ceux qui croiroient en lui. C'eft-à-dire, les hommes avec leur prétendue fageffe n'ayant pas reconnu la fageffe divine dans l'ordre admirable du monde, Dieu, pour les humilier & les confondre, a voulu

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qu'il n'y eût point d'autre voie pour arriver au falut, que la croyance d'un Dieu anéanti & crucifié; ce qui paroît une folie aux fages du fiecle.

A qui comparerons-nous les Mages, Serm. II. dit encore S. Bernard, & à qui les croiin Epi. n°. rons-nous femblables? Si je confidere la foi du bon Larron, & celle du Centenier, préfens à la mort de J. C. dont tous deux reconnurent la divinité, dans le temps même qu'il étoit attaché à la croix, & qu'il mourut comme un criminel, la foi des Mages me paroît encore plus grande que la leur; parce que quand le bon Larron & le Centenier confefferent la divinité de J. C. au temps de fa mort, il avoit déja fait plufieurs miracles, & il avoit déja été prêché & adoré par plufieurs; mais rien de tout cela n'étoit arrivé, lorfque les Mages vinrent adorer à Bethleem.

Serm.

XXXVI.

70.

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Le grand Pape S. Léon avoit fait, fur l'E- avant S. Bernard, la même réflexion, piph. c. a. pour montrer la grande foi des Mages. Lors, dit-il, que l'éclat d'une nouvelle étoile eut conduit les Mages à Bethleem pour y adorer J. C., ils ne le virent point, commandant aux démons, reffufcitant les morts, rendant la vue aux aveugles, faifant marcher les boiteux,

& parler les muets, ou opérant quelqu'autre miracle; mais ils trouverent un enfant réduit au filence, & dépendant des foins de fa mere.

N'étoit-il pas à craindre, demande S. Bernard, qu'en voyant des chofes fi indignes de la majefté du Roi des Rois, ils ne fuffent fcandalifés, & ne cruffent avoir été trompés? Non, répond ce Pere, parce qu'ils ont pour maître celui qui a été leur conducteur jufqu'à Bethleem, & que celui qui les a avertis au dehors par une étoile, de la naiffance de J. C., les a auffi inftruits au dedans & parlé à leur cœur par cette voie puiffante de la grace, qui fait fe faire

obéir.

Serm. I. fur l'Epiph.

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Faifons-nous, fur cette foi des Mages, une jufte idée de ce que c'eft que la foi qui doit être dans tous les Chrétiens. D'abord par la foi on croit fans héfiter toutes les vérités qui en font l'objet, & on ne fe permet aucun doute. Ne voiton pas dans les Mages, ce premier caractere de la foi ? Combien la leur eftelle ferme, affurée, & exempte de toute hésitation! Quam certa fides & s. Bern. nihil penitus hæfitans. Ils ne demandent Serm. 11. in Epiph. n°. point s'il eft né un Roi des Juifs, mais 3. ils parlent avec une entiere certitude & By

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