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grace, doit être pénétré de la plus vive douleur de la perte qu'il en a faite.

20. Dès qu'ils s'apperçurent qu'il n'étoit pas avec leurs parens, ni avec les perfonnes de leur connoiffance, ils fe mirent auffi-tôt à le chercher. De même un pécheur ne doit apporter aucun délai, pour s'appliquer à recou vrer la perte qu'il a faite de la grace. 2139. La fainte Vierge & S. Jofeph, n'ayant point trouvé J. C. parmi leurs parens & ceux de leur connoiffance, ils retournerent à Jerufalem, pour l'y chercher, & ils le trouverent en effet dans le temple, affis au milieu des Docteurs. C'eft ici une leçon qui apprend aux pécheurs à ne pas fe rebuter des premieres difficultés qu'ils rencontrent dans le grand ouvrage de leur converfion, ni des retardemens de Dieu, s'il paroît pendant un temps ne fe pas rendre à leurs prieres, auffitôt qu'ils le fouhaiteroient, mais à le chercher avec perfévérance, & jusqu'à ce qu'ils l'aient trouvé.

4°. La fainte Vierge & S. Jofeph ne trouverent point J. C. parmi leurs parens, ni ceux de leur connoiffance, mais dans le temple. C'eft une figure qui montre aux pécheurs, que ce

C

n'eft point au milieu des compagnies du monde, & dans les diffipations des plaisirs, ou de trop d'affaires, qu'ils pourront recouvrer la perte de la grace, mais dans une pratique exacte & fidele des exercices de piété, marquée par le temple, où J. C. fut trouvé, par la fainte Vierge & S. Jofeph.

Reprenons toutes ces réflexions pour leur donner quelque étendue & les rendre, par-là, plus utiles.

V. 1.

1o. La fainte Vierge & S. Jofeph chercherent J. C. le cœur ferré de douleur, de l'avoir perdu. Dieu veut être cherché de même par les pécheurs, qui ont eu le malheur de perdre fa grace. Il s'en eft clairement expliqué par ce qu'on lit dans le livre du Deutéronome, que Moyfe dit aux Juifs: Dans ces lieux-là même, dit-il, où Dieu Deut. XXX vous aura difperfès, en punition de vos péchés, vous chercherez le Seigneur votre Dieu, de tout votre cœur, & de toute l'amertume de votre ame. Pourquoi le pécheur doit-il ainfi chercher dans l'amertume de fon ame, la grace qu'il a perdue? C'eft qu'il n'y a pas de perte plus funefte, & par-là plus digne de larmes. Pour le fentir, comparons l'état d'un jufte, qui poffede l'inefti

mable trésor de la grace, avec celui d'un pécheur, qui l'a perdue. Un Chrétien, en état de grace, eft l'objet des complaifances de Dieu, fon enfant, fon héritier. Il eft la joie des Anges & des Saints du Ciel ; il eft l'ornement, la gloire, la confolation, & l'édification de l'Eglife, dans laquelle il répand, par fa vie fainte, la lumiere de la piété, & la bonne odeur de J. C. Mais au contraire, un pécheur eft l'ami, l'enfant, l'esclave, & le temple du démon: il ne mérite plus que l'enfer, au lieu du Ciel, auquel il avoit droit étant jufte. Il eft pour les Anges & pour les Saints du Ciel, un objet d'horreur; & pour l'Eglife le fujet de fes larmes & fa honte, parce qu'il la déshonore par fa mauvaise vie.

Mais qu'un rayon de la grace, pénétrant dans l'ame de ce pécheur, lui faffe appercevoir cet état fi miférable & fi affreux, où le péché l'a mis, &, qu'en l'éclairant ainfi, elle le touche en même temps, pourra-t-il n'être pas pénétré de la plus vive douleur de s'y voir, fur-tout en confidérant qu'il s'y eft lui-même mis, par fa faute, & pour un plaifir d'un moment? Quelle douleur plus légitime

& plus jufte, que celle qui a pour objet la perte de la grace, cette perte étant le plus grand de tous les malheurs! Il n'eft point non plus de dou leur plus néceffaire, & plus indifpenfable. En effet, fi le pécheur défire d'être réconcilié avec Dieu, il doit commencer par fe mettre d'accord avec lui. Et pour cela ne doit-il pas commencer par haïr, & détefter en lui-même le péché que Dieu y hait & y détefte? Il doit auffi commencer par fatisfaire à Dieu, pour l'injure qu'il lui a faite, en préférant un plaifir criminel, à fa volonté & à fa loi. Et la douleur d'un faint repentir, n'eftelle pas le moyen le plus naturel & le plus proportionné, qu'on puisse prendre pour expier les péchés, qu'on a commis en recherchant les plaifirs défendus? Cette douleur eft auffi le plus fort témoignage, que le pécheur puiffe porter contre lui-même, pour condamner fon injuftice & fon ingratitude envers Dieu. C'est ce qui a fait dire à S. Paul: La trifteffe, qui eft 11.Cor.VII. felon Dieu, produit pour le falut, une pénitence ftable. Tous les faints pénitens ont été pénétrés de cette fainte trifteffe. Je me contente de rapporter

10.

les exemples de quelques-uns de ceux dont il eft parlé dans l'Ecriture.

David pénitent ne fe nourrit plus

que d'un pain de larmes, & il s'en Pf. XLI. 4. nourrit le jour & la nuit. Il arrofoit P. VI. 7. & trempoit fon lit de fes pleurs. Il les Pl. C1. 16. méloit avec fon breuvage, fes yeux dePf. VI.7. viennent tout languiffans, par la quantité qu'il en répand, & il s'épuise à force de gémir.

Matth.

S. Pierre, auffi-tôt qu'il eut reconnu XXVI. 75 fa faute, la pleura amérement, felon Luc. XXII. le témoignage des faints Evangéliftes, S. Matthieu & S. Luc.

62.

38.

Cette femme de mauvaife vie dont parle le même Evangélifte S. Luc, attirée par la grace aux pieds de J. C. Luc. VII. les arrofa de fes larmes : tant étoit grande l'abondance qu'elle en répandit, & elle ne lui expliqua fa mifere & ne le pria de l'en délivrer, que par la voix de fes foupirs & de fes pleurs.

Comparons les fentimens & la conduite de ces pécheurs fi vivement touchés, avec ceux des prétendus pénitens de nos jours; quelle prodigieufe différence n'y appercevrons-nous pas du premier coup-d'œil! Hélas! à peine voyons-nous les pécheurs penfer quel

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