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in Atticis.

fon grand-pere, la mena avec lui, & où commença une paffion trop funefte dans la fuite. Comme elle n'ofa la déclarer à fon Amant, ni demander à fon époux qu'il fît venir Hippolite à Athenes, elle s'avifa de faire bâtir un Temple à Venus fur une montagne qui étoit près de Trezene, où fous prétexte d'aller offrir fes voeux à la Déeffe, elle avoit occafion de voir fon Amant qui faifoit fes exercices dans la plaine voisine (a). Elle fit d'abord nommer ce Temple, Hippolition; & dans la fuite on l'appella le Temple de Venus la Speculatrice (1): mais cet expédient ne foulageoit pas cette (1) Paufan, malheureuse amante; Hippolite n'entendoit pas, ou feignoit de ne pas entendre ce langage muet: enfin elle résolut de lui déclarer fa paffion, & fa déclaration fut mal reçue. Son amour augmentant de jour en jour, ainfi que les mépris d'Hippolite, elle fe pendit de défefpoir, pendant l'abfence de Thefée, qu'Aidonée Roi d'Epire retenoit prifonnier, comme nous le dirons ailleurs. Thefée étant arrivé peu de temps après, & ayant trouvé dans la main de cette infortunée Princeffe un billet par lequel elle déclaroit qu'Hippolite avoit voulu la deshonorer, & qu'elle n'avoit évité ce malheur que par la mort, il envoya promptement chercher ce jeune Prince, pour le punir de cet attentat. Celui-ci qui ignoroit le deffein de fon pere, fe preffa fi fort d'arriver, que les chevaux échauffés prirent le mords aux dents; & fon chariot s'étant brifé, il fut traîné parmi des rochers où il perdit la vie.

Quelques Auteurs prétendent (b) qu'Hippolite arriva à Athenes, d'où fon pere le bannit après l'avoir comblé de malédictions. On ajoute que Neptune pour venger l'opprobre de Thesée, fit fortir de la mer un monftre, qui épouvanta fi fort les chevaux, qu'ils trainerent Hippolite parmi des rochers, où il perit de la maniere qu'Ovide le raconte (2). (2) Met.l.15. Peut-être, & c'eft fans doute ce qu'il y a de plus véritable, que ce Prince accablé de douleur, & n'ayant pas fongé à

(6) Voyez Meleriac, Epitre de Phe

(a) Voyez Ovide, Epitre de Phedre à Hippolite. Meferiac fur cette Epitre ; Pau- dre à Hippolite. fanias, in Atticis. Plutarque, &c.

gouverner fes chevaux, fut malheureusement renversé de fon chariot. Il parut en Italie du temps de Numa Pompilius un faux Hippolite qui voulut paffer pour le fils de Thesée : il habitoit, au rapport d'Ovide, dans la forêt d'Aricie, & fe faifoit nommer Virbius comme qui diroit deux fois homme, publiant qu'Efculape l'avoit reffufcité; mais les Atheniens qui avoient vû perir le vrai Hippolite, n'ajouterent point de foi à cet Impofteur.

Hippolite, au refte, fut adoré comme un Dieu à Trezene, dans un Temple bâti Temple bâti par Diomede, qui le premier rendit des honneurs divins à ce Prince, ainfi que nous l'appren nons de Paufanias. Le Prêtre qui avoit foin de fon culte étoit perpetuel, & la fête de ce Dieu fe célebroit tous les ans. Entre autres céremonies qu'on y pratiquoit, les jeunes filles avant que de fe marier coupoient leurs cheveux, & les lui confacroient dans fon Temple. Les Trezeniens, ajoute le même Auteur, ne convenoient point qu'Hippolite füt mort entraîné par des chevaux ; ils vouloient au contraire persuader que les Dieux l'avoient enlevé dans le Ciel parmi les conftellations, où il forme celle qu'on nomme le Conducteur du chariot.

Il est étonnant, au refte, que Plutarque qui a écrit fort au long l'Hiftoire de Thefée, ne faffe aucune mention de cette avanture. Auroit-il voulu par-là épargner la honte de fon Heros? Mais il en rapporte d'autres faits qui ne lui font pas fort honorables, tels que l'enlevement d'Helene & le projet de ravir auffi, pour fon ami Pirithoüs, la fille ou la femme d'Aidonée, &c. Les Poëtes Tragiques qui l'ont exposée fur le Theatre, l'auroient - ils inventée ? Mais des monumens certains l'établiffent, & le Temple de Venus dont nous venons de parler, en étoit une preuve vivante. D'ailleurs la mémoire de Thesée étoit trop chere à Athenes, pour qu'ils euffent ofé inventer de leur chef une histoire fi honteufe pour lui.

Une grande marque du refpect qu'on avoit pour ce Heros, c'eft que dès-qu'on eut trouvé fes.os, que l'Oracle avoit ordonné aux Athéniens de chercher dans le lieu où il étoit

mort, on les porta à Athenes, & on fit conftruire en fon honneur un Temple qui devint l'afyle le plus refpecté. On croyoit même lui avoir l'obligation du gain de la bataille de Marathon, dans laquelle on publia qu'il avoit paru dans l'armée des Grecs & combattu pour eux. Difons que Plutarque n'a pas écrit cette vie avec tout le foin qu'elle demandoit. On y trouve en effet plufieurs omiffions, ainfi qu'on peut le voir en la comparant avec ce qu'en a recueilli le fçavant Meurfius (1):des (1) In Theseo. contradictions manifeftes, fur-tout au fujet du voyage de la Colchide, ainsi que nous le remarquons dans une autre occafion : enfin des repetitions, beaucoup de confufion dans l'ordre des faits: en un mot, quelque bonne opinion qu'on ait de cet Auteur, on ne peut regarder cette vie que comme une compilation très-imparfaite.

CHAPITRE X.

Hiftoire de Dedale & du Labyrinthe de Crete.

EDALE (a) fils d'Hymetion, petit-fils d'Eupoleme, &

contredit le plus fçavant Ouvrier que la Grece eût jamais produit: habile Architecte, ingénieux Sculpteur, il inventa plufieurs inftrumens dans ces deux Arts, comme la coignée, le niveau, le tariere, &c. ainsi que nous l'apprenons de Pline. On lui donne auffi la gloire d'avoir le premier fait les antennes des Vaiffeaux, & de s'être fervi de voiles, au lieu de rames; mais rien ne le rendit fi célebre que l'art de faire des Statues, où il réuffit fi bien, qu'on publia qu'elles étoient animées, qu'elles voyoient, & qu'elles marchoient: Fable

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(1) Loc. cit.

(2) Liv. 4.

:

fondée, non comme l'a prétendu Ariftote (a), parce qu'il faifoit des automates qui marchoient par le moyen du vifargent qu'il mettoit dedans, mais parce qu'avant lui les Statues chez les Grecs étoient extrémement groffieres, fans yeux, fans bras & fans jambes ; elles n'étoient que des maffes informes de pierre comme on en voit encore dans les Cabinets des Curieux. Dedale, au rapport de Suidas, de Themiftius, & de Palephate, leur fit des vifages reffemblants, leur forma des bras, & fepara leurs jambes, ce qui le fit admirer de tout le monde (b) mais fes malheurs, comme le remarquent Paufanias (1) & Diodore (2), le rendirent dans la fuite aussi célebre que fes beaux Ouvrages. Il avoit pris grand foin de l'éducation d'un de fes neveux, nommé Talus, fils de fa fœur Perdix, & ce jeune homme fit tant de progrès en peu de temps fous un fi habile Maître, qu'il inventa auffi plusieurs inftrumens très-utiles. Le premier, & c'étoit fon coup d'ef (3) Diod.1.4. sai (3),fut la roue dont fe fervent les Potiers de terre.Ayant ensuite rencontré la machoire d'un ferpent, & s'en étant servi pour couper un petit morceau de bois, il tâcha d'imiter avec le fer l'âpreté des dents de cet animal, & ce fut ainsi qu'il donna aux gens de fa profeffion la fcie, qui eft un de leurs inftrumens les plus utiles. Enfin c'eft de lui que nous vient le tour, & quantité d'autres inventions d'un grand usage dans les arts méchaniques.

Deux inventions fi utiles donnerent de la jalousie à Dédale, & de peur que fa réputation ne fût un jour obfcurcie par celle de fon neveu, il le fit mourir fecretement; mais ayant dit à un de ses amis qu'il venoit d'enterrer un ferpent, on découvrit fon crime, comme nous l'apprend Diodore de Sicile, qui obferve que le même animal qui avoit donné lieu à ce jeune homme d'inventer la fcie, objet de la jalousie de fon oncle, fervit auffi à déceler l'auteur de fa mort. Ovide

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feint qu'il l'avoit précipité du haut de la citadelle de Minerve (a), & que cette Déeffe qui favorife les beaux Arts, l'avoit changé en perdrix, Fable fondée fur la reffemblance du nom de Perdix, mere de Talus, avec cet oiseau (b).

Si nous en croyons Diodore de Sicile (1) & Apollodore (1) Liv. 4l'Areopage d'Athenes avoit condamné Dedale à la mort ; mais Servius dit que ce ne fut qu'à un baniffement perpetuel. Quoiqu'il en foit, ce meurtre lui ayant attiré l'indignation de tout le monde, Dedale fortit fecretement d'Athenes, & fe retira dans l'Ifle de Crete, où Minos ravi d'avoir un homme fi célebre, le reçut très-favorablement. C'eft pendant fon séjour dans cette Ifle, qu'il bâtit dans la ville de Gnoffe le fameux Labyrinthe dont on a tant parlé.

On entend par le mot de Labyrinthe, une efpece d'édifice, rempli de chambres & d'avenues difpofées de maniere que l'on entre de l'une dans l'autre, fans pouvoir retrouver la fortie; ce que Virgile, Catulle, & Ovide expriment fort heureusement (c).

Pline (d) prétend que Dedale avoit voyagé en Egypte, & que c'étoit-là qu'il avoit pris le modele de ce fameux Labyrinthe, qui a paffé pour une des merveilles du monde (2); (2) Voyez mais qu'il n'en avoit imité que cette partie qui regarde les Herod. liv. 2. chambres & les détours des allées; c'est-à-dire, la centiéme C. 148. partie. Pour prouver que Dedale avoit été en Egypte, on citoit plufieurs monumens qu'on difoit être de lui; & on ajou

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