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IV.

publiques.

le fupplice pour découvrir des com plices.

Ces terribles exécutions donnerent Difputes lieu à des difputes publiques. En Systême de 1583. Adolphe Scribonius, qui pafScribonius, foit pour un fort habile Philofophe fer l'épreuve, étant allé à Lemgow dans le Comté

pour autori.

de Lippe en Weftphalie, y vit brûler trois Sorcieres, & emprifonner en même temps trois autres femmes, * qui furent menées le lendemain à l'épreuve, & qui jettées par trois fois dans la riviere n'enfoncerent pas plus qu'un morceau de bois. Le Philofophe, étonné de voir cet effet li furprenant, fut prié par les Magiftrats d'en chercher la caufe. Il s'y appliqua, & donna en peu de temps au public un Syftême, dans lequel il prétendit que les Sorciers étoient néceffairement plus légers que les autres hommes, parceque le Démon, dont la fubftance eft fpirituelle & volatile, pénétrant toutes les parties de

* Nempe pedibus manibufque-ligatæ, & vestibus priùs exutis, hac ratione vinctæ erant, ut dextri lateris manus finiftri pedis pollici, & viciffim finiftra manus dextro pedi ar&tè colligaretur, ut ne_nimium quidem fe aut corpus fuum movere poffent.. Scribonii Epift. de purgat, Sagarum fuper aquam frigi. dam project.

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leur corps, leur communiquoit de fa légereté;& qu'ainfi devenus moins pefans que l'eau, il n'étoit pas poffible qu'ils enfonçassent.

V.

Réfutation

Quelque ridicule que fût ce Syfteme, il fit condamner bien des gens du Syfteme. au feu fans fcrupule. Le raifonnement étoit fans doute abfurde. Car, quand il feroit vrai que le Démon poffede corporellement ceux qui ufent de fortilege, ce qui fe dit fans preuve, il ne les rendroit naturellement ni plus légers, ni plus pefans; parceque la nature du Démon n'a nul rapport de pefanteur, ou de légereté avec l eau ni avec aucun autre corps. C'eft une idée de chercher en ce cas une raifon phyfique & naturelle. On pourroit dire avec plus de fondement que, fi le Démon entroit dans le corps des Sorcieres, il les rendroir peut-être plus pefantes, & les feroit enfoncer dans l'eau, puifque nous voyons dans le Nouveau Teftament, que lorfque JESUS-CHRIST permit aux Démons d'entrer dans un troupeau de pourceaux, on les vit bien

*

*Exierunt ergo Dæmonia ab homine, & intraverunt in porcos; & impetu abiit grex per præceps in ftagnum, & fuffocatus eft. S. Luc. cap. 1x.v. 31. Matth. v111. V. 32%.

V I. Autre réfu

tation par Nevvalds.

vite fe précipiter dans l'eau, où ils fe noyerent,

L'imagination de Scribonius parut ce qu'elle étoit à plufieurs Savans, qui avoient de la peine de voir autorifer une pratique fi pernicieufe. Newalds en fit une réfutation fous ce titre : Exegefis purgationis five examinis fag.rum fuper aquam frigidam, &c. Il repréfente combien il eft furprenant que des Magiftrats se fient à une expérience auffi téméraire que celle-las qu'il en faut dire de même que des épreuves de l'eau bouillante, & du fer chaud, qui ont été condamnées: qu'on y tentoit Dieu; qu'on convenoit affez que l'effet du furnagement de ces femmes venoit du Démon,qui veut féduire les hommes, & non pas de la légereté de fa nature. 1. Parcequ'un pacte avec le Démon ne change rien à la fubftance du corps. 2. Parceque la pefanteur ou la légereté ne dépendent pas de l'introduction

d'une forme.

Newalds remontre encore que la Démon ayant part à cette épreuve, perfonne ne doit s'y fier, parceque le Démon eft un efprit de menfonge; qu'on ne peut y recourir fans.

offenfer Dieu mortellement; & que Vignorance fur ce point ne peut ex cufer les Juges, qui doivent favoir que les épreuves vulgaires ont été profcrites.

VII. Réfutation

man & 20•.

Ce Traité ne fit pas changer de fentiment à Scribonius. Il le foutint de nouveau dans un plus long Ou- par Godelvrage en 1588. au fecond Livre des tres. moyens de connoître les Sorciers, & mérita d'être réfuté auffi de nouveau par divers Auteurs. Godelman, célebre Jurifconfulte,en cite plufieurs, trois ans après, dans le Traité des Magiciens. Il s'étonne: que Scribo De Magis nius ofe encore porter des Juges veneficis, &c. ignorans à ordonner cette épreuve, nofcendis & qui pourroit faire périr plufieurs in puniendis, nocens ; & ne doute pas que ces Ju- 1591ges ne duffent être pris à partie, en réparation d'injures, comme s'ils avoient fait emprifonner ou punir quelqu'un injuftement..

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hanc

*Admiration? itaque dignum eft Scribonium contra jura manifefta, & communem Jurifconfultorum, Medicorum. & Philofophorum Sententiam abrogatam confuetudinem in lucem revocare & imperitis Judicibus eamden inculcare, eofque in: difcrimen adducere. Dubium enim non eft Judicem qui hac exploratione furiofa, diabolicâ & prohibitâ ucitur, conveniri poffe actione injuriarum minùs quam aliquem injuftè in carcerem conje eiffet, Lib-1. cap. v. p, 42; Mw

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nons

Lamiis cog

Francof..

VIII

On n'en re

vient pas.

Traité d'un

Il ajoûte, contre Scribonius & tous ceux qui croyoient l'épreuve infailli ble, qu'elle étoit au contraire fort trompeufe, & le prouve par des expériences dont il avoit été témoin: des femmes Sorcieres, convaincues de crimes énormes, & condamnées au feu, ayant enfoncé dans l'eau. C'est pourquoi il espéroit que Scribonius reviendroit enfin de fon fen timent. Quapropter non dubito Scribonium, virum aliàs doctissimum, tandem fpontè veritati locum daturum.

Tout cela ne fit revenir ni cet Aureur, ni la plupart des Juges. Un Juge en fa. Magiftrat de la Ville de Bonn, près veur de l'é- de Cologne, voulut même justifier cette épreuve par un ouvrage exprès fous ce ce titre* Défense de l'épreuve de l'eau froide, dont la plupart des Juges fe fervent aujourd'hui dans l'examen

preuve.

des Sorcieres.

Cet Auteur, ou ce Juge, nommé Rickius, entreprend de réfuter ceux qui avançoient que cette épreuve étoit incertaine, qu'elle étoit défendue, qu'on y tentoit Dieu, que les:

* Defenão probæ, ut loquuntur, aquæ frigidæ,qua in examinatione maleficarum pleriqué Judices » hodit utuntur.

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