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pour dérober aux perfonnes éclairées la vûe de ces fadaifes. Ils auroient eu plus de raifon de dire, qu'il étoit dangereux de boire aux rivieres comme les chiens, parceque ceux qui ont été mordus par un chien, ou par un autre animal enragé, feroient choqués de voir leur image dans l'eau ; & que cette vûe graveroit trop avant dans leur imagination le fouvenir de l'animal. C'eft pour cette raifon que les Medecins ont donné le nom d'Hydrophobie à la maladie de la rage. Je ne m'arrête point fur ce qu'on auroit dû retrancher ces mots fuperflus dans un verre, qui ne demandent point d'explication, pour ne pas donner de l'inquiétude aux Peléríns timides & groffiers.

Il peut boire du vin rouge, clairet & blanc mêlé avec de l'eau, ou bien de l'eau pure. Ainfi par ce quatrieme article les Religieux de Saint Hubert font perdre aux perfonnes intelligentes la créance d'un miracle de préfervatif contre la rage, en l'obscurciffant du moins par une précaution naturelle; & l'explication, conçue en ces termes fi clairs, leve toute forte de doute. Le mêlange de l'eau avec le vin, l'eau pure, & le re

la

tranchement de toute autre boiffon, marquent la mortification, & le foin que perfonne doit apporter pour éviter tout excès & échauffement du fang, fi contraire à la guérifon de la rage. Le mêlange de l'eau fe reffent en effet de la mortification; mais c'eft lorfque fa quantité furpaffe celle du vin. Or ce n'eft pas ainfi que ce mêlange eft défigné dans l'article dénué d'explication, tel qu'il eft conçu dans un petit imprimé qui contient les cérémonies de la Neuvaine, que les Religieux de Saint Hubert ont la politeffe de donner aux Pélerins. Pourquoi les pauvres ne croiront-ils pas par-là qu'on leur défend auffi la bière, quoiqu'elle n'échauffe pas le fang.

Il peut manger du pain blanc, ou autre, dit-on dans le cinquieme article; de la chair d'un porc male d'un an ou plus des chapons, & poules auffi d'un an ou plus ; des poiffons portants écailles, comme barangs forets, carpes, &c. des œufs durs cuits; & toutes ces chofes doivent être mangées froides. L'explication de cet article ne fatisfait point les Théologiens & les Curés, & choque les Medecins. On permet, dit-on, certains alimens, retranchant les autres par efprit

de

de pénitence & d'abftinence, comme on peut voir par l'article neuvieme. Qui ne voit que l'on retranche la chair des jeunes animaux, en permettant de manger celle de ceux qui ont un an ou plus, pour faire pratiquer la pénitence, en faisant abstinence des délicateffes qui fe trouvent dans les plus jeunes; & que c'est le même efprit d'abftinence qui exclut les poissons fans écailles, les œufs affarfonnés, &i. Ainfi, tandis qu'on conferve l'ombre de la mortification, on ne défend pas réellement les mets délicats à ceux qui font munis d'une parcelle de la fainte Etole car l'article & l'explication ne profcrivent point l'affaifonnement des poiffons. Elle défend véritablement les œufs affaifonnés: mais, outre qu'on cache tout cela aux Pelérins, c'est une précaution inutile & annoncée trop tard. Les Medecins traitent de frivole la diftinction de porc mâle & de poule d'un an : les Confeffeurs prononceront qu'elle eft inutile pour la mortification; & les gens fages craignent qu'elle ne tourmente en vain les efprits des Pelé

rins

Il ne faut pas peigner fes cheveux pendant quarante jours. Dans l'explication Tome II.

C

de ce fixieme article on dit, que cette mortification eft affez connue & reçue; outre qu'avec une dent du peigne on pourroit faire fortir la parcelle de la fainte Etole; contre quoi on ne fauroit apporter trop de précaution. Sans nous arrêter fur cette défenfe inutile de fe peigner pendant quarante jours pour ne pas faire fortir la parcelle de la fainte Etole, puifqu'au dixieme jour il leur eft permis d'ôter le bandeau, je crois cette forte de mortification fort finguliere. J'appellerois plutôt mal-propreté une fi longue négligence de fa chevelure; & il faut la laiffer aux infenfés. Certes il ne faut pas la pouffer fi loin, pour empêcher, comme l'on dit, la fortie de la parcelle de la fainte Etole, parceque la peau du front qu'on a coupée fe renouvelle plus promptement. Ce genre de mortification ne convient ni à ceux qui ont des cheveux, ni à ceux qui n'en ont pas. L'explication de cet article rappelle ce que Melchior Canus, Evêque des Canaries, a écrit fi élégamment. (a) Qui croira, dit-il, que Saint François d' Affife avoit coutume de mettre fur lui les poux qu'on jettoit? L'Auteur (a) De locis Theolog. L. XI. cap. 6.

de fa vie a cru que ce trait appartenoit à la fainteté de ce grand perfonnage: pour moi, je n'en crois rien, fachant que ce faint homme a aimé la pauvreté, mais non la mal-propreté.

Suivant le feptieme article, Celui qui a été taillé doit faire délier le dixieme jour fon bandeau par quelque Prêtre, qui le fera brûler, & en mettra les cendres dans la pifcine; parcequ'il a fervi difent les Auteurs de l'explication, a contenir la parcelle de l'Etole miraculeuse dans le front de la perfonne taillée, & qu'il peut arriver que la dite parcelle forte de la cicatrice avec le fang, & s'attache au bandeau, quoiqu'on ne la voie pas. Mais pourquoi demander un Prêtre? C'est ce que les Docteurs de Paris n'ont jamais fû? Les Religieux de Saint Hubert permettent à tous les Laïques de quelque confidération de toucher la fainte Etole. Pourquoi des Laïques ne pourront-ils pas délier ce bandeau ? Les Diacres portent dans l'Eglife le corps du Seigneur dans le faint Ciboire; autrefois ils diftribuoient fon Sang.Les Soûdiacres portent les Saintes Reliques: Pourquoi donc faudroit-il le miniftere d'un Prêtre pour délier le bandeau ? Je

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