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Ces couleurs, dit Thomson (1), varient et se succèdent régulièrement l'une à l'autre à mesure que la température augmente. A 221 ̊ centigrades, commence la première teinte; à 232°, elle est d'un jaune très - pâle; à 237° d'un jaune - paille. La couleur devient de plus en plus foncée avec l'augmentation de la chaleur ; la surface des aciers chauffés passe ensuite successivement par les nuances du jaune, du brun, du rougepourpre; et à 304°, la nuance est celle du bleu foncé.

On recuit l'acier de deux manières différentes : 1o on trempe 1209. l'acier, on le laisse refroidir, et on l'expose à l'action du feu jusqu'à ce qu'il ait pris la température dépendante de la dureté qu'il doit avoir; 2o on trempe l'acier en partie, on le retire lorsqu'il est encore chaud, on le laisse un peu refroidir dans l'air, puis on le refroidit complétement dans l'eau.

La première méthode est la plus généralement pratiquée; elle est un peu plus longue, mais elle est aussi plus exacte: pour cela, on blanchit la surface de l'acier trempé, sur une meule ou sur un grès, avec de la pierre ponce; on pose la pièce sur un feu de charbon, et on la chauffe lentement, la face blanchit étant tournée par en haut; on observe la marche de la coloration, afin de sortir la pièce au moment où elle approche, ou lorsqu'elle a atteint la couleur qu'elle doit avoir, puis on la retire pour la laisser refroidir lentement dans l'air. Comme l'oxidation continue pendant que la pièce se refroidit, on obtient toujours, après le refroidissement, une teinte un peu plus avancée sur le gris que n'était celle que l'on avait observée en retirant la pièce.

Quelques ouvriers, qui ne blanchissent pas leur pièce après la trempe, emploient, pour juger de la température du recuit, divers moyens: les uns enduisent la surface de leur acier d'huile ou de graisse, et le retirent aussitôt que le combustible s'enflamme; d'autres posent, sur la surface de l'acier chauffé, diverses substances, telle que, du papier, de la plume, du bois, etc.; et ils jugent de leur température par l'action

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de la chaleur du métal sur les substances; ils le regardent comme suffisamment recuit au moment où les substances rougissent, ou bien à celui où elles s'embrâsent: ce mode est moins exact et moins précis que celui des couleurs.

1210. Pour recuire par la seconde méthode. Lorsque l'acier n'a été trempé qu'en partie, et qu'il est encore chaud, que sa surface s'oxide à l'air, on observe la marche de la coloration qui a lieu comme dans la première méthode : on suit donc ses progrès jusqu'à ce que la couleur soit arrivée au terme que l'on juge être propre au recuit que l'on veut obtenir, puis on refroidit subitement l'acier en le plongeant dans l'eau.

Ce mode, quoique analogue, en apparence, au premier, est trèsdéfectueux en ce que le recuit dépend autant de la température que l'acier avait, lorsqu'il a été sorti de l'eau, que de la durée de son refroidissement; or, comme l'on n'a aucun moyen d'apprécier le premier terme, il est impossible de juger exactement du recuit

que l'on a

donné. Nous croyons donc que, si, , par le mode de trempe que l'on

pratique, on est obligé de recuire son acier pour diminuer la dureté, il faut préférer la première méthode à la seconde.

DE LA DISTINCTION DES DIFFÉRENTS ACIERS RELATIVEMENT AUX USAGES AUXQUELS ON PEUT ET L'ON DOIT LES EMPLOYER.

1211. Nous avons déja vu qu'il existait une quantité considérable, (nous pourrions même dire une infinité) de variétés d'acier : les uns sont homogènes, les autres hétérogènes (1); les premiers different entre eux par leur dureté qui augmente avec la proportion de carbone qu'ils

(1) Nous entendons par acier homogène, celui dont la composition est la même dans toutes les parties, et par acier hétérogène, celui qui est composé de parties dont les degrés d'aciération sont différents.

contiennent (1); les autres par le nombre et la nature des divers aciers mélangés dans le même morceau. Cette grande variation est d'un précieux avantage dans les arts, en ce qu'elle procure la facilité de choisir, entre tous, celui qui est propre à chaque objet et à chaque travail.

1212. Il faut, pour tous les objets qui doivent supporter un beau poli, que l'acier soit homogène, que son grain soit fin et serré; s'il était hétérogène, il laisserait souvent apercevoir des fibres, des filandres, par la réunion des divers aciers qui ont des grains différents; si ces grains étaient gros ou inégaux, on distinguerait les vides qui les séparent, et la surface serait cendreuse. On doit encore employer un acier homogène dans les pièces d'horlogerie qui ont des frottements, afin qu'ils s'usent également dans toutes leurs parties; dans celles qui doivent avoir une élasticité uniforme, tels que les ressorts de montre; enfin dans des machines de compression; des laminoirs, des coins de monnaie, des étampes, etc.

Plusieurs instruments de chirurgie, tels que des lancettes, des bistouris; plusieurs outils de graveur, des burins, des échoppes, des brunissoirs, des gratoirs; les outils dont se servent les serruriers, les menuisiers, telles que des limes, des rapes, etc., exigent un acier qui ait de la dureté et du corps.

Tous les objets durs et élastiques, tels que les sabres, les épées, les fleurets, les ressorts des voitures, doivent être faits avec un acier hétérogène; on est même obligé, dans plusieurs circonstances, de souder quelques lames de fer entre des lames de différents aciers, pour en former une étoffe qui ait de la souplesse et de la flexibilité.

1213. Quelques aciers peuvent être durs lorsqu'on les forge, sans que cette dureté influe sur les résultats qu'on se propose d'en obtenir; mais d'autres aussi doivent pouvoir se travailler et se souder facilement;

(1) Le carbone varie dans les aciers, depuis 0, 004 jusqu'à 0, 020; le premier est trèsmou, il est bon pour les ressorts; le second, très-dur, ne se travaille qu'avec une excessive difficulté.

tels sont ceux qu'en emploie dans la coutellerie, dans la taillanderie; ceux avec lesquels on recouvre les pannes des marteaux et des enclumes. De toutes ces variétés, les unes doivent prendre une trempe dure et fine, comme les aciers des canifs; les autres, une trempe molle et douce, susceptible même d'être travaillée au marteau, comme les aciers des faux. 1214. Assez ordinairement, l'acier fondu s'emploie pour la confection des pièces d'horlogerie, pour les objets qui doivent être polis, comme gardes d'épée, boucles, bijoux, etc. L'acier de cémentation s'emploie concurremment avec l'acier fondu pour fabriquer des ressorts de montre; des outils de graveur et d'horloger; des rasoirs; on l'emploie ordinairement seul pour en former des laminoirs, des coins pour la monnaie (1), des étampes. L'acier de forge, bien choisi, s'emploie concurremment avec l'acier fondu et l'acier cémenté, dans la construction des outils d'horlogerie et de graveur; il s'emploie concurremment avec l'acier cémenté dans la fabrication des limes, des rapes, des ressorts de pendules; il est employé, habituellement seul, par les armuriers, les couteliers, les taillandiers, les arquebusiers, etc.

Mais ces trois espèces d'aciers présentent entre eux de telles différences qu'il faut savoir choisir ceux qui sont propres aux divers objets; il faut les soumettre à des épreuves qui mettent à même de connaître leur propriété.

1215. Le coutelier Perret indique cinq manières d'essayer l'acier: 1o par le degré de chaleur qu'il peut supporter pour être forgé (2); 2o par

(1) On fabrique aussi des coins, pour les monnaies et les médailles, avec de l'acier fondu.

(2) Nous avons vu (n° 1157) que l'acier ordinaire pouvait être exposé à un feu d'autant plus fort, qu'il était plus mou, et qu'il approchait davantage de l'état de fer; que l'acier dur ne pouvait être travaillé qu'à la température qui l'amène au rouge-cerise, et quelquefois même, seulement, au rouge-sombre. Nous avons encore vu qu'il existait quelques aciers qui pouvaient être forgés et soudés, quoiqu'ils fussent plus durs que d'autres aciers qu'on ne pouvait pas forger. Ainsi le degré de chaleur ne doit s'appliquer qu'aux aciers ordinaires.

la facilité qu'il présente à être forgé et soudé, lorsqu'on l'a amené à une température convenable; 3° par la nature, l'espèce et la forme du grain qu'il présente, après avoir été trempé; 4o par la beauté, la régularité et le brillant qu'il prend en le polissant; 5o enfin, par la dureté qu'il acquiert après avoir été trempé, dureté que l'on éprouve ordinairement par l'action de la lime sur les faces et sur les arêtes des pièces; on pourrait encore ajouter par la facilité avec laquelle des lames aiguës couperaient le fer et l'acier sans s'émousser, par la manière dont les coins des monnaies et des médailles supportent les chocs auxquels ils sont exposés, etc.

Quoique ces moyens soient assez généralement employés par tous les ouvriers qui veulent essayer leurs aciers; nous sommes obligés d'annoncer que les deux premiers seuls peuvent être regardés comme exacts, puisqu'ils indiquent, positivement, la facilité ou la difficulté que présentent les divers aciers, lorsqu'on veut les travailler ou les souder, ainsi que la température à laquelle ils peuvent être forgés.

Quant aux trois autres, leur résultat variant avec les degrés de trempe que les aciers ont subis, il est difficile de conclure quelque chose d'exact des effets qu'ils présentent d'après la manière dont on les essaie; on sait que le grain est habituellement d'autant plus gros que l'acier a été trempé plus chaud, et que la dureté varie, dans un grand nombre de circonstances, comme le grain.

1216. Réaumur, qui s'est beaucoup occupé de la distinction des aciers (1), établit trois caractères, d'après lesquels on peut apprécier leur qualité, et les usages auxquels ils sont propres : 1o la grainure; 2o la dureté; 3° le corps. Il distingue, sous le nom de grainure, la nature, la forme, la grosseur et la couleur du grain; sous celui de dureté, la résistance que l'acier oppose à des instruments tranchants; enfin, sous celui de corps, la résistance que l'acier éprouve avant de se casser, de se briser, de s'égrainer; le corps, dans cette acception, peut être considéré comme l'opposé de la fragilité.

(1) Art de convertir le fer forgé en acier, 10° mémoire, pages 259 et suivantes.

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