Imágenes de páginas
PDF
EPUB

on ne les approche du feu que successivement, et afin que l'humidité des limes puisse s'évaporer lentement, et que la composition puisse adherer peu-à-peu à leurs surfaces. Lorsque les limes sont sèches, on en porte plusieurs à côté du foyer, là est une petite planche sur laquelle on a mis de la composition pour recouvrir les gerçures et tous les espaces vides qui peuvent se former. Les limes se placent d'abord dans les charbons, mais à une grande distance du vent du soufflet, pour que la matière s'échauffe peu, et prenne de la consistance; ensuite on les porte au grand feu afin de les chauffer assez pour les tremper.

Dès que les limes sont froides, on les retire de la caisse, dans laquelle on les a trempées; on les porte dans une autre caisse pleine d'eau, d'où on les tire, pour les nettoyer avec une brosse et du sable fin. Lorsqu'elles sont bien nettes, on les jette, de nouveau, dans une caisse pleine d'eau, dans laquelle on a délayé de l'argile, d'où on les retire ensuite pour les sécher, et les porter au magasin; là on les nettoie de nouveau, et on les frotte d'huile, pour les préserver de la rouille dans le transport on les enveloppe ensuite, soit dans du papier sec, dans la paille, ce qui dépend de la grosseur et de la nature des limes; les grosses limes sont enveloppées de paille.

soit

1318. Comme il existe de grandes différences entre les limes, on les essaie pour apprécier leur bonté : ces essais se font, en comparant les limes d'une fabrique avec celles d'une autre.

De toutes les manières d'essayer les limes, celle dont on fait généralement usage, consiste à les passer sur des fers et des aciers de différentes duretés, et à observer, dans ces passages: 1o la manière dont elles mordent, la quantité de fer qu'elles enlèvent, et le temps que l'on emploie pour enlever une épaisseur donnée; 2o les traces plus ou moins profondes qu'elles laissent de leur passage, ou l'uni et le poli de la surface limée; 3o l'altération que les limes éprouvent sur les différents aciers, soit dans leurs couleurs, soit dans l'inégale dureté des dents; 4o enfin, la durée de leur action, et l'instant où elles cessent de mordre.

1319. L'Allemagne et l'Angleterre ont fourni, pendant long-temps, la plus grande partie des limes que l'on emploie en Europe. Les grosses

limes se tiraient principalement de l'Allemagne, et les limes fines de l'Angleterre. Les horlogers, et tous les ouvriers qui font usage de limes douces et fines, préfèrent, à toutes les autres, celles qui sont fabriquées par les Anglais cependant les limes douces sont fabriquées à Paris, avec une supériorité qui peut soutenir la concurrence avec toutes les fabrications de l'Europe. Le modeste Raoul et sa famille taillent, dans ce moment, à Paris, des limes qui peuvent être comparées aux meilleures limes anglaises.

DE LA FABRICATION DES RESSORTS D'HORLOGERIE.

1320. On appelle ressorts, en physique, l'effort que font certains corps pour se rétablir dans leur état naturel, lorsqu'ils ont été contraints d'en sortir par une puissance qui les a comprimés ou dilatés.

1321. On peut employer, dans la confection des ressorts, des substances solides, liquides et gazeuses. Sous cette dernière forme, les ressorts sont les plus parfaits, parce que les gaz sont imminemment élastiques, et qu'ils se rétablissent complétement sous leur premier état, lorsque la force, qui les en avait sorti, cesse d'agir.

L'acier paraît être, de tous les solides, celui qui est le plus propre à former des ressorts, aussi en fait-on un grand usage, et en construit-on, en acier, un grand nombre qui sont employés dans plusieurs circonstances. Parmi toutes les espèces de ressorts qui existent, nous ne nous occuperons que des ressorts dont on fait usage dans l'horlogerie.

1322. Pendant long-temps on n'a employé, pour diviser le temps, que des cadrans solaires, des sabliers, des clepsydres, ou horloge d'eau. Depuis six à huit siècles, on a substitué, à ces moyens défectueux, des horloges mécaniques. Quelques personnes prétendent qu'il existait des horloges à rouages dans le septième siècle : elles citent celles de Boëce, de Cassiodore (1). L'histoire fait mention de l'horloge envoyée, depuis,

re

(1) Encyclopédie méthodique, Arts et Métiers, tome 3, partie 1, page 271.

à Pepin-le-Bref, en 760, par le pape Paul Ier; puis de celle qui a été donnée à Charlemagne, en 807, par le calife Arroun al Raschid; mais c'est principalement dans le quatorzième siècle que les horloges se multiplièrent, et commencèrent à devenir communes.

Les horloges mécaniques sont composées de plusieurs rouages qui s'engrènent les uns dans les autres. Ces rouages sont mus par une force, et régularisés par un mouvement : la force qui fait mouvoir les horloges est, ou un poids, ou un ressort d'acier; celle qui fait mouvoir les montres est un ressort. Quant au régulateur des horloges, c'est, aujourd'hui, un pendule, dont on attribue l'invention à Huyghens, et, pour les montres, un ressort spiral dont on attribue l'invention: les uns à l'abbé de Hautefeuille, d'Orléans (1); les autres, au docteur Hook, et leur exécution à Thompson en 1658 (2).

1323. Quoi qu'il en soit de cette invention, nous observerons ici, qu'il existe, en horlogerie, plusieurs espèces de ressorts; tels sont les grands ressorts qui déterminent le mouvement des rouages des horloges, ceux des sonneries, les ressorts en spiral ou ressorts réglants, qui régularisent le mouvement des montres, les ressorts à cadran qui retiennent les montres dans leurs boîtes; les ressorts du marteau, de la détente, du guide-chaîne, etc., qui font mouvoir le marteau, la dé tente, la grande chaîne, etc. De tous ces ressorts, nous ne nous occuperons que des trois principaux : 1o les grands ressorts de pendule; 2o les grands ressorts de montre; 3o les ressorts en spiral, ou ressorts réglants, parce que ce sont les seuls qui méritent quelque attention par la nature du travail qu'ils exigent.

Nous diviserons tout ce qui a rapport au travail de ces trois ressorts, en quatre parties: 1odu choix de l'acier; 2o de la formation des lames; 3o de la trempe et du recuit; 4o du pli des lames et de leur fixation.

(1) Encyclopédie méthodique, Arts et Métiers, tome 3, partie 1, (2) Idem, page 385.

page 263.

Du Choix des Aciers.

1324. L'espèce et la nature de l'acier doivent différer en raison des dimensions des ressorts. Lorsqu'ils sont très-petits, il faut que l'acier soit fin et homogène, parce que la plus petite différence dans sa nature en produirait de considérable dans son élasticité, et l'inégalité de cette élasticité rendrait les ressorts défectueux. Lorsqu'ils sont gros, ils deviennent roides, difficiles à plier, et très-cassants, s'ils sont d'acier fin.

Pour leur donner du corps, il faut mélanger du fer ou de l'acier mou avec l'acier dur qui est destiné au ressort, d'où il suit qu'il faut employer, dans cette circonstance, des aciers inégaux, afin d'en former une espèce d'étoffe.

1325. Pour qu'un ressort puisse produire l'effet auquel on le destine, il faut qu'il jouisse de deux propriétés : 1o de supporter un grand pli sans se rompre; 2o de faire des efforts continuels pour reprendre sa forme primitive, et de la reprendre complétement lorsque la puissance qui l'a déformée cesse d'agir. Il faut, pour remplir ces deux conditions, que les ressorts aient à-la-fois de la roideur et de la souplesse.

Lorsque l'acier a peu d'épaisseur, la dureté qu'il acquiert par la trempe altère peu sa flexibilité; nous voyons, en effet, que le verre qui est très-dur et très-cassant, est susceptible de prendre toutes sortes de plis, lorsqu'il a été tiré en fil extrêmement fin; mais qu'il se brise aussitôt que l'on veut le plier, lorsqu'il conserve encore un peu d'épaisseur.

Si l'on peut, sans altérer sensiblement sa souplesse, donner, à l'acier mince, des trempes de diverses duretés; il n'en est pas de même de celui qui a un peu d'épaisseur : plus on le trempe dur, plus il devient cassant, et moins il est susceptible d'être plié.

Ainsi, lorsque l'acier doit être courbé, il faut que le degré de trempe qu'il reçoit, soit en raison inverse de son épaisseur; mais comme les degrés du refroidissement de la trempe sont fort grands pour de trèspetites augmentations d'épaisseur, bientôt, l'acier qui doit être plié n'est plus susceptible d'être trempé, il faut qu'il reste mou.

Mais l'acier mou et non trempé conserve, comme le fer, le pli qu'il reçoit; il n'est plus élastique: d'où il suit qu'en employant de l'acier fin et homogène, il doit avoir des épaisseurs d'autant plus petites que l'acier est plus fin, sans quoi il serait impossible d'en construire des ressorts; c'est pour remédier à cet inconvénient que l'on forme des étoffes, mélangées d'acier fin, très-élastique, et d'acier mou, ou de fer dur, qui ont beaucoup de corps et peu d'élasticité. Nous nous étendrons davantage sur la nature et la propriété de ces étoffes, en parlant de la fabrication des armes blanches.

1326. Il nous suffit d'avoir fait remarquer que chaque espèce de ressort, relativement à ses dimensions, exige l'emploi d'un acier différent; aussi est-on parvenu, par une suite de tâtonnements, à trouver que, pour les très-petits ressorts en spiral, il faut un acier fin et homogène; pour les petits ressorts de montre, de l'acier cémenté, affiné en aplatissant, fondant et forgeant plusieurs barres ensemble, ou mieux, d'excellent acier fin et affiné de Styrie ou de Carinthie; enfin, pour les grands ressorts des horloges, des aciers différents, affinés et forgés ensemble; et que l'on connaît sous le nom d'étoffe de pont.

De la Formation des Lames.

1327. Les lames des ressorts des pendules s'étirent en les forgeant chaud, et elles se finissent en les forgeant à froid.

D'abord on chauffe un morceau d'étoffe de pont, et on le forge jusqu'à ce qu'il ait environ 9 pieds de long, 13 lignes de largeur et une demi-ligne d'épaisseur (1); puis on le recuit dans un feu de charbon de bois brûlant naturellement.

Après le recuit, on essaie, en le pliant, si le ressort varie d'épaisseur; ensuite on le forge à froid avec la panne étroite d'un marteau; les coups sont donnés dans le sens de la largeur, parallèlement entre eux, de l'élargir et de l'amincir également.

afin

[blocks in formation]
« AnteriorContinuar »