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ches et noires qui recouvrent la surface des lames. On forme une trousse A (planche 64), de quinze à dix-sept de ces lames, qu'on ordonne tellement, qu'il y ait toujours une lame d'acier mou, ou une lame de fer, entre deux lames d'acier dur; les deux lames extérieures sont de fer, ou d'acier mou, et celle du milieu, d'acier fin.

Cette trousse est chauffée au rouge-vif, pour être soudée, forgée un peu méplat, et étirée. On recouvre la trousse d'argile, ou de sable fusible, pour faciliter la soudure, en détruisant et en dissolvant l'oxidule; puis on chauffe le barreau au rouge-blanc, on le porte dans un étau B, où on le tord en forme de vis pour contourner les lames qui le composent; on l'aplatit, et on le forge en lame, de 8 à 9 lignes de largeur, sur 3 à 4 d'épaisseur : c'est ainsi qu'on obtient l'étoffe de Damas ordinaire.

Si l'on veut avoir quelques détails sur le procédé à suivre pour obtenir un arrangement de lames propres à produire un dessin donné, on peut consulter l'excellent Mémoire de Clouet, imprimé dans le Journal des Mines (1). Avec cette étoffe, on prépare celle qu'on doit donner aux sabres, en coupant en deux la barre de Damas obtenue, en plaçant une lame de bon acier fin entre les deux parties de la barre, chauffant, soudant et forgeant ces trois morceaux réunis : l'étoffe qu'on obtient de cette manière, jouit du triple avantage de former, avec la lame du milieu, un excellent tranchant; de produire, sur les faces des lames, des dessins variés c, formés de veines cotonnées, noires et blanches; et d'avoir une élasticité capable de résister à tous les chocs.

1369. Nous sommes loin de croire que cette étoffe, à laquelle le coutelier Perret a donné le nom de damas artificiel, soit la même que celle avec laquelle on fabrique aujourd'hui, en Perse, ces lames si.estimées. Perret croit (et nous n'avons aucune raison pour nous réunir à son opinion, ou pour la contredire) que l'acier, dont on fait usage dans ces deux endroits, est de l'acier fondu.

(1) Tome 15, page 421.

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C'est par la lame d'acier, soudée entre les deux lames d'étoffe damassée, que les sabres européens coupent; et leur tranchant ne differe point des tranchants ordinaires; rien ne contribue donc à produire cette dentelure fine qui caractérise ceux des vrais damas. En examinant ceux-ci avec soin, on n'aperçoit aucune différence entre l'étoffe du taillant et celle de la surface; elles forment l'une et l'autre le même dessin prolongé, lorsqu'on passe de l'acide dessus; ce qui fait croire que la lame entière est formée de la même substance.

Cependant, nous ne nous dissimulons pas qu'il doit exister de grandes difficultés pour obtenir un acier fondu, contenant une combinaison intime de fer et d'acier, ou d'acier à divers degrés, susceptible de produire ce sablé noir et blanc qu'on distingue sur un grand nombre de sabres. Avouons donc franchement notre ignorance à cet égard, et osons confesser que nous ne connaissons encore aucun des moyens qu'on emploie pour obtenir les bonnes lames asiatiques.

Quoi qu'il en soit, nous devons prévenir qu'on fabrique, aujourd'hui, de très-belles lames de damas artificiel dans la manufacture de Klingenthal. Le directeur de cette manufacture nous en fit présent d'une, qui est d'une très-belle exécution, et qui a même, sur la véritable lame de Damas, une sorte de supériorité dans l'exécution des dessins que produit l'étoffe de la surface.

Du Travail des Lames.

1370. On peut diviser, en sept parties, le travail des lames : 1o étirer la maquette; 2o souder le plion; 3o distribuer la matière dans les lames; 4o former les plans creux; 5o former le tranchant, et donner la courbure; 6o forger la soie; 7o l'examen des lames forgées.

1o On appelle maquette une portion de l'étoffe, forgée de manière à lui donner une forme approchante de celle que la lame doit avoir. En général, la longueur et la largeur de la maquette ont les deux tiers de celles de la lame finie, tandis que l'épaisseur est une fois et demie plus grande.

2o Le plion est un morceau de fer plié en forme de V, que l'on soude dans le haut de l'arme pour former la soie, c'est-à-dire, une espèce de pyramide, qu'on introduit dans la poignée, et qui sert à la fixer à l'arme. Ce travail se fait en deux chaudes; il est exécuté par le maître et le compagnon qui forgent l'arme.

3° Distribuer la matière, c'est chauffer et forger la maquette, afin de distribuer inégalement l'acier, suivant des proportions convenables à l'arme. Il faut, en faisant cette distribution, prévoir ce que les estampages feront perdre et gagner sur chaque partie, afin de ne laisser, dans chacune, que la matière absolument nécessaire. Si, dans cette distribution, la maquette contient trop d'acier, il faut que le forgeron conduise cet excédent vers la pointe, afin de pouvoir l'en séparer, en terminant le biseau.

Cette opération se fait ordinairement en cinq chaudes : dans la première, vers le talon où il y a un peu à réduire, on peut avancer l'ouvrage de 9 pouces ; 9 pouces ; dans les dernières où il y a beaucoup à travailler, on ne peut l'avancer que de 7. On chauffe, chaque fois au demi-blanc, la partie de la maquette, que l'on se propose de travailler.

4o Pour rendre les armes plus légères, on les évide: on nomme ces vides pans creux; ils se font avec des étampes, entre lesquelles la lame est placée. Ces étampes sont de deux sortes : les unes commencent le pan creux, les autres le terminent; les premières produisent un arrondissement conforme à celui que la lame obtiendra, en la présentant de travers à la meule; les secondes produisent un enfoncement semblable à celui que formerait une meule plus petite, qui ne ferait, sur chaque point de sa longueur, qu'un vide d'un quart. Ce travail s'exécute, ordinairement, en trois séries de deux chauffes, au demi-blanc chacune. Il est des sabres dont quelques séries exigent jusqu'à quatre chauffes.

5o Le tranchant se forme, en frappant à plat sur le bord de la face de la lame où il doit exister: celle-ci se pose sur une étampe à chanfriner. C'est le maître seul qui exécute ce travail.

En frappant sur le bord de la lame, pour former ce tranchant, on

A

amincit et l'on élargit le bord; l'élargissement, devenant plus considérable du côté où se forme le tranchant, que du côté opposé, il s'ensuit que cette opération contribue naturellement à former une cambrure concave du côté du dos, comme celles des sabres européens on aide cette cambrure en frappant, de temps en temps à plat, sur le dos de la lame, et on la contrarie en frappant également sur le tranchant.

Quelquefois on facilite la cambrure à l'aide des étampes, qu'on appuie plus fortement du côté convexe que du côté concave.

6o Forger la soie, c'est chauffer, et forger le plion qu'on a soudé sur le talon des lames.

7o Il faut, avant de tremper les lames, examiner si elles sont susceptibles d'être terminées pour cela, le contrôleur regarde, avec soin, si la lame n'a ni doublure, ni travers, ni marque de feu; puis il vérifie les épaisseurs au calibre, et la cambrure au fourneau.

1371. Les instruments, dont on se sert pour fabriquer les armes, sont des enclumes C, D, E, contenant des entailles pour y placer des étampes F, G, ou qui aient elles-mêmes les étampes nécessaires pour façonner l'arme. A côté de l'enclume D, est un dressoir dans lequel on place l'arme pour le dresser: les marteaux H, dont on fait usage, ont différentes formes, afin de pouvoir obtenir facilement les cannelures que les armes présentent. On voit, dans les figures I, K, L, M, les formes des quatre principaux sabres dont on fait usage; savoir: I, sabre de grenadier; K, celui de hussard; L, celui de chasseur; M, celui de carabinier.

De la Trempe.

1372. Sur un âtre percé au fond, afin de pouvoir facilement mouvoir la lame dans le foyer, l'arme est chauffée dans un feu de charbon de bois on la chauffe à la température qui est propre à la nature de l'acier dont elle est formée; la couleur ordinaire est le rouge-cerise. Avant de mettre les lames au feu, on les redresse à froid, en évitant, soigneusement, qu'elles ne portent à faux.

Comme il est extrêmement difficile d'amener toutes les parties de la

lame à une température uniforme, en la chauffant dans un foyer dont les dimensions sont plus petites que celles de l'arme, on égalise la température, en passant la lame chaude dans un tas d'écailles de fer mouillé, qu'on amoncelle sur l'âtre de la forge.

Par le passage total ou partiel de la lame, une ou plusieurs fois dans ces écailles, on l'amène à la température propre à la trempe.

Alors le trempeur plonge, dans une cuve pleine d'eau, et par le dos, les lames qui en ont un, en commençant par la base de la lame, qu'il plonge la première.

1373. Toutes les lames éprouvent, après la trempe, un recuit qui est plus ou moins fort, relativement à la dureté que l'acier a obtenue, laquelle se juge par le découvrement. Lorsque l'acier se découvre bien, on recuit la lame jusqu'au bleu; s'il se découvrait mal, on ne le recuirait qu'au jaune-paille; si la lame se découvrait beaucoup, même en la trempant à un rouge-sombre, il faudrait la recuire jusqu'au grisâtre.

En général, c'est par la manière dont l'acier se découvre qu'on juge de sa dureté, dans les fabriques d'armes blanches; et lorsqu'il n'est pas assez découvert, on le trempe de nouveau, en élevant les lames à une plus haute température.

De l'Aiguiserie.

1374. Ce travail, tout simple qu'il paraît, se divise cependant en douze opérations six pour aiguiser; cinq pour polir, et une pour brunir.

1o On aiguise à la grande meule, en travers; on y blanchit la lame sur les deux faces.

2o On aiguise en travers le chanfrein et le biseau; ce n'est qu'une continuation de la première opération, qui s'exécute en inclinant un peu l'arme.

3o On aiguise le dos en travers, et on le blanchit.

4o On aiguise le tranchant en long : cette opération, qui se fait sur une meule cannelée, a pour objet de donner, au tranchant, la courbure qui lui est propre.

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