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trouvoit le plus fort en campagne. III. Païs malheureux que celui qui n'a jamais de défenfeurs, & qui a les deux partis pour ennemis ! Pour affurer ces conquêtes, il auroit fallu prendre Trévise & Padouë. C'étoit la retraite des armées Venitiennes, d'où elles fortoient dès que les ennemis étoient rentrez dans leurs quartiers, & reprenoient fans peine tout ce qu'elles avoient perdu fans réfiftarice. La Paliffe fit propofer à l'Empereur de faire le fiége de ces deux villes; Maximilien lui écrivit de l'attendre, parce qu'il s'y vouloit trouver en perfonne, ajoûtant qu'il feroit porter les munitions néceffaires à ces deux entreprises, & qu'il achevoit de les ramaffer. Cependant il ne venoit point, & l'on ne voyoit arriver au camp de fa part que quelque infanterie mal armée, & qui n'avoit pas encore touché fa premiere montre, Ce Prince s'arrê

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toit toujours auprès de Trente où
il perdoit un tems dont tous les
momens étoient précieux pour fes
affaires, à courir après des bêtes.
Il ne fçavoit pas même s'il ne de-
voit point fe racommoder avec les
Venitiens pour être plutôt en état
d'arborer fes étendarts fur le Châ-
teau Saint Ange. Dans cette idée
il avoit commencé d'écouter les
propofitions que le Sénat lui faifoit
toûjours faire de tems en tems, fui-
vant la maxime de la République,
qu'il ne faut jamais discontinuer
de négocier avec son ennemi
quand même on n'auroit aucun
deffein de traiter férieulement avec
lui. Enfin Maximilien après avoir
mandé la Paliffe, & tenu plufieurs
conferences avec ce general, lui
ordonna d'aller prendre le Caftel-
novo qui commandoit le pas de la
Scala, paffage important pour en
trer dans le Trévilan. Le Géné-
ral François le fut bientôt acquité

de fa commission, mais quand il 15 II. demanda de nouveaux ordres, on lui propofa d'entrer dans le Frioul. Le païs étoit trop éloigné pour y engager une armée destinée principalement à la confervation de l'Etat de Milan,toujours menacé d'une invafion fubite par les Suiffes. C'est ce que la Paliffe fit repréfens ter à l'Empereur. Ce Prince fans s'expliquer s'il fe rendoit aux raifons de la Paliffe, ou s'il fe tenoit offenfé de fon refus, partit brusquement de Trente pour s'en aller dans le fond de l'Allemagne. En partant il l'ordre à fes troupes de tenter feules l'entreprise du Frioul.

envoya

La Paliffe pour la favorifer autant que le lui permettoient les interêts de fon maître, s'avança dans le païs ennemi pour faire diverfion, & fe pofta fur la Piave, & fon mouvement retint, comme il l'avoit prévu, l'armée Venitienne en Terre

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ferme. Les Allemands ne trouverent donc point de troupes en campagne dans le Frioul, & s'emparerent fans peine du païs : ils prirent d'abord Udiné, & paffant Je Lizonzo, ils occuperent encore Gradifque en Carinthie. Mais après ces exploits ils rejoignirent fur la Piave l'armée Françoise, qui étoit obligée d'abandonner fon pofte, La Palifle étoit preffé de s'en retourner dans l'Etat de Milan, d'où il lui venoit courrier fur courrier, pour lui donner avis que les Suiffes s'atroupoient vers Bellinzone. Ainfi tout ce qu'il put faire pour le fervice de l'Empereur en s'en retournant, fut de fe prefenter devant Trevife. La Garnifon faifant bonne contenance, il délogea; parce que la place étoit trop forte pour l'emporter dans le peu de tems qu'il pouvoit donner à fes Alliez. Dès qu'il fut en marche, l'armée Venitienne fe mit à fes trouffes, mais

de loin, & fans lui caufer aucun 1511 dommage. Ce Général fe refferra même fi peu, quoiqu'il fût fuivi, qu'il envoya enlever, chemin faifant, deux cens Gendarmes des ennemis qui étoient en quartier aux portes de Padouë.

Son départ ayant obligé les Allemands, qui n'étoient plus qu'une poignée de monde à quitter la campagne, les Venitiens y rentrerent, & reprirent toutes les conquêtes que les ennemis venoient de faire du côté du Frioul, à la referve de Gradifque, qui lui demeura. C'eft ainfi que fe termina cette campagne, qui de toutes celles que fit Maximilien durant la Ligue de Cambray, ne laiffe pas d'avoir été la plus utile pour fes fucceffeurs. Neanmoins elle décredita fes armes, & rendit de la réputation à celles des Venitiens. Les avantages legers que Maximilien remportoit fur eux depuis trois ans,

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