conferver l'Etat de Milan. Ils sçaSvoient d'ailleurs la diverfion que les Venitiens alloient faire par la furprise de Breffe.

Les gens d'Eglife, qui n'entendent rien à la guerre, pensent volontiers qu'on ne la fait pas affez vivement. Ainfi le Légat Médicis s'imagina que le Viceroy l'amufoit, & qu'il y avoit dans fa lenteur de l'affectation & de l'artifice. Il lui reprocha donc avec chaleur fon inaction, ajoûtant qu'il prendroit une place comme Boulogne en deux jours, s'il commandoit l'armée; mais qu'il s'appercevoit bien malgré fa mauvaise vuë (le Cardinal de Médicis avoit la vuë très-baffe) que le deffein de fervir l'Union n'étoit ni fon premier ni fon unique but. Le Viceroy lui répondit avec le flegme de fa nation, que les Ecclefiaftiques devoient fe contenter de prier Dieu pour l'heureux fuccès des entreprises où ils

intereffoient, & laiffer agir les gens du métier à leur gré. Que le Pape & le Roy Catholique lui avoient confié leurs troupes, & que comme il devoit leur en répondre, il étoit jufte qu'il fût le maître de les faire agir ainsi qu'il jugeroit à propos. Par les difpofitions que le Viceroy avoit faites le jour précédent, on jugeoit que fon deffein étoit de faire ouvrir la tranchée la nuit fuivante. Mais il ne voulut pas qu'on pût dire que les difcours du Cardinal l'euffent obligé de fe hâter, & il remit encore à commencer les approches. Il fe contenta d'envoyer Fabrice Colomne camper à la tête d'un détachement confidérable du côté de Finale. Son ordre portoit qu'il occupât Sainte Marie del Monté, par où devoient arriver les François, s'ils marchoient ferieusement pour fecourir Boulogne. Mais le Viceroy ayand cu beaucoup de fujets de croire que

Gafton ne tenteroit pas de délivrer la place, il retira son poste au bout de trois ou quatre jours, & Colomne revint au camp. Le Viceroy venoit d'apprendre que l'armée Venitienne fuivant le projet de campagne arrêté entre les Confederez, commençoit la diversion, qu'elle avoit paffé l'Adige, & qu'elle étoit entrée déja dans le Breffan. Il étoit apparent que Gafton employeroit fes armes à garentir les places de fon maître, plutôt qu'à conferver celles de fes Alliez, & que renonçant au fecours de Boulogne, il fe mettroit inceffamment en marche pour fauver Breffe & Bergame qui étoient en grand péril. Leurs peuples affectionnez aux Venitiens, n'étoient contenus que par de foibles garnifons. Les efpions du Viceroy le confirmoient encore dans ce fentiment. Ils lui raportoient tous, que Gafton de Foix fur la pre

miere nouvelle de l'irruption des Venitiens, avoit fait jetter un pont fur le Po, ce qui marquoit un projet qui l'éloignoit de Boulogne. Enfin toute la manœuvre du Général

François fut telle que Cardonne dût s'y tromper; parce qu'il étoit habile homme. Gafton de Foix ve noit encore de rifquer deux compagnies de gendarmerie & mille fantaffins qui fe jetterent dans Boulogne après une marche très-dangereufe. Il devoit fembler incroya ble que Gaston eût voulu hafarder ce Corps, fi fon deffein n'eûc été d'abandonner après cela Boulogne à fa destinée. La ville n'avoit pas befoin d'un fecours prématuré, ni qu'on rifquât un détachement pour le lui donner, quand Gaston en étoit campé à une journée, & quand il pouvoit du foir au matin en venir à une action, s'il étoit déterminé de la rifquer pour faire lever le fiége.

I.

Gal

Le Viceroy féduit par ces cir511. contances, prit donc l'apparence pour la verité, & perfuadé que ton, occupé à deffendre le Bressan lui laifferoit faire tranquillement fon fiége, il ouvrit la tranchée dès que Colomne fut rentré dans le camp. On fit deux attaques contre la ville, l'une à la porte de S. Etienne, & l'autre à la porte de Caftiglioné. Dès que les batteries eurent ouvert la muraille du côté de la porte de S. Etienne, toute Farmée prit les armes pour donner l'affaut de deux côtez. Une partie de l'armée devoit attaquer par cette bréche, & l'autre par une bréche qu'un fourneau prêt à jouer devoit faire du côté de la porte de Caftiglioné, dans le moment même de l'affaut. Navarre répondoit de l'effet de ce fourneau. Il l'avoit conduit fous une Chapelle de la Vierge, dont la clôture faifoit en cet endroit une partie de la muraille de la ville.