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monde en un inftant, & tou-, tes les Dames defcendirent el-les-mêmes pour prier le Guet de relâcher l'infortuné Durand, qui ne ceffoit de protefter de fon innocence. Je defcendis comme les autres; mais je ne fus pas plûtôt hors de la porte, que j'apperçus le Chevalier & un autre, qui à la faveur du tumulte, m'emmenerent dans la vieille rue du Temple, où ils me firent monter dans une chaife de pofte qui me conduifit chez Madame la Marquife d C... qui étoit du complot. Je revis le Chevalier un moment après, avec lequel je fus fiancée & mariée le foir m me par l'Abbé Cieli, précepteur, du fils de la Marquife & dans fa Chapelle ; ainfi je fus fiancée deux fois en un jour, & mariée une. Pendant le repas, je lui

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demandai comment il s'y étois pris pour faire reconnoître Du rand qu'il n'avoit jamais vu. Il me répondit qu'il avoit employé pour cela tous les pauvres gens de fon quartier qui le connoiffoient parfaitement, leur ayant donné a chacunun Louis de récompenfe. Nous n'étions pas en fûreté dans Paris, & M. de L. D. qui y rodoit tous les jours, nous caufoit de continuelles allarmes. La Marquife de C... s'apperçut de notre emBarras, & nous offrit, jufqu'à ce que nos affaires fuffent en meilfeur ordre, fon Châteauà quatre fieues d'Aix en Provence que nous acceptâmes. Hélas! Ce fut en cet endroit que m'ar riva le plus grand des malheurs que j'avois à craindre ; le Chevalier qui s'étoit donné mille peines pour mon enlevement,

fut attaqué d'une maladie dangereufe que les Médecins affurerent être la fuite de grandes fatigues. J'eus beau lui donner tous les fecours dont j'étois capable, faire des vœux & des prieres, toutes mes attentions ne fervirent qu'à le faire mourir plûtôt. Défolé de laiffer une femme qu'il aimoit & dont il fe voyoit aimé avec tant d'ardeur, il me donna par teftament tout ce qu'il poffedoir, & la part de fes biens que les leix le mettoient en état d'ordonner, & me pria pour derniere grace d'envoyer à M. de L D. un papier écrit de fa main, où il le conjuroit par l'amitié qu'il avoit toujours eu pour fon cher fils avant qu'il fût indigne, de fes bontez, d'avoir pitié de fa femme, lui déclarant tout ce qui s'étoit paffé depuis fon dé

part pour Rennes jufqu'au moment qu'il écrivoit. Enfin il expira entre mes bras. Il n'eft perfonne qui ne fçache quelle douleur on reffent en pareille occafion, je ferois morte moi-même, fi la Marquise de C..........ne fût venue me confoler,me promettant de ne point m'abandonner. Elle rendit les derniers devoirs au Chevalier, & prit le foin de faire tenir à fon pere le paquet dont il m'avoit chargée Quand je fus un peu mieux nous revinmes ensemble à Paris, où fes continuelles bontez me rendirent tout-à-fait la fanté. Elle pouffa ce zele jufqu'à folliciter ma grace auprès de mon pere & de M. de L. D. qui me l'accorderent. Il y a deux. ans que j'ai perdu mon pere, il m'a laiffé des biens confidérables, qui joints à ceux que M.

de L. D. totalement revenu de fa haine, m'a aflûré, me mettent en état de trouver un parti des plus riches, fi je le cherchois.

Madame de L. D. ayant fini de parler, tout la compagnie alloit déplorer le malheur du Chevalier, quand confiderant que ce feroit renouveller à plaifir les douleurs de M. de L. D. dont la tendrefle pour ce fils avoit caufé tant de catastrophes, jugea qu'il falloit renfermer ces plaintes en foi-même pour se livrer à la joye que mon hymen avec une femme fi gracieufeinfpiroit.J'euslebonheur d'être affuré de fa belle bouche qu'elle m'aimeroit autant que le Chevalier, en cas que je fufle pourvû de fesbellesqualitez.Les préparatifs de cette feste furent prefqu'a uffi magnifiques que

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